Grâce à l’observatoire Chandra, des scientifiques ont repéré un indice intéressant : celui de l’existence potentielle d’une exoplanète dans une autre galaxie que la Voie lactée. Mais rien n’est confirmé : ce n’est pour l’instant qu’une candidate.

« On a découvert une planète, dans une autre galaxie », « Une exoplanète découverte dans une autre galaxie » : de telles affirmations sont-elles vraiment correctes ? Ces titres de presse ont accompagné la publication d’une étude dans la revue Nature, le 25 octobre 2021, également relayée par la Nasa ce jour-là.

Pourtant, il manque un mot essentiel, qui figure à la fois dans le titre de l’étude et celui du communiqué : « possible ».

Un petit mot qui a son importance. // Source : Capture d'écran Nature

Un petit mot qui a son importance.

Source : Capture d'écran Nature

« C’est une candidate »

Vient-on de trouver une exoplanète extragalactique ? Pour l’astrophysicienne Anne-Marie Lagrange de l’observatoire de Paris, directrice de recherche au CNRS, « la réponse est simple, c’est non ». Interrogée par Numerama, l’experte souligne que « ce qui a été annoncé, c’est une candidate. Il faudra pas mal de temps, si on veut la confirmer par la méthode des transits : plusieurs dizaines d’années. »

Que rapportent exactement les auteurs de l’étude publiée dans Nature ? Ils indiquent avoir identifié des indices de la présence possible d’une exoplanète, dans une autre galaxie que la Voie lactée, la galaxie M51 — aussi nommée la galaxie du Tourbillon. Comme le résume le communiqué de la Nasa, ce pourrait être « la première planète observée à transiter devant une étoile en dehors de la Voie lactée ». Cette candidate a été repérée avec Chandra, un télescope spatial qui observe le rayonnement X. L’observatoire a détecté une atténuation momentanée de ce type de rayons, dans un système binaire. Les scientifiques en déduisent qu’un scénario possible serait une exoplanète passant devant une source de rayons X, autour d’une étoile à neutrons ou d’un trou noir, en orbite autour d’une étoile compagnon.

Orbite possible de la possible exoplanète. // Source : NASA/CXC/M. Weiss

Orbite possible de la possible exoplanète.

Source : NASA/CXC/M. Weiss

Une approche alternative

« On n’est pas capables, a priori, d’aller chercher des planètes très lointaines, dans d’autres galaxies, commente Anne-Marie Lagrange. Là, l’astuce n’a pas été d’aller observer ces étoiles comme on le ferait habituellement, car leur lumière serait trop faible. La démarche est intéressante : aller observer dans le domaine X. » La méthode de détection par transits est fréquemment utilisée dans la quête des exoplanètes : lors du passage de l’astre devant son étoile, une petite partie de la lumière que celle-ci émet est bloquée par la planète. Concrètement, on observe que le signal lumineux émis par l’étoile chute, de façon temporaire. « La méthode des transits est basée sur la répétition, décrit Anne-Marie Lagrange. On voit plusieurs fois une baisse du flux de l’étoile, de manière régulière. La différence de temps entre les deux baisses donne la période de la planète, donc sa distance. »

Ici, la méthode diffère quelque peu. « Une approche alternative, lit-on dans l’étude, consiste à étudier le comportement temporel des rayons X émis par des sources de rayons X extragalactiques brillantes, où une planète en orbite bloquerait temporairement les rayons X et provoquerait une brève éclipse. » C’est potentiellement l’un de ces événements qu’ils pensent avoir repéré dans M51-ULS-1, un système binaire de la galaxie du Tourbillon. Dans leur scénario, la potentielle exoplanète aurait une taille similaire à la source de rayons X : son passage pourrait bloquer totalement ou quasi totalement ces rayons X (d’où l’emploi du mot éclipse). Une telle méthode aiderait donc à repérer des transits à des distances bien plus grandes qu’actuellement.

70 ans d’attente jusqu’au prochain transit

Dans le cas de cette exoplanète candidate, la méthode pose néanmoins un défi de taille, résume Anne-Marie Lagrange. « Plus la planète est loin de son étoile, plus la période est longue. Ici, la modélisation nous dit qu’elle serait assez loin, ça veut dire qu’il faudrait environ 70 ans pour observer le transit suivant. » En d’autres termes, impossible d’espérer vérifier l’hypothèse selon laquelle il s’agirait d’une exoplanète avant des décennies.

Voilà pourquoi il faut rester d’autant plus prudent face à cette annonce, qui reste toutefois prometteuse et propose une nouvelle méthode de détection intéressante. « La recherche d’extroplanètes [sic], des planètes en orbite situées en dehors de la Voie lactée, est désormais devenue une entreprise réaliste et pratique », concluent les auteurs de l’étude.

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