Notre époque pourrait être définie par des archéologues du futur comme l’« ère du plastique ». La pollution au plastique ne se traduit pas seulement par des déchets dans les océans, dont on a l’habitude de voir les images. Il y a une contamination invisible : les microplastiques, qui prennent la forme de petites particules, peuvent s’infiltrer dans davantage de strates des écosystèmes. Ils pourraient constituer un risque pour la santé des êtres vivants, comme le montrent de premiers travaux.
Jusqu’où, précisément, peut-elle s’infiltrer ? Publiée fin mars 2022, une étude démontre pour la première fois la présence de microplastique dans du sang humain. À l’aide d’un panel de 22 personnes, les auteurs ont identifié des microplastiques dans 17 échantillons.
L’équipe de recherche s’est évidemment assurée que les échantillons n’avaient pas été contaminés par ailleurs, et a combiné deux méthodes différentes d’identification des particules de plastique, en identifiant la composition chimique ainsi que la masse des particules. Ce sont des techniques qui permettent de mesurer des particules jusqu’à 0,0007 mm — soit 700 nanomètres.
Quels plastiques ont été retrouvés dans le sang ?
En moyenne, les chercheurs ont relevé un taux de 1,6 microgramme de matière plastique pour chaque millilitre de sang dans les échantillons concernés. La concentration la plus élevée dans un échantillon atteint 7 microgrammes.
Deux types de plastiques ont été relevés dans le sang :
- Du polyéthylène téréphtalate (PET), qui est couramment utilisé dans les vêtements et dans les bouteilles ;
- Des polymères de styrène, que l’on trouve dans les pièces de véhicules, les tapis et les récipients alimentaires.
C’est la première étude à identifier des particules de plastique dans le sang humain. Il est « raisonnable de s’inquiéter » face à ce qui est un « résultat révolutionnaire », selon l’écotoxicologue Dick Vethaak, l’un des auteurs de l’étude, qui s’exprime dans The Guardian. Mais comme il le précise lui-même, cela signifie également que ce n’est que le début des recherches sur le sujet. « Nous devons étendre la recherche et augmenter la taille des échantillons, le nombre de polymères évalués. »
Une certain nombre de questions de santé doivent être adressées à partir de cette découverte. En premier lieu, il s’agit de comprendre quelle réaction a lieu dans notre corps au contact de ces microparticules. « Les particules sont-elles retenues dans le corps ? Sont-elles transportées vers certains organes, en passant par exemple la barrière hémato-encéphalique ? Et ces niveaux sont-ils suffisamment élevés pour déclencher une maladie ? », questionne Dick Vethaak, qui appelle au déblocage de financements pour faire avancer cette recherche.
Le nombre d’études montrant notre contact accru avec les microplastiques s’accumulent. En 2019, des travaux relevaient leur présence dans littéralement chaque fruit de mer étudié. En 2020, une étude apportait des preuves que les microplastiques peuvent traverser le placenta, et donc s’y retrouver. Cette même étude n’avait toutefois pas constaté de lien avec la santé. Il est probable que l’enjeu médical soit la dose. Or, comme la pollution plastique risque de tripler d’ici 2040, il s’agit ben d’un enjeu de santé publique, alors même qu’ils sont le résultat… de nos propres activités. Par exemple, on sait qu’une grande partie des microplastiques qui s’accumulent en Antarctique proviennent de nos vêtements.
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