C’est un véritable blocus qu’a mis en place le ministère de la culture pour réunir industrie culturelle, distributeurs et fournisseurs d’accès. Si les consommateurs sont appelés à la table des négociations, nous n’avons que peu d’espoir sur l’oreille qu’on leur tendra. L’orientation du débat semble en effet déjà décidée, comme en témoigne ce commentaire du ministre Donnedieu de Vabres lors de l’annonce de la rencontre :
« Je n’exclus pas, puisque cela ne sera pas la dernière réunion de concertation, qu’à un moment ou à un autre de nos rencontres, nous invitions un certain nombre de jeunes pirates pour avoir, avec eux, des discussions directes et franches afin qu’ils mesurent les enjeux de la crise »
Les utilisateurs de réseaux Peer-to-Peer ne seront (éventuellement) conviés qu’en tant que « jeunes pirates », une fois les principales questions déjà traitées entre les industriels, et uniquement en vue de leur faire la morale. « Cette réunion n’est pas publique« , a tenu à rappeler le cabinet du ministère lorsque nous les avons questionné sur ce point.
Le collectif EUCD.info, pourtant très actif sur les questions de diffusion des œuvres culturelles, n’a lui même pas été convié à la table ronde. C’est donc à travers une lettre adressée le 8 juillet aux ministres de la culture, de l’industrie et de la recherche que le groupement érigé par la Fondation pour le Logiciel Libre demande au gouvernement d’être reçu pour défendre notamment l’interopérabilité.
Les enjeux de l’interopérabilité
Sous ce mot se cache la possibilité pour le consommateur de lire de la musique ou des films achetés sur Internet sur n’importe quel lecteur, sans avoir à se soucier de la compatibilité avec le format employé. A un niveau plus important, l’interopérabilité évite que le marché culturel ne soit contrôlé entièrement que par une même entreprise, depuis la production des contenus jusqu’à leur lecture, en passant par leur distribution.
Sony symbolise déjà parfaitement ce risque. La firme japonaise fait partie avec son label Sony Music du club des cinq majors qui produisent 90% de la musique vendue dans le monde. C’est également Sony qui édite la plateforme de vente en ligne Connect (dont nous venons par ailleurs de publier un dossier accablant), laquelle ne fonctionne qu’avec des lecteurs compatibles ATRAC3, un format propriétaire de Sony…
Nous savons déjà que des cinq majors n’en resteront bientôt plus que quatre puisque Sony prévoit d’avaler l’allemand BMG. Et quid dans les vingt prochaines années ?
En sachant que la directive EUCD impose aux Etats membres d’interdire que les systèmes DRM soient contournés, ou d’interdire même jusqu’à la distribution d’un outil de contournement créé par exemple pour la lecture des DVD sous Linux, il y a de quoi s’inquiéter de l’absence d’un contrepoids efficace à la table ronde du 15 juillet prochain.
EUCD.info rappelle donc au ministre de la culture qu’une « politique culturelle ambitieuse ne peut être uniquement une politique économique et juridique : elle se doit d’être aussi visionnaire quant à l’architecture technique qu’elle promeut, pour encourager les pratiques et usages porteurs de sens et de valeurs, et pour que tous puissent accéder à moindre coût à la culture numérisée, partager leur savoir et leur art, et communiquer librement en toute sécurité« . Le collectif se propose ainsi de participer à la rédaction de spécifications d’un système libre standard qui permettra aux industries culturelles de contrôler l’utilisation légale des œuvres sans contrôler l’utilisateur lui-même.
Espérons que M. Donnedieu de Vabres donne réponse favorable.
Lettre au Ministre de la Culture :
http://eucd.info/lettre-rddv.pdf
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