Tout est bien qui finit bien ? Pour éviter d’offenser les femmes, Google a préféré renoncer au « .bro » qu’il voulait associer à son algorithme de chiffrement .brotli.

Le nom d’une extension de fichiers de trois caractères peut-il être sexiste ? La question peut surprendre mais Google se l’est visiblement posée en répondant par l’affirmative. La firme de Mountain View a en effet préféré interrompre au plus vite un début de débat public sur la nature sexiste ou non de l’extension de fichiers « .bro », qu’il envisageait de proposer comme standard auprès de l’IANA pour la compression de données sur le Web.

Le 22 septembre dernier, Google a en effet annoncé le lancement du nouvel algorithme de compression de données Brotli, dont le nom est inspiré par le mot suisse-allemand Brötli, qui veut dire « petit pain ». Déjà il y a deux ans, Google avait dévoilé son algorithme Zopfli, dont le nom était également inspiré d’une viennoiserie. Pour reconnaître les fichiers compressés avec Brotli, les ingénieurs avaient donc songé à adopter le . »bro ».

« Nous espérons établir une extension de fichier .bro pour les fichiers compressés avec Brotli, un outil « bro » en ligne de commande pour compresser et décompresser les fichiers brotli, et un type d’encodage « bro ». Bro est le raccourci de Brotli — il n’y a pas de signification cachée, c’est juste plus pratique : moins de frappes de clavier, moins de bytes à uploader/télécharger, des noms de fichiers compressés plus courts », avait défendu sur Bugzilla l’ingénieur Jyrki Alakuijala, auteur principal de l’algorithme.

Mais en anglais, « bro » est un terme avec une forte masculinité. Raccourci de « brother », il est employé dans le langage courant pour désigner ses « potes », à l’exclusion des femmes. C’est un terme que l’on se dit entre hommes. The Register précise même qu’il existe le terme « brogrammer » derrière lequel s’unissent des développeurs machos qui se croient meilleurs que les femmes.

Une extension de fichiers .bro pourrait donc donner l’impression que l’algorithme est avant tout une histoire d’hommes, alors que le Web souffre déjà d’un déficit d’ingénieures femmes.

Ce sera .br

C’est en tout cas le point de vue défendu avec succès par Patrick McManus, ingénieur chez Mozilla.

« Est-ce que je peux vous convaincre d’y renoncer ? », a-t-il demandé sans aucune agressivité, mais avec l’intention de déminer un potentiel problème de communication. « Il n’est certainement pas trop tard pour modifier le draft de la demande. « Bro » a un problème de genre, même si la signification duale n’est pas intentionnelle. Il y a une charge misogyne et non professionnelle, en raison du monde dans lequel on vit. J’ai reçu beaucoup de réponses qui blaguaient sur le terme « bro », lorsque j’ai publié au sujet de cette nouvelle fonctionnalité. C’est mieux de l’éviter plutôt que de passer à défendre un nom arbitraire ».

Quelques échanges plus tard, Jyrki Alakuijala et Patrick McManus se mettaient d’accord sur un « .br », en toute cordialité.

Fin de l’histoire.

« Nous avons trouvé un compromis qui nous satisfait, donc il n’y a plus besoin d’en débattre », a fait savoir Jyrki Alakuijala, alors que sa décision de repli reste critiquée par certains qui estiment qu’il s’agit d’une réaction paranoïaque et que l’auto-censure aboutit en l’espèce à une solution posant d’autres problèmes : le .br est en effet l’extension de nom de domaine attribuée au Brésil.

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