Alors que le vote sur les brevets logiciels en Europe doit avoir lieu, une nouvelle dérive apparaît déjà par le biais de la société E-data. Celle-ci aurait en effet déposé des brevets sur les téléchargements payants concernant des supports autres que les disques durs. Les distributeurs de musique sont visés en première ligne, et E-data a décidé de les poursuivre.

Depuis plusieurs semaines, les brevets logiciels sont à l’honneur de l’actualité informatique, entre autre à cause du flou entourant l’applicabilité d’un brevet, son éventuelle rétro-activité et bien d’autres choses difficiles à voir appliquées aux logiciels.

E-data a déposé des brevets en 1985 aux USA concernant des téléchargements payants sur des supports autres que les disques durs. Si effectivement en 1985 il était difficile concevoir ce genre de transactions, les évolutions actuelles de l’informatique ont prouvé à de nombreuses reprises que tout est faisable dans ce domaine. Aujourd’hui beaucoup de prestataires de services proposent des téléchargements spécifiques à leur domaine. Les services de musique en ligne permettent par exemple de transférer un morceau sur un lecteur MP3 de manière totalement transparente à l’utilisateur, d’autres services proposent l’impression de billets de concerts et spectacles, toutes sortes de téléchargement qui serraient soumis à ce brevet.

Brevetabilité sans frontière

Ainsi E-Data a décidé d’assigner en justice OD2, HMV, et Satellite Newspapers. Le premier est un prestataire de service de musique en ligne bien connu en Europe , le second un distributeur de musique conventionnel, et le dernier un service hollandais de téléchargement et impression de journaux dans des kiosques spécialisés.

Tordons toutefois le cou à quelques idées reçues. Ces attaques en justice portent sur le fait que ces sociétés vendent également sur le territoire américain où s’applique le brevet, elles ne visent pas à interdire OD2, HMV ou Satellite Newspapers de faire la même chose en Europe (puisque E-data n’a pas de brevet européen en la matière). Rappelons aussi qu’un brevet ne peut pas protéger l’idée de vendre par Internet, mais simplement les moyens techniques mis en œuvre pour y parvenir. Et ces moyens techniques ne peuvent être protégés que s’ils ne pouvaient pas déjà être connus par les informaticiens. Le champ d’application du brevet sur un logiciel est donc beaucoup plus limité qu’on ne le pense, mais reste dangereux dans son principe.

La société New-yorkaise E-Data n’en est pas à son premier assaut, mais ce qui pour l’instant ne concernait que les États-Unis risque de se répandre, et pourrait radicalement changer la vision d’Internet tel qu’on le connaît aujourd’hui. Puisque les frontières n’existent pas réellement sur Internet, le brevet sur un logiciel accordé dans un pays peut potentiellement couvrir l’ensemble des autres pays du monde. Plutôt que de suivre les américains sur ce terrain, il pourrait être bien plus bénéfique de penser à un autre type de protection plus adapté au monde numérique…

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