Sans l’iPhone, prendre en photo ses enfants serait-il aussi facile ? En lançant son smartphone en 2007, Apple a déclenché une véritable révolution technologique. La complexité des appareils photo s’est graduellement effacée, puisque la plupart des fonctions jugées autrefois trop techniques sont devenues bien plus accessibles.
Contrairement à ce que certains peuvent penser, l’iPhone n’a pas tout changé du jour au lendemain. « Avec l’iPhone 1, l’appareil photo était une fonction annexe. Il n’avait le droit à qu’à 10 secondes pendant la keynote. Aujourd’hui, il est au cœur de l’iPhone. Vous ne pouvez plus séparer l’appareil photo de l’iPhone », analyse Jon McCormack, aujourd’hui en charge de l’ingénierie logicielle dans les équipes photo d’Apple. Un sentiment partagé par Maxime Veron, le directeur senior du marketing de l’iPhone, qui promet que le meilleur à venir.
Numerama a pu s’entretenir avec ces deux cadres d’Apple suite à un déplacement en Californie, à l’occasion de l’annonce des iPhone 15. Apple, qui a pour réputation de peu se livrer, n’a pas hésité à nous partager quelques secrets de conception de ses nouveaux téléphones.
L’appareil photo de l’iPhone : un équilibre entre capteurs, logiciel et processeur
Comme souvent ces dernières années, Apple mise sur des nouveautés photographiques pour convaincre ses clients de changer d’iPhone. Le millésime 2023 est particulièrement généreux avec plusieurs changements matériels, comme l’arrivée d’un capteur de 48 Mpix sur les modèles 15 et 15 Plus, un nouveau revêtement contre les lens flares, un capteur principal 50 % plus grand pour les 15 Pro et 15 Pro Max et un zoom périscopique x5 (équivalent 120 mm) sur le modèle 15 Pro Max.
S’ajoutent à ça plusieurs nouveautés logicielles, comme la prise de photos de 24 Mpix par défaut (12 auparavant), un mode portrait déclenché automatiquement et modifiable a posteriori, de nouveaux équivalents de longueurs focales présélectionnés (macro, 13 mm, 24 mm, 28 mm, 35 mm, 77 mm ou 120 mm) et un mode 48 Mpix économe en données.
« Pour que la magie opère, il faut du matériel de pointe. Il faut innover dans le matériel afin que le logiciel fonctionne en parfaite harmonie avec lui, chose que nous maîtrisons particulièrement bien chez Apple », explique Maxime Veron à Numerama, lorsqu’il raconte les coulisses de la création d’une nouvelle génération d’iPhone. Son collègue Jon McCormack ajoute : « Lorsque l’équipe matériel sort quelque chose, ils viennent nous les présenter avec des « voilà une nouvelle lentille, voilà un nouveau capteur », mais ce n’est que le début de la conversation. Notre prochain arrêt est toujours l’équipe en charge des puces pour leur demander ce que nous pouvons en faire. ».
L’émergence de la photographie computationnelle a complètement transformé le fonctionnement interne d’Apple, qui pense désormais les modules caméra de ses smartphones sous plusieurs aspects. Matériel, logiciel et puissance (sans oublier la logistique, puisqu’Apple a besoin de fournisseurs capables de lui envoyer des centaines de millions de composants identiques)… « Les gens qui font du logiciel, ceux qui font des lentilles, ceux qui font des capteurs, nous sommes tous des photographes. Nous poussons tous différentes idées. C’est un travail remarquablement collaboratif », ajoute Jon McCormack.
À l’avenir, les puces Apple Silicon risquent d’être encore plus sollicitées. À l’heure de l’émergence d’un nouveau type d »intelligence artificielle, Jon McCormack promet qu’« il y a beaucoup de choses dans notre feuille de route qui nécessitent encore plus de puissance de calcul.» Apple est entré dans l’ère computationnelle, pour proposer des appareils photo qui plaisent à tous, sans options compliquées. « La photographie computationnelle a commencé à flouter les frontières entre le matériel et le logiciel, redéfinissant ce qu’est une photo », affirme Maxime Veron, le directeur senior du marketing de l’iPhone.
« Prenez ce gros bouton rouge qui permet de prendre une photo, nous cachons toute la folie derrière lui. Il doit pouvoir capturer l’ensemble de la scène, utiliser l’ensemble des lentilles, utiliser le zoom x5 pour atteindre ce qui est éloigné, utiliser le grand angle pour obtenir cette scène expansive. Nous voulons que les choix des utilisateurs soient des choix de moment et de cadrage, pas des choix sur comment exposer cette image ou comment gérer ces différents types de lumière, ombres, lumière indirecte, teintes de peau… Nous voulons éliminer toute cette complexité », complète le vice-président du logiciel photo d’Apple.
