Le réalisateur et producteur Luc Besson ne supporte pas le piratage, mais il ne se contente pas de dire aux responsables politiques que l’on « a l’impression d’être les indiens et de se faire décimer » par les cow-boys de pirates. Il a conscience que la réponse viendra aussi et avant tout d’un renouvellement de l’offre. Interrogé par Les Echos, le directeur du groupe EuropaCorp se prononce « pour l’éclatement de la chronologie des médias« . « Cela fait des années que j’essaie de convaincre le cinéma français qu’il ne faut pas aller contre l’évolution des pratiques du consommateur : il faut proposer les films sur Internet juste après la sortie en salle« , précise-t-il.
« Pour ma part, je serais favorable à la création d’une offre premium sur Internet de quarante-huit heures, le samedi et le dimanche qui suivent la sortie du film en salle. Cette offre pourrait être commercialisée à un prix de 25 à 35 euros. Quinze jours plus tard, la même offre serait de nouveau proposée mais un peu moins chère autour de 22 euros, et ainsi de suite. Au bout d’un certain temps, le film ne serait plus disponible sur Internet. Mais il rejoindrait ultérieurement un catalogue de 500 à 1.000 longs-métrages accessibles via un abonnement.«
Seulement les exploitants ne sont pas prêts à jouer le jeu. Ils ont refusé de faire l’essai sur un film produit par EuropaCorp, et rejettent toute évolution de la chronologie des médias qui assure aux salles de cinéma une exclusivité d’au moins six mois sur la diffusion des films… si l’on excepte le marché gris du piratage.
Pour Luc Besson, la situation actuelle « n’est pas tenable« . « Aujourd’hui, les jeunes ont le choix entre voir un film dans une salle de cinéma pour 7 euros et rester chez eux où ils peuvent le visionner gratuitement avec le téléchargement illégal« , constate-t-il. En réalité, le prix (hors formule d’abonnement) d’une séance de cinéma est même plus près de 10 euros que de 7 euros dans les grandes agglomérations. Et le prix est à multiplier par le nombre de membres de la famille qui vont au cinéma voire un même film.
« A partir du moment où il y a une loi stricte – la loi création et Internet – qui condamne et punit les auteurs de délits, il est normal que le cinéma propose au public une offre légale« , poursuit Luc Besson, qui reste dans une logique de répression préalable à toute innovation de l’offre.
A l’occasion des très discrètes Assises de la Création, le réalisateur-producteur avait prévenu qu’il faudrait « un délai de un à deux ans » avant de pouvoir changer la chronologie des médias en France.
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