Depuis le blocage de ChatGPT en Italie, et alors que plusieurs plaintes ont été déposées à la Cnil contre le chatbot, la question se pose : la France va-t-elle, elle aussi, entraver l’accès à l’intelligence artificielle d’OpenAI ? Pour l’instant, ce scénario ne s’est pas déclenché. L’interdiction de ChatGPT dans le pays n’est de toute façon pas souhaitée par Jean-Noël Barrot, ministre délégué à la Transition du numérique.
Interrogé par La Tribune le 6 avril, le ministre a critiqué les mesures d’interdiction et l’idée d’un moratoire, lancée entre autres par Elon Musk. Pour lui, l’IA n’est pas fondamentalement dangereuse, et peut même être un vecteur de croissance — et la France a « une carte à jouer » en la matière.
Interdire ChatGPT n’est pas une « bonne posture »
Dans son interview, Jean-Noël Barrot explique que, selon lui, le blocage de ChatGPT, à l’instar de ce que l’Italie a fait, n’est pas quelque chose de souhaitable. « On a vu se succéder une vague de technolâtrie, où on voulait nous faire croire que ChatGPT allait résoudre tous les problèmes du monde, puis une vague de technophobie où il faudrait imposer un moratoire, voire interdire ChatGPT. Aucune des deux postures n’est la bonne », tranche-t-il.
Maîtriser l’IA en maîtrisant l’innovation
Pour lui, la maîtrise d’une technologie comme l’intelligence artificielle passe par un encadrement de l’innovation, afin de ne pas la subir. On apprend ainsi qu’à la sortie de ChatGPT, fin 2022, le ministre a saisi le comité national d’éthique du numérique, qui doit rendre son avis sur le chatbot dans « quelques mois ».
À cet avis devrait s’ajouter un cadre réglementaire plus large : « nous négocions un règlement sur l’IA au sein de l’Union européenne », a-t-il précisé. « Je ne vais pas rentrer dans le détail, mais l’UE va fixer les usages pour lesquels l’IA va être interdite, par exemple la surveillance. »
Pourtant, l’Assemblée nationale vient de voter la mise en place d’un système de surveillance algorithmique dans le cadre de l’organisation des Jeux Olympiques de 2024. La mesure pourrait se heurter à des dispositions de ce règlement.
Le ministre poursuit en relevant que l’UE pourrait de plus restreindre l’utilisation d’IA dans des domaines comme « la santé ou les transports pour lesquels des vies humaines sont engagées. Les fabricants d’IA devront alors subir un contrôle et un audit de leurs produits avant la mise sur le marché. Et enfin, les usages récréatifs. »
La préoccupation immédiate concernant ChatGPT se situe au niveau de l’usage des données des utilisateurs, et c’est ici que l’entreprise devrait agir pour rentrer dans les clous. Jean-Noël Barrot l’affirme : le chatbot « ne respecte pas » le RGPD. « OpenAI devra probablement apporter des ajustements à son produit, parce que le traitement des données pour les utilisateurs pose problème. »
Quant à la France, elle a des atouts à faire valoir. « Parmi les géants numériques qui ont lancé certains des modèles d’IA, on retrouve souvent des Français à leur tête. Meta a installé en France un de ses principaux laboratoires de recherche en IA en Europe. Ce sont nos doctorants qui peuplent aujourd’hui les laboratoires de Meta. Il n’y a aucune raison que nous ne puissions pas développer à notre tour des modèles en France ». Reste à parvenir à les faire rester en France.
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