Difficile de passer à côté du rachat de Twitter par Elon Musk. La saga a commencé début 2022, puis fut riche en rebondissements jusqu’à ce que, finalement, l’entrepreneur débarque avec un évier dans les locaux du réseau social et licencie une bonne partie de ses dirigeants. C’est officiel : Elon Musk possède Twitter.
Ce rachat n’est pas qu’une actualité économique, ni qu’une modification de l’écosystème numérique : il revêt un caractère politique. La première décision publique annoncée par Elon Musk le démontre : le « blue check » de certification deviendrait payant, intégré à la formule Twitter Blue, avec de nombreux outils pour accroître la visibilité. Ce serait une vraie métamorphose de ce réseau.
Officiellement, il s’agit d’une source de rémunération pour la plateforme — que l’entrepreneur a rachetée pour un montant bien trop élevé. Mais l’un de ses derniers tweets rappelle que ce choix n’est pas neutre : « Le pouvoir au peuple ! Blue pour 8$/mois », écrit-il. La démocratie… moyennant paiement ?
La liberté d’Elon Musk concerne ceux qui en ont les moyens
Elon Musk est souvent présenté dans les médias comme un personnage glamour, fascinant, voire héroïque. Décrit tantôt comme un people pour ses frasques, tantôt comme un entrepreneur de génie pour ses sociétés à succès (SpaceX, Tesla…), l’homme est presque devenu un mythe vivant. Il y a pourtant une réalité économique et politique derrière les paillettes : Elon Musk porte en lui une idéologie — celle du transhumanisme. Volonté d’« amélioration » du corps, crainte des IA et croyance en une Singularité technologique où ces IA nous dépasseraient, quête pour tuer la mort : les transhumanistes ont installé résidence à la Sillicon Valley (littéralement parlant, avec la Singularity University).
Ce mouvement est parfois perçu, à tort, comme une simple démarche scientifique et technologique. Il s’agit plutôt d’une idéologie posée sur les technosciences — un système d’idées qui utilisent ces outils pour accomplir une vision du monde. Il existe plusieurs transhumanismes, car différentes idéologies y sont associées. Le transhumanisme californien d’Elon Musk repose en grande partie sur la philosophie politique du libertarianisme.
L’idéal, dans cette approche, est un libre marché total, sans la moindre entrave (même étatique). Aux États-Unis, le libertarianisme est majoritairement capitaliste — accumulation individuelle et droit de propriété comme définitions d’une liberté réelle. Ce transhumanisme-là est donc celui d’une liberté individualiste, capitaliste, d’augmentation de sa condition corporelle et sociale, dans un libre marché compétitif. Pour Elon Musk et les autres idéologues du mouvement, les technosciences sont un moyen d’accomplir cette perception du monde.
Son tweet affirmant que le « pouvoir au peuple » s’acquière financièrement n’est donc pas une provocation, ni une blague, ni une erreur de communication : il s’agit tout bonnement de son idéal politique.
Il serait faux de croire que l’ancien Twitter n’infusait pas déjà un système politique. Mais il est crucial de garder à l’esprit que, dans le cas d’Elon Musk, la très forte médiatisation du rachat par ce personnage si mythique peut facilement brouiller le sens de ses choix. De même pour l’impact sociopolitique qu’ils ont : en l’occurrence, l’influence sur l’un des plus gros réseaux sociaux du monde va devenir monnayable — réservée à celles et ceux qui ont les moyens de payer et un besoin d’influer.
Étant donné la place de Twitter aujourd’hui dans le débat public, en cas d’élections notamment, cette direction peut avoir un impact bien au-delà de l’espace numérique : notre perception de la réalité vendue au plus offrant ?
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