Quels que soient les coins du monde, les méthodes de l’industrie du disque sont partout les mêmes. BMG, membre du club des cinq majors, envoyait ainsi dimanche soir son nouveau produit marketing sur la chaîne de télévision publique québecoise. Mission : détourner les jeunes canadiens des viles tentations du piratage, quitte à insulter les fans.

Cette saison débutait sur Radio-Canada l’adaptation québecoise de l’émission phare de Thierry Ardisson, Tout Le Monde En Parle. Présentée par Guy A. Lepage, le show a battu tous les espoirs d’audience au Québec en réunissant plus de deux millions de téléspectateurs tous les dimanches soir, dans un pays où la francophonie représente uniquement sept millions de personnes.

Pour tout artiste qui désire se faire connaître dans le grand nord canadien, l’émission est déjà un passage obligé. Rien de surprenant donc à voir la nouvelle star québecoise, Andrée Watters, y faire une apparition le dimanche 24 octobre pour vendre son premier album. A la fin de l’interview, l’animateur demande solennellement à la chanteuse ce qu’elle pense du piratage sur Internet. « C’est comme voler un chandail dans une boutique« , répond t-elle avec autant de spontanéité que la présence d’une meute de caribous en Arizona.

Puis la phrase de trop :

« Lorsque dans un concert un fan me présente un CD copié pour que j’y signe un autographe, je refuse de signer« , annnonce t-elle sur un ton grave.

Il faut présenter un original à la chanteuse, sinon le fan n’est pas un fan, explique t-elle ; et il n’a donc pas droit à ses honneurs. Pas d’argent pour acheter la place de concert ET le disque ? Il n’aura pas de dédicace. C’est la nouvelle logique des produits de l’industrie du disque. Fière de ne pas être issue de la « Star Academie », la chanteuse n’en a pas moins signé chez Vik Recordings, une filiale de la major BMG. Comme elle le dit elle-même, elle doit son succès à son âge. « J’ai 21 ans donc je plais aux jeunes« , confie t-elle sur le plateau de l’émission. 21 ans, c’est justement l’âge du pirate moyen spectateur du nouveau talk-show de Radio-Canada. Un porte-parole de choix pour la CRIA, l’association canadienne de l’industrie du disque.

Le 31 octobre, la chanteuse québecoise sera au gala de l’ADISQ, l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo. Ce gala est l’équivalent local des victoires de la musique françaises. Relativement inconnue jusque là, Andrée Watters y est pourtant nominée cinq fois, de quoi propulser sa carrière… et sa parole sainte.

Mais pourquoi donc le Thierry Ardisson québecois s’est-il fait le complice de la profession de foi de BMG, sur la chaîne de télévision publique ? Chacun se fera une idée, mais le fait qu’il soit animateur des deux shows n’y est peut-être pas indifférent, tout comme le fait que son co-producteur Luc Wiseman soit l’unique actionnaire de la société qui produira le gala québecois, Avanti Ciné Vidéo. (voir mise à jour)

MISE A JOUR :

Rectifions notre erreur, Luc Wiseman n’est pas producteur du gala de l’ADISQ. Monsieur Wiseman est lié à l’ADISQ par le poste de vice-président vidéo de l’association qu’il occupait en 1998.

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