Publiée au Journal officiel le 26 novembre 2021, la loi visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels prévoit une expérimentation sur le numéro d’urgence unique en France. Il figure à l’article 46 du texte de loi et explore plusieurs hypothèses en vue de son éventuelle généralisation.
D’où vient l’idée du numéro d’urgence unique ?
La France compte plusieurs numéros d’urgence dont les trois plus connus sont le 15 (pour le Samu), le 17 (pour la police) et le 18 (pour les pompiers). De temps à autre, la question s’est posée de réorganiser les modalités pour joindre les secours afin de simplifier le service rendu à la population, mais aussi pour mieux coordonner les différents services d’aide.
Une des optimisations régulièrement envisagées est le regroupement du 15 et du 18 en un seul numéro, compte tenu du fait que des appels adressés aux pompiers peuvent relever plutôt d’une prise en charge par le samu — c’est le cas par exemple d’une personne malade chez elle, mais dont l’affliction qui ne présente pas un caractère d’urgence.
Ce sujet du numéro d’appel unique a été relancé en 2017 par Emmanuel Macron, lors d’un discours en octobre, en observant qu’il suffit de composer le 911 aux États-Unis ou le 112 dans plusieurs États européens, qui ont fait le choix de ne garder qu’un seul numéro. C’est de ce discours que vient ladite proposition qui se trouve dans le texte de loi, mais qui a été fortement remaniée.
Quels sont les numéros d’urgence en France ?
Il existe plusieurs numéros d’urgence en France, chacun ayant un rôle précis :
- le 15 sert à joindre le Samu pour obtenir une aide médicale urgente et être transportée éventuellement dans un service de soin ;
- le 17 contacte police secours pour alerter les forces de l’ordre en cas d’infraction immédiate ;
- le 18 pour appeler les pompiers en cas d’incendie, d’accident ou de péril sur les personnes ou les biens ;
- le 112 est le numéro d’appel d’urgence européen (il marche en France et dans l’Union) ;
- le 114 est l’équivalent pour les personnes sourdes et malentendantes.
Il existe aussi des numéros d’urgence beaucoup plus spécialisés, comme le 191 (urgences aéronautiques) et le 196 (urgences en mer), le 115 (urgence sociale / Samu social), le 119 (enfance en danger), 116000 (enfants disparus), 197 (alerte attentat — alerte enlèvement) et le 116117 (permanence des soins ambulatoires).
Qu’est-il prévu pour le numéro d’urgence unique ?
Dans le cadre de la loi de 2021, il est question d’une expérimentation dans laquelle les services d’incendie et de secours et les services d’aide médicale urgente « mettent en œuvre des plateformes communes, qui peuvent être physiques ou dématérialisées ». Dans ce cadre, trois configurations au niveau des numéros sont testées :
- un numéro unique regroupant les trois services (15, 17 et 18) ;
- un numéro fusionnant le 15 et le 18, sans police secours (17) ;
- un numéro commun entre le 15 et la permanence des soins (116117) avec une interconnexion avec les autres services d’urgence.
Il s’agit donc d’évaluer les différentes options de rapprochement des plateformes d’urgence, leur interopérabilité, leur interconnexion, l’intérêt d’un plateau commun regroupant tous les services concernés, la coordination entre les différents secours et, in fine, « d’améliorer la prise en charge des personnes appelantes », qui reste l’enjeu central de ces essais.
Quelle est la durée de l’expérimentation ?
L’article de loi fixe à deux ans la durée de l’expérimentation autour du numéro unique. Durant les discussions parlementaires, celle-ci a été un temps portée à trois ans. Un bilan à mi-parcours est prévu, un an après le début de l’expérimentation, au profit des ministères de l’Intérieur et de la Santé. Un bilan final doit être remis au plus tard trois mois avant la fin du test.
Il s’agira de déterminer « la pertinence du modèle de plateforme retenu, au regard de la rapidité du décroché, de la qualité de la réponse opérationnelle et de la prise en charge des personnes appelantes ». En fonction, le gouvernement devra revenir vers le parlement et envisager la généralisation de la meilleure solution sur tout le territoire, et non pas que dans les départements tests.
Et pourquoi pas juste le 112 ?
Initialement, la proposition de loi avait l’intention d’instaurer le 112 comme numéro unique pour les appels d’urgence — l’idée figurait à l’article 31. Emmanuel Macron, dans son discours de 2017, rappelait que plusieurs pays (Espagne, Portugal, Suède, Finlande, Luxembourg) se sont réorganisés pour ne conserver qu’un numéro, quand a été mis en place le 112 en 2000.
« L’Europe de la sécurité civile est l’un des chantiers majeurs qui s’impose désormais au plan européen. L’Europe préconise la création du 112 comme numéro unique depuis plus de 15 ans, il est donc important que la France applique cette directive et soit à l’avant-garde de la construction de cette nouvelle étape européenne », était-il expliqué dans l’exposé des motifs.
Cette piste a toutefois été écartée au fil des discussions au parlement. Parmi les services de secours également, ce chamboulement passe difficilement. Le Samu, par exemple, a vu d’un mauvais œil la perspective du numéro unique centré sur le 112, jugeant que les opérateurs ne sont pas forcément aptes à gérer des urgences médicales par téléphone.
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