Les constructeurs de voitures électriques mettent fréquemment en avant la puissance de charge rapide de leurs véhicules, en oubliant parfois de préciser que la puissance maximale n’est pas toujours ce qui est le plus important. Sur la plupart des voitures branchées, le pic de puissance est très bref et ne reflète pas la réalité d’une session de charge rapide.
Ainsi, le plus souvent, l’allure globale de la courbe de recharge est tout sauf plate, présentant une vision moins valorisante de certaines voitures qui promettent de battre des records de charge. Si vous vous sentez un peu perdu face à toutes ces notions, n’ayez crainte : éclaircissons ce concept tout de suite, et la courbe de recharge n’aura plus de secrets pour vous.
Une courbe de recharge, c’est quoi ?
La courbe de recharge correspond à l’évolution de la puissance que peut recevoir la batterie au cours du temps.
La puissance de charge maximale est-elle une information si importante ?
La communication des constructeurs de véhicules électriques est souvent axée sur deux aspects lorsque l’on parle de charge rapide : la puissance maximale et le temps nécessaire pour atteindre un certain niveau de batterie. On peut, par exemple, lire sur le site de Hyundai que la Ioniq 6 passe de 10 à 80 % en 18 minutes, ou sur celui de Tesla que les voitures acceptent 250 kW de puissance de charge maximale.
Cependant, deux voitures ayant une puissance de recharge maximale égale ne sont pas toujours aussi performantes lorsqu’il s’agit de remplir leur batterie le plus vite possible. La puissance moyenne est bien ce qui fait foi dans cet exercice, et non pas la puissance maximale. Les personnes qui mettent un pied dans la mobilité électrique peinent parfois à appréhender cette idée, mais plus une batterie de voiture électrique est remplie, moins elle acceptera de charger vite.
On pourrait faire une analogie simpliste avec le remplissage d’un réservoir d’essence sur une voiture thermique : lorsque le réservoir est vide, on peut envoyer de l’essence au débit maximal de la pompe. Au fur et à mesure de son remplissage, si on ne veut pas déborder, mais tout de même remplir au maximum, il faut commencer à doser la poignée de la pompe.
Sur une voiture électrique qui charge en courant continu, c’est le même constat, en plus marqué. Pour la plupart des véhicules électriques, la puissance maximale pourra être atteinte lorsque la batterie est chargée à moins de 30 %, après quoi la puissance va décliner petit à petit. On retrouve ainsi souvent des commentaires de nouveaux propriétaires qui s’étonnent ne jamais voir, ou presque jamais, la puissance promise par le concessionnaire ou par la brochure de leur véhicule. Voyons pourquoi.
Une batterie qui doit être chouchoutée
Le système de gestion de la batterie d’une voiture électrique a pour mission de protéger le pack de batterie, en plus d’en tirer les meilleures performances possibles. Pour cela, il est impératif de mettre en place de nombreuses sécurités pour ne pas endommager la batterie de manière permanente.
À titre d’exemple, les batteries de voitures électriques n’aimant pas être trop froides, il vous sera impossible d’atteindre les puissances théoriques maximales si le pack de batterie n’est pas à sa température idéale. Après une nuit dans le froid de l’hiver, certaines voitures électriques vont jusqu’à refuser de charger lorsqu’elles sont branchées : à la place, toute l’énergie est consommée pour alimenter le circuit de chauffage de la batterie, et lorsqu’elle atteint une température suffisante, la charge peut démarrer.
De nombreuses voitures électriques proposent donc de pré-conditionner la batterie avant une charge rapide (soit automatiquement lorsque la destination est un chargeur rapide, soit sur demande), afin de s’assurer de bonnes performances de charge. Cependant, ce n’est pas toujours suffisant, puisqu’il faut également que la batterie ne soit pas trop remplie, comme nous l’avons rappelé plus haut.
C’est pourquoi, pour obtenir les meilleures performances en charge rapide, il est conseillé de rester dans une plage située entre 10 et 80 %. Au-delà de 80 %, pour la quasi-totalité des véhicules branchés, la puissance de charge chute tellement qu’il n’est pas intéressant de continuer à charger. Mieux vaut si possible tailler la route, quitte à s’arrêter quelques minutes un peu plus loin sur le voyage, plutôt que de rester 30 minutes ou plus pour atteindre 100 %.
