Le Salon International de l’Aéronautique et de l’Espace au Bourget a fait son grand retour ce 19 juin après quatre ans d’absence. Entre les Rafales et les Mirages de l’armée de l’air, d’imposants appareils téléguidés ont fait leur apparition sur le tarmac. L’Aarok, un drone de 22 mètres d’envergure aux allures d’avion de chasse des années 1930, est peut-être le plus intrigant. D’abord parce qu’il s’agit d’un aéronef de 5,5 tonnes, ensuite parce qu’il est fabriqué en France par une entreprise que peu connaissent en dehors de l’industrie militaire, Turgis et Gaillard.
Les projets de drones de grande taille en France se sont enchainés depuis 20 ans et aucun n’a réellement convaincu. Le Harfang des années 2000 a fini par être remplacé par le fameux Reaper MQ9 américain. Quant à l’Eurodrone, sa sortie a été repoussée à 2027 en raison de désaccord avec les partenaires européens. L’Aarok débarque en ces temps de guerre où chaque armée est à la recherche de son drone et espère rivaliser avec les Américains dans la catégorie MALE : moyenne altitude, longue endurance.
Un drone déjà prêt pour l’armée
Le match se joue entre les deux engins si l’on s’intéresse aux caractéristiques. Le drone français devrait aller aussi vite (autour de 450 km/h en croisière) et reste longtemps en l’air (plus de 24h d’autonomie), peut embarquer jusqu’à seize missiles et intègre tout l’attirail nécessaire pour observer et renseigner dans le détail — vidéo haute définition jour et nuit, suivi automatique des cibles, géolocalisation, radar polyvalent avec 200 km de portée.
À noter aussi que l’Aarock sort de la zone de vulnérabilité de nombreux drones face aux défenses anti-aériennes. Le modèle français peut en effet tirer des missiles avec une portée de 35 km, lui évitant d’être ciblé par exemple par des batteries de Pantsir russes, limitées à un rayon d’action de 20 km.
Autre atout, l’appareil de Turgis et Gaillard est déjà prêt pour l’armée française. Le modèle est un assemblage de nombreuses technologies, dont la plupart sont déjà utilisées par l’armée française. Les militaires formés au Patroller de Safran n’auront pas beaucoup de difficulté à piloter ce nouvel appareil puisque Turgis et Gaillard a travaillé avec Safran sur le moteur.
Dans l’attente du premier vol
Le dernier argument est peut-être celui qui intéressera le plus les armées : l’Aarok devrait être moins cher que le Reaper américain, vendu autour 30 millions d’euros. L’autre star du drone est le Bayraktar TB2 de fabrication turc, estimé à environ 5 millions d’euros, mais qui reste moins compétent que le modèle français sur le renseignement, l’armement et l’altitude.
Turgis et Gaillard cherche donc à se placer dans un entre deux, sur un marché en forte demande. « La solution ne vient pas toujours des géants du secteur. General Atomics était un nouvel entrant et a proposé le Reaper au moment les grands groupes n’arrivaient pas à satisfaire les demandes du Pentagone. Il en va de même pour Baykar, la société à l’origine du Bayraktar, qui était encore inconnue il y a quelques années », nous explique Patrick Gaillard, co-fondateur de l’entreprise.
Au Bourget, l’Aarok commence déjà à se faire connaitre, les délégations étrangères et les militaires s’enchaînent devant l’avion couleur écru, mais tous attendent son envol avant de pouvoir le comparer au Reaper. Premier décollage prévu fin de l’année 2023.
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