Nous vivons toutes et tous dans une bulle. Littéralement. C’est en tout cas la conclusion d’une étude parue dans Nature le 12 janvier 2022, qui s’intéresse aux origines de la Voie lactée. Les auteurs ont reconstruit l’histoire de la formation des étoiles autour de la Terre pour découvrir que les astres ne sont pas là où ils sont par hasard, mais à la suite d’une série d’événements qui ont mené à la création d’une structure surnommée la Bulle Locale.
« Nous avons retracé les positions et les mouvements des jeunes étoiles proches de la Terre sur un millénaire, raconte à Numerama la principale autrice Catherine Zucker. C’est là que nous avons découvert une origine commune pour toutes ces étoiles liée aux supernovae. »
L’astronome du Space Telescope Science Institute à Baltimore a mené des simulations 3D pour remonter dans le temps et savoir comment les étoiles se sont formées. Il a tout d’abord fallu répertorier les différents clusters connus, ce qui a été rendu possible grâce au catalogue d’étoiles de Gaïa. Le satellite de l’Agence Spatiale Européenne lancé en 2013 ambitionne de cartographier précisément la Voie lactée et a publié le dernier volume de son catalogue en décembre 2020 (une nouvelle version doit arriver d’ici les prochains mois). Riches de toutes ces données, les scientifiques ont pu les rentrer dans un logiciel pour créer une carte 3D détaillée du mouvement de toutes ces étoiles.
Une réaction en chaîne depuis le Big Bang
Ils ont alors remarqué que les supernovae, ces explosions d’étoiles massives, s’étaient produites en chaîne depuis les débuts de l’Univers, peu après le Big Bang, et ont ensuite provoqué une onde de choc qui a balayé les nuages interstellaires de gaz et de poussières. Cette matière s’est alors retrouvée figée comme une fine couche plus ou moins sphérique évoquant une bulle. La théorie était présente depuis des décennies chez les astrophysiciens, mais c’est la première fois qu’elle est prouvée avec autant de certitude.
Catherine Zucker poursuit : « La surface de cette bulle est une position idéale pour la formation des étoiles : c’est une carapace dense, avec de nombreux nuages moléculaires, et c’est là que peuvent naître les étoiles comme notre Soleil. »
En plus, l’étude montre que cette Bulle Locale, d’environ 500 années-lumières de rayon, ne serait pas unique, mais posséderait de nombreux équivalents partout dans la Voie lactée et au-delà. Des bulles à la surface desquelles des étoiles pourraient se multiplier. Dans le communiqué qui accompagne le papier, un des auteurs compare l’Univers à un emmental avec des trous ! Chaque trou correspond à une bulle et c’est juste autour que les étoiles prolifèrent.
Mais ce terreau idéal ne s’est pas formé en un jour. Il a fallu une quinzaine de supernovae pour créer notre Bulle Locale. « Nous pensons qu’il y a eu une supernova par million d’années environ, détaille Catherine Zucker. Chacune a nourri l’expansion de la Bulle Locale, et nous avons identifié certains clusters qui se trouvent sur le lieu des explosions. » Ces « pouponnières d’étoiles » sont bien connues aujourd’hui et ont aidé les auteurs à retracer l’expansion de la Bulle. Ce sont des sous-groupes d’étoiles baptisés le Haut-Centaure-Loup ou le Bas-Centaure-Croix et où toutes les étoiles ont à peu près le même âge.
Et au milieu, le Soleil
Les débuts de la création de cette Bulle Locale ont beau être très anciens, la structure, elle, continue d’évoluer. Les simulations montrent que les dernières supernovae de grande envergure ont eu lieu il y a tout juste quelques millions d’années, et que le choc se fait encore sentir aujourd’hui. Même si nous sommes loin du bouquet final du feu d’artifice, la Bulle continue de s’étendre à une vitesse d’environ 6,5 kilomètres par seconde.
Et le Soleil dans tout ça ? Lui aussi serait donc à la surface de la Bulle Locale comme les autres étoiles du voisinage ? Et bien non, il est pile au centre. Une place qu’il n’aurait obtenu que par chance, lors de sa naissance et de son « voyage » à travers la galaxie. Mais ce hasard apparent reste riche d’enseignements selon Catherine Zucker : « Cela nous prouve que notre Bulle interagit avec les autres autour. C’est quelque chose que nous soupçonnions déjà et que nous allons creuser en essayant d’en savoir plus sur les autres structures similaires alentour. » Le fait que notre Soleil se trouve au centre de la Bulle tend à prouver que ces structures sont abondantes dans notre Voie lactée.
« Il reste de nombreux défis au moment où nous identifierons les autres structures, reconnaît Catherine Zucker, notamment autour de l’âge de ces bulles, difficile à déterminer. » Des informations qui seront encore plus difficiles à récolter au moment de s’intéresser à des amas d’étoiles plus lointains et moins facilement observables. Mais les auteurs comptent beaucoup sur les prochaines révélations de Gaia. La version complète du catalogue de 2020 doit arriver bientôt et elle fournira les déplacements de 30 millions d’étoiles, ce qui serait un plus non négligeable pour connaître plus en détail les origines de notre galaxie.
+ rapide, + pratique, + exclusif
Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l'I.A, contenus exclusifs et plus encore.
Découvrez les nombreux avantages de Numerama+.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Vous voulez tout savoir sur la mobilité de demain, des voitures électriques aux VAE ? Abonnez-vous dès maintenant à notre newsletter Watt Else !