Un iPad Pro, un smartphone Android, un téléviseur connecté ou un casque de réalité virtuelle… Shadow, le service français de cloud-gaming, s’est bien amélioré. Quand il fonctionne correctement (ce qui n’est pas toujours le cas), difficile de ne pas succomber à ses charmes.

Stadia meurt, Shadow renaît de ses cendres. Sauvé par OVH en 2021 après avoir été placé en redressement judiciaire, le service français de jeu en streaming (cloud gaming) a revu sa stratégie dernièrement. En plus de s’adresser aux professionnels, avec notamment un service de cloud souverain, Shadow veut prouver aux joueurs qu’il peut être une alternative sérieuse aux consoles et aux PC.

Pour y parvenir, Shadow a lancé le 26 octobre 2022 une option « Power » à 14,99 euros par mois (en plus des 29,99 euros par mois pour accéder au service) pour obtenir une machine virtuelle plus puissante (AMD Epic 7543P, NVIDIA GeForce RTX 3070, 16 Go de RAM). L’idée derrière Shadow reste la même, à savoir proposer à ses abonnés un PC accessible depuis n’importe quel appareil, pour jouer ou utiliser des applications Windows. Le tout est néanmoins plus simple, le petit boîtier Shadow a disparu et les anciennes offres n’existent plus. Shadow se résume désormais à une application et à un abonnement.

Début octobre, Shadow a proposé à Numerama de tester la nouvelle version de son service en avant-première. Habitués à feu Stadia, nous avons accepté afin de voir si le service français pouvait être une alternative crédible à celui que Google n’a pas su faire évoluer. L’objectif de cet article n’est pas de juger l’option Power, mais de voir ce que Stadia vaut en 2022 pour des parties occasionnelles, à la maison ou en vacances.

L’iPad Pro est une super console, qui l’eut cru ?

Premier constat, Shadow est disponible sur un très grand nombre de plateformes. Là où Apple ferme la porte à Google Stadia ou au Microsoft Game Pass (qu’il considère, à tort, comme des concurrents de l’App Store), l’entreprise californienne se sent moins menacée par Shadow. Est-ce parce qu’il s’agit seulement d’un « petit service français » ? Officiellement, c’est surtout car Shadow n’est pas un service de jeux vidéo à la demande à proprement parler. Comme Shadow émule un PC Windows, avec un bureau et des icônes, alors il n’enfreint pas les règles de l’App Store (l’accès à un PC virtuel ou à distance n’est pas interdit). C’est malin, et cela permet à Shadow d’être disponible partout.

Un iPad sous Windows ? Non, vous ne rêvez pas. // Source : Numerama
Un iPad sous Windows ? Non, vous ne rêvez pas. // Source : Numerama

Grâce à ce subterfuge, la quasi-totalité des appareils connectés d’un foyer supportent Shadow (il y a des exceptions, comme les téléviseurs sous webOS ou Tizen, par exemple). Le service de cloud-gaming est disponible sur iOS, iPadOS, macOS, tvOS (l’Apple TV donc !), Android, Android TV (un Chromecast, une Nvidia Shield, une Freebox Pop…), Windows et l’Oculus Store, le magasin d’applications de réalité virtuelle de Meta.

Aucun autre service de jeu en streaming offre une aussi grande diversité, ce qui permet vraiment de casser les frontières du jeu vidéo. On peut commencer un jeu sur son Apple TV, mettre la manette dans son sac et le continuer ailleurs, sur sa tablette ou son ordinateur. On retrouve à chaque fois le même PC, puisque Shadow privatise réellement une partition à chacun de ses utilisateurs (contrairement à Stadia ou le Game Pass, qui font tourner un jeu sur un serveur différent à chaque fois). Finalement, il ne manque les PlayStation et les Xbox, mais on doute que Sony et Microsoft ouvrent la porte à un « concurrent ».

C’est surtout sur un iPad Pro (12,9 pouces, puce M2) que Numerama a testé Shadow. Avec son écran mini-LED géant, sa super autonomie, ses haut-parleurs de très grande qualité et sa compatibilité 5G, cet appareil est quasiment parfait pour le jeu mobile. Malheureusement, le catalogue de jeux disponibles sur l’App Store (et Apple Arcade) est désastreux. La puce M2 a beau être meilleure que celle de nombreuses consoles, Apple n’a jamais su convaincre les éditeurs de le suivre (c’est aussi vrai sur Mac). L’iPad n’a jamais été considéré comme une bonne machine de jeu, et c’est dommage.

Sur iPad, Fall Guys ne s’affiche pas en plein écran mais fonctionne parfaitement bien.  // Source : Numerama
Sur iPad, Fall Guys ne s’affiche pas en plein écran, mais fonctionne parfaitement bien. // Source : Numerama

Grâce à Shadow, on a découvert le potentiel immense de l’iPad Pro. Jouer à FIFA 23, Fall Guys, Rocket League, Forza, Flight Simulator ou même des émulateurs devient possible sur la tablette d’Apple, qui est un délice pour les yeux grâce à son écran (la Switch, avec ses graphismes et son écran 720p, peut aller se recoucher). On a presque l’impression qu’ils tournent nativement… sauf quand Shadow ne fonctionne pas (on en parlera dans quelques instants). Petit bonus : l’iPad et Shadow rendent Windows tactile.

