Aller sur la Lune est une chose. S’y établir durablement en est une autre. Parmi les défis innombrables qui guettent les astronautes comme les agences spatiales, la question de l’approvisionnement en énergie pour alimenter une base figure en bonne place sur la liste. Quelle solution envisager ? Acheminer régulièrement des batteries entre la Terre et la Lune ? Utiliser des panneaux solaires ?
Le salut viendra peut-être davantage du nucléaire. En tout cas, c’est une option qui est considérée avec attention par l’agence spatiale américaine, en témoigne un communiqué du laboratoire national de l’Idaho, qui est un centre de recherche nucléaire. On y lit que la Nasa ainsi qu’un contractant du département américain de l’énergie veulent recueillir des propositions dans ce domaine.
Celles-ci doivent porter sur des « technologies innovantes pour un système d’énergie de fission de surface pour des applications d’énergie lunaire ». Les candidats ont jusqu’au 19 février 2022 pour se manifester. Le délai est court, mais il lui faut tenir compte des plans de la Nasa visant à ramener des astronautes sur la Lune à partir de 2025, au plus tôt — il n’y aura toutefois pas encore de base permanente à cette date.
Un réacteur résilient, solide, fiable et surtout petit
Compte tenu de l’extrême niveau d’ingénierie nécessaire pour construire une centrale nucléaire, même de petit gabarit, il sera indispensable de la fabriquer sur Terre puis de la livrer sur place. Cela veut dire qu’il faudra qu’elle soit assez compacte pour rentrer dans une fusée, mais aussi suffisamment robuste pour supporter un tel voyage et résister au rayonnement cosmique qui pourrait l’endommager.
Il faut aussi que ce réacteur nucléaire puisse encaisser les importantes variations de température qui peuvent survenir à la surface. Selon le moment de la journée et le lieu, les écarts vont de 127°C à l’équateur jusqu’à −173 °C à l’ombre. Son emplacement devra de fait être considéré avec soin. Dans tous les cas, il faudra assurer le refroidissement de l’installation, notamment le jour.
Comme l’indique le communiqué du laboratoire, le réacteur doit reprendre le principe de la fission nucléaire, qui est l’approche la mieux maîtrisée aujourd’hui. Le principe consiste à fracturer le noyau de certains atomes (comme l’uranium ou le plutonium) avec un neutron. À sa désintégration, le noyau libère alors une importante quantité d’énergie, qu’il s’agit de récupérer pour l’exploiter.
« La mise en place d’un système fiable à haute puissance sur la Lune est une prochaine étape essentielle de l’exploration spatiale humaine, et sa réalisation est à notre portée », commente Sebastian Corbisiero, le responsable de ce projet au sein du laboratoire. Jim Reuter, administrateur associé à la Nasa, abonde : « Une énergie abondante sera la clé de l’exploration spatiale future ».
Le succès du développement d’un mini-réacteur nucléaire capable de fonctionner sur la Lune ouvrirait de formidables perspectives pour la suite de l’exploration dans le Système solaire, à commencer par la conquête de Mars. D’ailleurs, cela fait plusieurs années que l’idée du nucléaire trotte dans la tête de la Nasa. Un prototype, appelé Kilopower, était par exemple déjà évoqué en 2018.
Ce prototype (Kilopower Reactor Using Stirling Technology — ou KRUSTY), à l’époque, était décrit par l’agence spatiale comme étant capable de fournir jusqu’à 10 kilowatts d’énergie électrique — assez pour alimenter plusieurs foyers standards – de façon continue pendant au moins 10 ans. Avec quatre de ces unités, ce serait suffisant pour fournir assez d’énergie pour établir un avant-poste.
Qui dit nucléaire dit gestion des déchets et de la radioactivité, pour ne pas mettre en péril celles et ceux qui se trouveront dans cet avant-poste. Ce ne sont pas les seuls sujets à résoudre : il faudra aussi prévoir de la redondance et des systèmes de secours, en cas de défaillance. La question du stockage de l’énergie se posera aussi — mais avant tout pour l’énergie solaire.
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