Les derniers mammouths se sont éteints il y a environ 4 000 années. Cet animal préhistorique pouvait peser jusqu’à 4 ou 6 tonnes et mesurait parfois 4 mètres de haut. L’espèce est apparue il y a des millions d’années, avant de se diversifier (le mammouth laineux est apparu il y a 600 000 ans). Puis, peu à peu, il y a 15 000 à 20 000 ans, sa disparition a commencé.
Quelles sont les causes de leur extinction ? Traditionnellement, le débat scientifique identifie deux raisons, à trouver dans un réchauffement rapide du globe — accompagné d’une humidification — ainsi que dans les activités humaines de chasse intensive. Les deux phénomènes, pris ensemble, auraient précipité la fin des mammouths.
Un projet mené sur 10 ans vient apporter un point de vue plus radical sur le cours des événements : l’étude qui en résulte, publiée le 20 octobre 2021 dans Nature, postule que la cause est le changement climatique de l’époque à lui seul. Dans cette perspective, la chasse n’aurait aucun lien avec l’extinction.
L’extinction des mammouths à l’épreuve de la génétique
L’équipe de recherche à l’origine de cette étude a passé 10 ans à décrypter des fragments d’ADN prélevés dans le sol arctique — là où les mammouths avaient l’habitude de se nourrir et laissaient donc diverses traces génétiquement identifiables (urine, fèces, cellules de peau). Grâce à ce séquençage, les auteurs ont pu dresser un état des lieux génétique des populations à travers le temps dans ces zones clés. Ils ont ensuite mis ces éléments en relation avec les connaissances paléoclimatiques : les changements dans le climat laissent des traces, ce qui permet de savoir si la planète se réchauffait, se refroidissait, de quoi était composée l’atmosphère, etc.
Finalement, les chercheurs ont été en mesure de dresser ce constat : les populations de mammouths laineux déclinaient à l’exact même rythme que le réchauffement planétaire qui avait lieu à l’époque.
« Nous avons enfin pu prouver que ce n’était pas seulement le changement climatique qui était le problème, mais la vitesse à laquelle il s’est produit qui a été le coup de grâce — ils n’ont pas été capables de s’adapter assez rapidement lorsque le paysage s’est radicalement transformé et que leur nourriture est devenue rare », expliquent les chercheurs dans un commentaire sur leurs travaux.
La vitesse du changement climatique comme coup de grâce
Le climat s’est humidifié, la glace a fondu, le taux de précipitation a changé ; des lacs, rivières, marais se sont formés. C’est un changement rapide de l’écosystème qui est alors advenu, provoquant une métamorphose de la végétation. Or, les mammouths étaient végétariens, se nourrissant de plantes et de certaines plantes en particulier. Le moment est venu où leur régime alimentaire n’était plus adapté. « Nous avons montré que le changement climatique, et plus particulièrement les précipitations, entraînait directement le changement de la végétation — les humains n’ont eu aucun impact sur eux d’après nos modèles », estiment les auteurs de cette étude. Ces derniers relèvent que si les humains préhistoriques chassaient certes les mammouths, ils se concentraient aussi et surtout sur des proies plus petites et faciles, relativisant leur impact potentiellement déterminant sur cette espèce.
« Le changement s’est produit si rapidement qu’ils n’ont pas pu s’adapter et évoluer pour survivre »
Face à la rapidité du changement climatique, les mammouths laineux n’ont pas eu le temps de s’adapter. Raison pour laquelle ces chercheurs insistent non seulement sur le changement survenu dans le climat, mais aussi et surtout sur son rythme accéléré. « C’est une dure leçon de l’histoire qui montre à quel point le changement climatique est imprévisible — une fois que quelque chose est perdu, il n’y a pas de retour en arrière. Les précipitations ont été la cause de l’extinction des mammouths laineux en raison des modifications apportées aux plantes. Le changement s’est produit si rapidement qu’ils n’ont pas pu s’adapter et évoluer pour survivre. »
La leçon de l’histoire est à mettre en perspective avec le changement climatique actuel causé par les activités humaines, estiment les auteurs. « Les premiers humains semblent avoir vu le monde changer à tel point qu’il n’était plus reconnaissable. Cela pourrait facilement se reproduire et nous ne pouvons pas considérer comme acquis le fait que nous serons cette fois encore là pour en être témoins. La seule chose que nous pouvons prédire avec certitude est que le changement sera massif. »
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