Les fournisseurs d’accès à internet et plus généralement les fournisseurs de boîtes aux lettres électroniques n’ont pas le droit de ne pas distribuer des courriels destinés à leurs clients, même s’il s’agit de lutter contre le spam. Le site Legalis publie en effet une ordonnance de référé du tribunal de commerce de Paris du 20 janvier 2016, par laquelle la juridiction a condamné Free pour avoir blacklisté tous les emails envoyés par la société Buzzee, qui propose ses services d’e-mailing à des entreprises.
Selon l’ordonnance, Free aurait décidé de bloquer totalement la distribution vers des adresses @free.fr de tous les messages provenant d’une adresse IP attribuée à Buzzee, empêchant ainsi la société de rendre le service promis à ses clients.
Pour se justifier, Free expliquait qu’un « certain nombre de prestataires spécialisés identifient Buzzee comme une société envoyant des spams », et que « les spams encombrent inutilement les réseaux de télécommunications et, par leur volume croissant, rendent plus difficile, ou plus coûteux, le maintien de la continuité et de la qualité de service que lui impose le code des postes et communications électroniques ». L’opérateur s’estimait donc dans son droit de bloquer les « spams » présumés destinés à ses clients, sans leur demander leur avis.
Le filtrage doit être approuvé par le destinataire
Mais pour le tribunal de commerce, dont l’ordonnance est sujette à appel, Free viole la neutralité du distributeur de courriers imposée par le code des postes et communications. De plus, « Free n’invoque aucune disposition législative ou réglementaire qui l’autoriserait, de sa propre initiative et suivant des critères qu’elle définirait, à supprimer des messages ainsi qualifiés par elle-même ».
L’opérateur avait bien tenté de rappeler que le spam est illégal en France, mais c’était présumer hâtivement de l’illicéité de tous les messages envoyés depuis les serveurs de Buzzee. Surtout, comme le dit sévèrement (et à raison) le tribunal de commerce, « Free n’est pas chargée de veiller au respect de ces dispositions ». Un FAI n’a pas à s’improviser police du mail, quand bien même ce serait dans l’intérêt général.
En revanche, le tribunal note que le filtrage des courriels n’est pas interdit dans l’absolu. Il faut simplement qu’il soit permis par le destinataire.
Or en l’espèce concernant les abonnés de Free, « aucune clause de ses conditions générales de vente à ses clients, ou contrats types, ne la mandate pour filtrer, directement ou indirectement, les messages destinés à ses clients, de manière générale ou selon des critères que préciseraient ces condition ». Les Webmails et les FAI peuvent donc toujours supprimer les spams entrants, à la condition que ça soit prévu dans les CGU.
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