La directive en cause irait bien au delà de ce qu’impose la législation européenne actuelle, et même au delà du très contesté DMCA (Digital Millennium Copyright Act) américain. Elle ferait de la violation des droits de propriété intellectuelle (droits d’auteur, brevets, marques de commerce…) une infraction criminelle passible de peines d’emprisonnement. Selon certains avocats qui ont pu étudier un avant-projet de la directive, un adolescent pourrait être envoyé en prison pour avoir téléchargé un morceau de musique illégalement, et les fournisseurs du service eux-même seraient soumis aux mêmes peines, qu’ils aient ou non su que l’adolescent se servait du logiciel à des fins illégales.
Au sein même de l’industrie, les critiques commencent à se faire entendre. Nokia et Microsoft craignent par exemple que la directive ne freine la recherche, puisque les conséquences de voir l’une de leurs innovations technologiques qualifiée de contrefaçon deviennent bien trop lourdes. Pour les particuliers, la directive était passée relativement inaperçue puisque le projet original limitait les charges criminelles aux seules infractions commises « à des fins commerciales ». Mais cette condition a été rayée par Janelly Fourtou, qui considère qu’elle rendait le champ d’application de la directive trop étroit, et insiste sur le fait que « même si vous ne téléchargez pas de musique pour faire du profit, vous avez quand même un effet très négatif sur les auteurs et les musiciens. Même un jeune enfant qui fait ça innocemment provoque un contrecoup économique« .
Mais qui est donc cette Janelly Fourtou, si dure avec les utilisateurs de P2P ? Officiellement, il s’agit d’une parlementaire française au Parlement européen en charge de diriger le débat sur les changements à apporter aux lois sur la propriété intellectuelle. En coulisse, il s’agit également de la femme de Jean-René Fourtou, le président de Vivendi Universal, qui dirige l’une des plus grandes maisons de disque au monde. Comment dès lors peut-on être assuré de la sincère neutralité de la directive, dont les travaux sont dirigés par la femme d’un des leaders du lobby de l’industrie musicale ? Par respect pour son travail et surtout pour l’Europe, Mme Fourtou eu sans doute mieux fait de se décharger de cette mission, mais tout le monde comprendra pourquoi ça n’est pas (encore ?) le cas.
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