Ce que pense Apple du zoom x10 de Samsung
Avant l’iPhone 15 Pro Max, un autre smartphone s’est imposé comme l’appareil haut de gamme ultime : le Samsung Galaxy S23 Ultra. Surdoué de la photo, il propose un zoom périscopique x10 d’exception, ainsi qu’un zoom numérique x100 étrangement convaincant. Un produit auquel sera forcément comparé l’iPhone 15 Pro Max à sa sortie, puisqu’il est le premier iPhone avec un zoom périscopique (qu’Apple qualifie de « tétraprisme »).
Avec un zoom x5 (équivalent 120 mm), Apple est-il condamné à faire moins bien ? Ce n’est pas la vision des deux représentants que nous avons interrogés, qui avancent plusieurs arguments pour défendre leurs choix : « Le zoom x5 est quelque chose que nous pouvons incroyablement bien stabiliser. Si vous regardez le zoom x10, à moins d’avoir les mains les plus stables du monde ou un trépied, c’est vraiment difficile à utiliser. Lorsque nous pensons à créer une fonctionnalité, nous nous demandons toujours « qui va l’utiliser ? » » explique le vice-président en charge de la photo chez Apple.
Son collègue Maxime Veron a un autre argument, difficilement contestable : « Notre zoom ouvre à f/2,8, ce qui nous permet d’obtenir une excellente gestion de la lumière. ». Il est vrai qu’en comparaison à l’ouverture f/4.9 du périscope du S23 Ultra, le zoom iPhone 15 Pro Max apparaît mieux équipé pour faire de belles photos de nuit. Mais seuls les algorithmes pourront élire un vrai gagnant.
Ainsi, Apple prend position contre la guerre des chiffres, qu’il considère inutile. « L’iPhone est un appareil photo incroyablement social. Un zoom x10, équivalent 240 ou 250 mm, les personnes sont très éloignées. Vous perdez cette intimité. ». Quid de la limitation du zoom numérique à x25, là où Samsung va quatre fois plus loin ? Là encore, Apple considère qu’en faire trop ne sert à rien. « Nous construisons des appareils photo que les gens utilisent » déclare Jon McCormack.
Autre argument mis en avant par Apple : le zoom optique n’est utile que si les photos prises à proximité sont bonnes. « Si vous regardez l’histoire de la photographie, la plage magique est l’objectif 24-70. Vous voyez le monde de manière expansive et de près ». Apple préfèrerait offrir d’excellentes vues x0,5, x1, x2 (numérique), plutôt que de permettre d’aller trop loin sans focales plus proches, alors qu’elles sont amenées à être utilisées la majorité du temps.
Les photos spatiales, l’autre chantier d’Apple
L’Apple Vision Pro, le premier « ordinateur spatial » de la marque californienne, sera lancé en 2024. Un produit qui entreprend de transformer l’écosystème d’Apple avec du contenu en 3D. Une de ses fonctions est de pouvoir prendre des photos/vidéos « spatiales », pour que l’on puisse revoir ses souvenirs dans une immersion totale. Une des surprises de la conférence du 12 septembre était la compatibilité de l’iPhone 15 Pro avec les photos spatiales, pour pouvoir photographier en 3D dès la fin d’année. Personne ne s’y attendait.
« Dès la fin d’année, les utilisateurs pourront commencer à constituer une bibliothèque de souvenirs dans ce format unique. Même s’ils n’achètent jamais un Apple Vision Pro, ils pourront les partager avec des amis qui en ont un. Nous voulions commencer tôt », explique Maxime Veron lorsque nous l’interrogeons sur le lancement précoce, sur lequel Apple n’a pas dit grand-chose.
Comment fonctionnent les photos de 3D de l’iPhone ? « Nous filmons simultanément avec deux objectifs, comme s’il s’agissait de deux yeux, puis une magie computationnelle très mystérieuse se produit », s’amuse Jon McCormack. Nous devrons en rester là pour l’instant.
L’iPhone, le tournant de la photographie
À quoi ressembleront les iPhone dans 10 ans ? Jon McCormack fait une prédiction taquine, puisqu’il imagine que les utilisateurs s’en souviendront comme d’une « relique ».
« Nous considérons la photographie comme un domaine à la croisée de la technologie et de l’art. Quelque chose que nous maîtrisons vraiment bien. La photographie existe depuis plus de 200 ans et l’histoire a vraiment connu un tournant en 2007 », complète Maxime Veron. Seize ans plus tard, grâce à l’émergence de la photographie computationnelle, Jon McComarck dit penser que l’iPhone est devenu « la meilleure caméra du marché ». Ni plus, ni moins.
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