Les grandes manœuvres semblent avoir débuté pour se conformer au Digital Market Act (DMA). C’est vrai, du moins, pour WhatsApp, à en croire une capture d’écran partagée me 10 septembre par WABetaInfo, qui suit de près les développements de l’application mobile, filiale de Meta, la maison mère de Facebook et Instagram.
Le screenshot partagé dans le message de WABetaInfo montre un écran vide, mais avec un encart supérieur qui mentionne les « discussions avec des sources tierces » (« third-party chats »). En clair, c’est dans cette rubrique qu’apparaîtront les tchats avec des internautes n’utilisant par WhatsApp. Par exemple, iMessage, Telegram, Snapchat, Skype ou encore Discord.
On ignore encore, aujourd’hui, avec quelles autres messageries WhatsApp dialoguera dans quelques années. On sait en revanche que le DMA pose un principe clair : ces services de discussion doivent être interopérables entre eux. Quelqu’un utilisant iMessage devra pouvoir envoyer un message à un contact sur WhatsApp, et vice-versa, sans avoir à utiliser l’autre appli.
C’est une logique que l’on peut rapprocher des mails : les courriers électroniques sont (heureusement !) capables d’aller d’une boîte aux lettres à l’autre sans qu’il soit nécessaire d’utiliser le même prestataire que son correspondant. On peut ainsi tout à fait utiliser le webmail de son FAI et atteindre l’adresse mail ouverte chez un autre opérateur, Outlook, Gmail ou un autre.
Une interopérabilité par étapes
Le DMA doit pleinement entrer en vigueur au mois de mars 2024 et, dès cette date, le nouveau texte européen exige un début d’interopérabilité entre les « services de communications interpersonnelles non fondés sur la numérotation » — la formule officielle pour désigner ces applications de discussion. Et pour contraindre les firmes concernées, des amendes écrasantes sont prévues.
Selon le calendrier fixé par le DMA, le rythme d’interopérabilité à respecter est le suivant.
Les fonctionnalités de base, dès mars 2024 :
- messagerie textuelle de bout en bout entre deux utilisateurs finaux individuels ;
- partage d’images, de messages vocaux, de vidéos et d’autres fichiers joints dans les communications de bout en bout entre deux utilisateurs finaux individuels ;
Dans un délai de deux ans après la désignation des sociétés concernées :
- messagerie textuelle de bout en bout entre des groupes d’utilisateurs finaux individuels ;
- partage d’images, de messages vocaux, de vidéos et d’autres fichiers joints dans les communications de bout en bout entre une conversation de groupe et un utilisateur final individuel ;
Dans un délai de quatre ans :
- appels vocaux de bout en bout entre deux utilisateurs finaux individuels ;
- appels vidéo de bout en bout entre deux utilisateurs finaux individuels
- appels vocaux de bout en bout entre une conversation de groupe et un utilisateur final individuel ;
- appels vidéo de bout en bout entre une conversation de groupe et un utilisateur final individuel.
Bien sûr, cette interopérabilité est accompagnée de règles. Il est demandé que soit maintenu le niveau de sécurité des internautes, y compris le chiffrement de bout en bout, sur l’ensemble des services interopérables. Les internautes gardent de plus la liberté de se servir ou non de l’interopérabilité. Et cette interopérabilité doit se faire toujours en appliquant le reste de la législation, comme le RGPD.
Deux milliards d’utilisaeurs sur WhatsApp
Le DMA vise les entreprises qu’on qualifie de « gatekeepers », soit gardiens ou bien contrôleurs d’accès en français. L’Union européenne désire leur appliquer des règles particulières, compte tenu de leur immensité sur Internet. Sept sociétés ont été choisies (Alphabet, Amazon, Apple, Meta, Microsoft et ByteDance), parce qu’elles opèrent ensemble vingt-deux services essentiels.
Ces services sont qualifiés ainsi parce qu’ils sont presque incontournables dans la sphère numérique. WhatsApp, par exemple, est utilisé par plus de deux milliards de personnes dans le monde. Dès lors, la moindre décision de Meta, la maison mère de WhatsApp, pourrait avoir une incidence considérable sur sa base d’utilisateurs, mais aussi sur le marché des applis de messagerie.
On ignore depuis quand WhatsApp et Meta préparaient cette future mise à jour de l’application, pour qu’elle puisse accueillir des tchats provenant de l’extérieur.
Son existence n’a été dévoilée que quelques jours après la confirmation que Meta est bien un « gatekeeper » et WhatsApp un « service essentiel ». Les deux sociétés, toutefois, devaient certainement se douter qu’elles seraient sélectionnées (Meta ne peut ignorer à quel point ces filiales sont populaires, notamment en Europe) et s’y préparaient vraisemblablement bien avant.
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