Maintenant que vous savez qu’il faut une batterie à température idéale et à un niveau de charge assez bas, il est temps de s’attaquer à la pièce de résistance : la courbe de recharge.
La courbe de recharge idéale existe-t-elle ?
Lorsque toutes les conditions sont réunies pour que la batterie soit dans les meilleures dispositions, la limite de puissance de charge peut tout de même être définie par la voiture. On entend par là que si vous chargez sur une borne qui promet 350 kW, ça ne veut pas dire que votre voiture va les accepter.
En l’occurrence, il n’y a pour ainsi dire à ce jour aucune voiture qui peut tirer parti des bornes de recharge les plus puissantes installées sur le territoire, et c’est plutôt une bonne chose. En effet, cela signifie que ces bornes seront toujours bonnes à utiliser dans quelques années, quand les voitures pourront pleinement en profiter.
En attendant ces éventuels futurs progrès dans le développement de technologies novatrices de batterie, les bornes d’aujourd’hui peuvent globalement dépasser la puissance acceptée par la voiture. La voiture va donc communiquer avec la borne de recharge pour que la puissance envoyée corresponde à ce que la batterie peut absorbe. Comme vous pouvez le constater sur les exemples ci-dessous, l’allure est souvent similaire entre toutes les voitures.
On retrouve un pic de puissance lorsque la batterie est peu chargée, et progressivement, la puissance baisse au fur et à mesure du remplissage de la batterie. Le site du support Fastned regorge d’exemples mis à disposition. Des rapports fournis à Numerama par Teslamate portent sur plus d’une centaine de charges en courant continu. Ils sont regroupés en un graphique ci-dessous.
La moyenne est symbolisée par les ronds au diamètre plus important. On constate ainsi qu’après un plateau à 175 kW, la puissance décroît progressivement à partir de 15 % de batterie, jusqu’à 100 %. Tous les points visibles sur le graphique représentent une puissance de charge atteinte à un certain niveau de batterie, montrant bien que toutes les sessions de charge ne sont pas identiques.
Pour l’exemple ci-dessous, on notera que parfois, des charges débutant à un haut niveau de batterie (plus de 50 %) permettent d’atteindre une puissance plus élevée que celle que l’on aurait eu si la session avait débuté avec un niveau plus bas. C’est là une particularité des batteries LFP (lithium – fer – phosphate) qui permettent de bénéficier d’un pic de charge à haute puissance, même en ayant encore beaucoup de batterie restante. Il faut cependant revenir à la réalité : ce pic est de très courte durée.
Les constructeurs peuvent parfois améliorer les performances de recharge lors de mises à jour à distance, mais les lois de la physique restent ce qu’elles sont. Il ne faut pas s’attendre à pouvoir charger 2 ou 3 fois plus vite une voiture au fur et à mesure des évolutions, malheureusement.
Vers une meilleure manière de mesurer la charge ?
Comme vous avez pu le constater à l’aide des exemples de courbes de recharge présents plus haut, la puissance maximale atteinte n’est pas forcément une information très utile lorsque l’on parle de charge de voiture électrique. Il est important de mettre en face non seulement la puissance moyenne d’une session de charge, mais aussi la consommation du véhicule en question.
Comme on l’a déjà précisé, certaines voitures ont de plus grosses batteries, mais ne parviennent pas à exceller dans l’exercice des grands trajets. C’est parce que leur puissance de recharge, aussi haute soit-elle, ne permet pas de récupérer des kilomètres utiles plus rapidement qu’une voiture qui consommerait moins.
Les standards actuels de mesure (EPA ou WLTP notamment) avec les puissances maximales affichées par les constructeurs ne permettent pas d’appréhender correctement la réalité de la charge rapide. Les constructeurs préfèrent toujours afficher une mesure qui les met en valeur. C’est pourquoi il faut s’attendre à continuer à voir des annonces de voitures qui chargent à « une puissance pouvant aller jusqu’à 350 kW » dans le futur, même si le 10 – 90 % peine à atteindre 130 kW de moyenne.
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