Quand a-t-on préféré jouer sur iPad plutôt que sur PS5 ? Pour jouer chez une personne qui ne possède pas de console, pour jouer dans le lit le dimanche matin, pour jouer en vacances, pour s’occuper dans une salle d’attente… Shadow, comme Stadia, permet de jouer de manière beaucoup plus souple à de vrais titres, et non pas à des jeux mobiles. Autre exemple amusant, Shadow permet de se débarrasser de l’écran scindé quand on joue à deux. À la maison, on peut imaginer que votre invité joue sur la console, pendant que vous jouez avec lui sur Shadow.

FIFA 23, lui, supporte la définition d’écran de l’iPad. Par contre, sans très bonne connexion, il lui arrive de bugger. La qualité 4K est au rendez-vous. // Source : Numerama
FIFA 23, lui, supporte la définition d’écran de l’iPad. Par contre, sans très bonne connexion, il lui arrive de bugger. La qualité 4K est au rendez-vous. // Source : Numerama

Il n’y a pas que sur iPad que Numerama a expérimenté Shadow. Il nous est arrivé d’utiliser l’application Apple TV (en connectant une manette en Bluetooth), de brancher notre ordinateur à un téléviseur non connecté. On a aussi essayé rapidement de lancer une partie sur smartphone (ce qui est le moins convaincant, les jeux mobiles restent mieux adaptés aux petits écrans). Seul périphérique sur lequel nous n’avons jamais réussi à faire marcher Shadow : un téléviseur TCL milieu de gamme sous Android TV. Quand la machine virtuelle démarre, l’écran reste noir. C’est dommage.

Sur Apple TV, le pavé tactile de la télécommande permet de déplacer la souris. // Source : Numerama
Sur Apple TV, le pavé tactile de la télécommande permet de déplacer la souris. // Source : Numerama

Les bugs, le point faible de Shadow

Quand Shadow fonctionne, c’est trop bien. Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas.

Comme tout service de cloud gaming, Shadow est victime de plusieurs mystères. Parfois, une configuration qui fonctionnait parfaitement pendant plusieurs heures se met soudainement à ne plus marcher du tout. Ce, alors que l’appareil est le même, que la connexion réseau est la même et que rien ne devrait empêcher le bon fonctionnement de la machine virtuelle. Quand cela arrive, il est impossible de s’en sortir.

On a tout essayé : redémarrer l’appareil, redémarrer Windows, redémarrer sa box… Quand Shadow refuse que vous jouiez dans des conditions décentes, c’est que vous ne pourrez pas jouer. Le jeu en streaming est parfois génial, parfois frustrant. L’utilisateur n’est pas réellement maître de ce qu’il fait, et c’est forcément un point à considérer avant de s’abonner. Heureusement, plus de 9 fois sur 10, tout a fonctionné comme prévu (occasionnellement, avec quelques petits lags, mais rien de bien choquant). À noter, d’ailleurs, qu’il n’y a pas besoin d’une excellente connexion, un bon réseau ADSL peut suffire.

Les réglages de Shadow sur iPadOS. L’émulation Windows peut fonctionner sous la forme d’une fenêtre, pour utiliser les deux OS en même temps. // Source : Capture Numerama
Les réglages de Shadow sur iPadOS. L’émulation Windows peut fonctionner sous la forme d’une fenêtre, pour utiliser les deux OS en même temps. // Source : Capture Numerama

Toutefois, on ne peut s’empêcher de penser qu’il y a beaucoup de choses sur lesquelles Shadow devrait s’améliorer. Par exemple, les réglages de la définition de l’écran sont souvent frustrants. Au démarrage sur iPad, Shadow occupe toute la surface. Mais, si l’on tente de changer d’appareil, alors la définition de l’iPad est conservée… et il est difficile de changer. Parfois, les icônes sont aussi immenses, sans raison.

Plus généralement, ce sont tous les réglages de Shadow qui sont complexes à comprendre. Même si l’on apprécie le fait d’avoir une multitude d’options, on préfère la formule « it just works » de Stadia. On aimerait aussi une bibliothèque de jeux pour gagner du temps, plutôt que de devoir utiliser Steam, l’Epic Games Store ou l’application Xbox pour lancer un jeu. Sur un petit écran particulièrement, l’interface de Windows pilotable à la souris est frustrante (on apprécierait lancer un jeu sans avoir à démarrer Windosws). Mais, Shadow peut-il proposer un lanceur de jeux sans se mettre Apple à dos ?

Pourquoi Shadow est supérieur à Stadia

Peut-on recommander Shadow en 2022 ? La réponse est oui, mais pas à tous. Pour le coup, il ne s’agit pas d’une question de besoins, mais de moyens. Si dépenser 29,99 euros par mois (ou plus) pour un service qui fonctionne 90 % du temps ne crée pas de trou dans votre budget et que l’idée de pouvoir jouer à de vrais jeux de partout vous séduit, alors tentez Shadow. Au pire, vous pourrez toujours résilier.

Face à Stadia, Shadow nous a plutôt convaincus. D’abord, parce qu’il propose un catalogue de jeux infiniment supérieur et moins cher (normal, c’est celui de Windows). Ensuite, car il supporte beaucoup plus d’appareils. Enfin, parce que sa gestion des manettes est meilleure. On apprécie aussi l’idée d’avoir un vrai Windows accessible de partout, pour tester des applications qui n’ont rien à voir avec le jeu vidéo, mais sont indisponibles ailleurs. Bref, on a plutôt aimé Shadow. Il n’y a plus qu’à espérer que les derniers bugs disparaissent, puisqu’un lag peut être très énervant.

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