Le Li-Fi est une nouvelle technologie de réseaux sans fils qui se sert de la lumière pour transmettre des données à très grandes vitesses. Elle pourrait bouleverser notre quotidien d’ici les prochaines années.

Le concept de Li-Fi a été introduit en 2011 par Harold Haas, un professeur en communications mobiles à Édimbourg, lors d’une conférence au TED Global. Dans sa présentation « Wireless data from every light bulb » (ou « communication sans fil depuis n’importe quelle ampoule »), le professeur avait démontré la diffusion d’une vidéo HD avec une simple lampe de bureau. Il laissait entrevoir que dans un futur proche, les LED pourraient devenir le nouveau standard de connexion, à la fois rapide, performant et accessible, tout en étant « cleaner, greaner, brighter » (plus propre, plus vert, plus brillant).

Qu’est-ce que le Li-Fi ?

Le Li-Fi est un acronyme pour Light Fidelity (fidélité lumineuse en anglais), un nom qui fait immédiatement référence au Wi-Fi ou encore à la haute fidélité sonore, le Hi-Fi. En soi, le Li-Fi emprunte aux deux termes, puisqu’il est sans fil et se veut performant. Mais contrairement au Wi-Fi qui utilise les ondes radio, le Li-Fi est une technologie qui permet de transmettre des données en utilisant la partie visible du spectre électromagnétique (la lumière).

La technologie de réseau sans fil par la lumière précède cependant de plusieurs dizaines d’années l’acronyme inventé par Haas. On parlait alors de VLC (Visible Light Communication). Les premiers développements ont commencé dès 2003 au Japon.

La démocratisation du Li-Fi est étroitement liée à l’arrivée des ampoules LED dans nos foyers

Si l’on entend beaucoup parler de cette technologie ces dernières années, c’est parce que sa démocratisation est étroitement liée à l’arrivée dans nos foyers d’une autre technologie, plus connue, les LED. Les ampoules LED, dont l’intérêt principal est d’être particulièrement économes en énergie, sont en effet très réactives. Elles peuvent être allumées ou éteintes à une vitesse imperceptible à l’œil humain. Le Li-Fi, vous l’aurez donc compris, va moduler très vite l’intensité lumineuse pour créer un signal qui pourra être interprété par un récepteur.

L’utilisation de la lumière pour transmettre des informations n’a rien d’une nouveauté. On l’utilise entre autres depuis plus d’un siècle avec l’alphabet morse lumineux. Graham Bell, l’inventeur du téléphone, avait développé dans les années 1880 une invention que beaucoup considèrent comme étant l’ancêtre du Li-Fi, le photophone.

Eureka !

Eureka !

L’objet, que Bell voyait comme étant sa plus belle invention, avait permis de communiquer sur une distance de 200 mètres. « Notre imagination peut-elle entrevoir ce que le futur réserve à cette invention ! », avait alors déclaré le visionnaire.

Aujourd’hui, on utilise la lumière pour transmettre des données quotidiennement avec la fibre optique et les lasers. Mais ces technologies ont besoin d’une connexion directe (ou sinon la plus précise possible) entre l’émetteur et le récepteur afin de fonctionner efficacement. Ce n’est pas le cas du Li-Fi qui est dans une certaine mesure plus proche de l’IrDa, une technologie tombée en désuétude que l’on utilisait il y a un peu plus d’une dizaine d’années pour transmettre des données entre deux appareils grâce au rayonnement infrarouge — vous l’avez encore dans vos télécommandes, pour celles qui ne sont pas déjà Bluetooth. En utilisant une source lumineuse plus large, le Li-Fi peut étendre la portée du signal sur plusieurs mètres et il n’est pas nécessaire d’être précisément sous la source lumineuse.

Comment ça marche ?

« Tous les composants, tous les mécanismes existent, vous n’avez plus qu’à les mettre ensemble et à les faire fonctionner », affirmait Harald Haas dans sa conférence. Cependant, dans les faits, c’est un peu plus compliqué. Pour fonctionner en Li-Fi une LED aura tout de même besoin d’une puce adaptée et d’être reliée à un réseau. Les lumières étant connectées au réseau électrique, la solution du CPL est très souvent utilisée. Un smartphone ou un ordinateur devra contenir un récepteur pour recevoir et décoder le signal lumineux. Celui-ci peut prendre la forme d’une clé USB équipée d’une photodiode, d’un écran photovoltaïque, ou encore utiliser la caméra du téléphone.

On se souvient par exemple du smartphone présenté par Oledcomm, une société française créée par deux chercheurs de l’université de Versailles. Ils avaient présenté, lors du CES 2014, un téléphone capable de transmettre des données en Li-Fi tout en utilisant la lumière pour se recharger.

Le Li-Fi pourrait être utilisé pour alléger les réseaux sans-fil existants

Concrètement, le Li-Fi pourrait être utilisé pour alléger les réseaux existants, aujourd’hui saturés du fait de la multiplication des objets communicants et de la taille des données échangées. L’émergence de l’Internet des Objets ne fait qu’amplifier le phénomène.  Le spectre des réseaux Wi-Fi, 3G et 4G ne peut contenir qu’un certain nombre de connexions simultanées et leur bande passante est limitée. Il suffit de se connecter sur un point d’accès Wi-Fi dans une université, sur un salon professionnel, ou encore d’utiliser le réseau mobile dans une grande ville aux heures de grands usages pour se rendre compte des limitations des réseaux actuels.

