Twitter n’a jamais réussi à gagner de l’argent, mais Elon Musk est convaincu qu’il peut en faire un produit rentable. Pourtant, comme souvent avec Elon Musk, la plupart de ses actions vont dans le sens contraire. Après avoir décidé de partager une partie de ses revenus publicitaires avec les utilisateurs du réseau social, le milliardaire, décidément généreux, a décidé de renoncer définitivement à la commission qu’aurait pu prélever Twitter sur les souscriptions, autrefois appelées « super follow ». Concrètement, cela veut dire qu’un utilisateur qui décide de vendre des abonnements payants pourra garder 100 % des recettes, ce qui constitue un argument intéressant pour les utilisateurs d’autres plateformes, comme OnlyFans (et qui pourrait, au passage, ramener encore plus de pornographie sur la plateforme). Twitter ne se servira qu’au-dessus des 100 000 dollars, avec une petite commission de 10 %.
En prenant ces décisions, Elon Musk met des bâtons dans les roues de Twitter, qu’il vient de renommer X. Le réseau social ne risque pas de faire de bénéfices avant longtemps avec une telle stratégie, d’autant plus que les annonceurs ont fui la plateforme. Son objectif, au moins à court terme, semble d’attirer les utilisateurs et les publicitaires, avant d’accélérer sur la monétisation. Mais Elon Musk doit d’abord résoudre un autre problème : Apple.
X prend 0 %, mais Apple prélève 30 %
Le problème d’Elon Musk est le même que celui de millions de développeurs : la commission imposée par Apple sur l’App Store nuit à son business. Aujourd’hui, les deux pourcentages les plus courants sont les suivants :
- Dans la plupart des cas, Apple prélève 30 % sur chaque achat réalisé depuis un iPhone ou un iPad. Tout ce qui se passe par le système de paiement de l’App Store, qui est obligatoire pour la plupart des services, est taxé.
- Au bout d’1 an d’abonnement à un même service, la commission bascule à 15 %. Dans le cas des petits développeurs, mais X n’en est pas un, la commission peut commencer à 15 %.
Prenons un exemple précis. Si un utilisateur de Twitter décide de vendre des tweets exclusifs à ses abonnés payants pour, disons, 4 euros par mois, Twitter ne touchera rien sur ses revenus. En revanche, à chaque fois qu’un utilisateur s’abonne depuis un iPhone, Apple touchera 1,20 euro. Au final, l’utilisateur de Twitter ne gagnera que 2,80 euros par abonnement.
Autre exemple, celui d’un utilisateur qui gagnerait 150 000 euros avec X. En appliquant le calcul actuel, Apple toucherait 45 000 euros (30 %), X en prendrait 5 000 (10 % sur ce qui est au-dessus de 100 000) et l’utilisateur toucherait les 100 000 euros restants.
Précisons d’ailleurs que le fonctionnement est le même sur Android, puisque Google prélève des commissions similaires sur le Play Store. Mais Elon Musk ne semble s’intéresser qu’à Apple, puisqu’il est lui même utilisateur de l’iPhone et que les utilisateurs d’iOS dépensent plus dans les applications.
C’est là qu’Elon Musk espère faire changer les choses. En bonne relation avec Apple depuis que Tim Cook l’a invité à Cupertino pour l’apaiser après une première vague de tensions, Elon Musk pense qu’il peut convaincre le patron d’Apple de se montrer plus généreux.
Sa proposition est la suivante : Apple ne touche rien jusqu’aux premiers 100 000 dollars, comme lui. Au-dessus, Apple peut prélever 30 % sur la commission de Twitter, pas la somme totale. En gros, pour un paiement de 150 000 euros, Apple verrait sa commission passer de 45 000 euros à… 1 500 euros. En contre-partie, Twitter verrait la sienne passer de 5 000 à 3 500 euros. L’utilisateur serait le grand gagnant, avec une recette de 145 000 euros, au lieu de 100 000 euros.
Pourquoi Elon Musk pourrait réussir
Elon Musk est-il en délire total quand il pense pouvoir convaincre Tim Cook d’aller dans son sens ? Pas forcément.
Dans le passé, Apple a déjà accepté de renoncer à sa commission pour mieux rémunérer les créateurs, après un bras de fer avec Facebook/Meta. Il faut cependant noter que cette décision n’était qu’une « exception » due au Covid, pour aider les commerces à gagner de l’argent malgré la pandémie.
Si on applique strictement les règles de l’App Store, Apple est dans son droit quand il prélève 30 % sur un abonnement X, puisque l’utilisateur pourra y accéder depuis son iPhone. Les exceptions aux 30 % sont généralement appliquées aux services tiers, comme la livraison de nourriture ou la commande de VTC (le produit commandé n’est pas accessible depuis l’appareil, donc la taxe ne s’applique pas). Apple peut donc parfaitement refuser la proposition d’Elon Musk.
Cependant, au vu du poids d’Elon Musk, Apple peut aussi se dire qu’il vaut mieux éviter une guerre avec le milliardaire, qui sait rallier ses fans contre ses ennemis. Puisque l’App Store est scruté et s’apprête à perdre son monopole, Apple a tout à gagner à accepter un changement de règle temporaire, comme il l’a déjà fait avec Meta, juste pour détourner l’attention (et Apple continuerait dans tous les cas de prélever 30 % sur Twitter Blue). Quelque chose nous dit que nous sommes au début d’un feuilleton, et qu’Elon Musk risque de faire du bruit.
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