La lumière visible, elle, couvre une bande d’environ 300 Thz. Son spectre est 10 000 fois plus large que celui des ondes radio. De fait, un très grand nombre d’appareils pourrait se connecter sur un seul point d’accès. À l’heure actuelle, le débit commercial a été établi par le comité international IEEE 802. Les débits pourraient aller de 11,67 kb/s en extérieur à 96 Mb/s en utilisant plusieurs émetteurs. Mais en laboratoire, les chercheurs ont déjà réussi à obtenir des débits extraordinaires, allant jusqu’à 224 Gb/s ! Autre avantage, non des moindres, la bande n’est pas régulée, celle-ci peut donc être utilisée gratuitement.

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Mais comme toute technologie, la transmission de données par lumière visible rencontre encore certaines limitations. Tout d’abord, et en toute logique, s’il n’y a pas de lumière, il n’y a pas de connexion. Pour être la plus efficace possible, la source lumineuse doit donc être proche du récepteur. Il faut compter qu’après une dizaine de mètres, le signal perd en intensité. Mais cet inconvénient peut devenir un avantage pour la protection des données. Contrairement au Wi-Fi qui traverse les murs, le Li-Fi est restreint à la pièce dans laquelle la lumière est modulée.

On peut également se demander ce qui se passe lorsque l’on utilise le Li-Fi la journée. Haas se veut rassurant, la lumière ambiante, naturelle ou artificielle, ne produit pas d’interférences et n’empêche pas le fonctionnement de la technologie. D’après lui, même si la source lumineuse est très faible, la modulation de l’intensité lumineuse peut toujours être perçue.

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Il rajoute que la technologie n’est pas faite pour remplacer entièrement les réseaux actuels, mais pour les compléter. Il s’agit en quelque sorte d’une connexion des derniers mètres. Dans tous les cas, même si les LED sont peu énergivores, on imagine qu’utiliser jour et nuit les 14 milliards d’ampoules prévues pour 2020 aura tout de même un impact énergétique non négligeable. L’industrie du Li-Fi nuance en prétextant qu’elle cible avant tous les entreprises et les institutions, qui laissent dans tous les cas la lumière allumée la journée.

Le Li-Fi, à quoi ça sert ?

À mesure que les LED s’intègrent dans notre quotidien, les solutions de Li-Fi seront amenées à se multiplier. Et l’industrie ne manque certainement pas d’idées. La smart-city et l’Internet des Objets pourront par exemple profiter de la communication par lumière visible pour créer un réseau de communication urbain intelligent et des solutions domotiques. L’éclairage public ou même les voitures utilisent en effet aujourd’hui de plus en plus les LED.

À l’heure où les chercheurs et les institutions réfléchissent aux infrastructures nécessaires pour permettre aux voitures autonomes de prendre la route, le Li-Fi pourrait donc être une solution. Il permettrait la communication de véhicule à véhicule, mais également avec l’équipement urbain (les feux, les barrières) et les piétons. L’éclairage public pourrait également permettre aux touristes et aux résidents d’obtenir des informations contextuelles selon l’endroit où ils se trouvent.

Dans les avions et les hôpitaux, le Li-Fi pourrait permettre d’utiliser son matériel sans risque d’interférence électromagnétique. Plusieurs compagnies aériennes sont par exemple intéressées pour utiliser la liseuse au-dessus des sièges pour transmettre des données ou diffuser des films. Actuellement, des expérimentations prennent place dans des musées pour permettre aux visiteurs d’obtenir des informations en face d’une œuvre précise. Dans cette vidéo, on peut voir comment la technologie pourrait être utile pour transmettre un flux audio ou vidéo sur un smartphone ou une tablette :

Mais la technologie permet également de localiser au centimètre un utilisateur. Ainsi, Philips et Carrefour se sont associés pour proposer au client de l’hypermarché Euralille une expérience d’achat innovante. Grâce à une application et à des lumières Li-Fi réparties sur le magasin, les clients peuvent savoir exactement où ils se trouvent et obtenir la position de n’importe quel article.

https://youtu.be/uQw-o6bjrec

Les possibilités offertes par cette technologie semblent infinies. Compte tenu du fait qu’elle n’utilise pas d’ondes radio, elle peut même être utilisée pour communiquer dans des endroits où la radiofréquence est difficile, comme au fond de l’océan. De plus, l’absence d’ondes radio pourrait résoudre les questions de dangerosité des ondes électromagnétiques au sein du foyer.

Si le Li-Fi ne semble pas destiné à devenir le prochain Wi-Fi, la technologie offre certains avantages sur nos réseaux actuels. Grâce à sa bande passante élevée et l’immense capacité du spectre, le Li-Fi pourrait être utilisé en symbiose avec nos réseaux actuels pour les rendre plus efficaces. Selon l’industrie, cette technologie pourrait être commercialisée auprès du grand public dès 2018. D’ici là, elle devrait représenter un marché de 6 milliards de dollars par an.

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