On imagine mal, de ce côté-ci de l’Atlantique, à quel point l’affaire qui oppose le FBI à Apple est en réalité vécue comme une affaire hautement politique, qui concerne la liberté des individus et des entreprises face à la puissance étatique. Dans des États-Unis bercés au libéralisme, le gouvernement est toujours suspect, aux yeux d’une majorité, de vouloir trop s’immiscer dans les affaires privées.
Il ne faudrait donc pas prendre avec dérision les informations du New York Times, selon lesquelles de nombreux ingénieurs d’Apple chargés de la sécurisation des iPhone seraient prêts à démissionner si la justice confirmait l’obligation d’aider à accéder au contenu chiffré d’un téléphone verrouillé. Selon le quotidien américain, qui dit s’appuyer sur « plus d’une demie douzaine d’employés actuels ou d’anciens employés d’Apple », les ingénieurs de la firme de Cupertino discuteraient d’ores et déjà en interne d’un possible plan de démissions massives, qui paralyserait l’ordre judiciaire.
Dans sa lettre ouverte publiée pour expliquer le refus d’Apple de coopérer avec le FBI, Tim Cook avait déjà mis en avant le malaise des ingénieurs. « Le gouvernement a demandé à Apple de pirater ses propres utilisateurs et de plomber des décennies d’avancées sur la sécurité qui protège nos clients — incluant dix millions de citoyens américains — de pirates et cybercriminels compétents. Les mêmes ingénieurs qui ont créé ce système de chiffrement pour iPhone afin de protéger nos utilisateurs pourraient, ironiquement, recevoir l’ordre d’affaiblir ces protections et ainsi mettre nos utilisateurs dans une position de faiblesse », avait-il écrit.
Les ingénieurs chargés du chiffrement et de la sécurisation sous iOS sont assez peu nombreux chez Apple, et leur démission rendrait très difficile la réalisation du piratage maison demandé par le FBI et le gouvernement américain. Dans une réponse au tribunal, Apple avait expliqué que pour supprimer la protection qui évite l’effacement des données après 10 tentatives ratées de saisies de code de déverrouillage, il lui faudrait mettre entre 6 et 10 employés à temps plein pendant un mois. Or si les personnels les plus qualifiés démissionnent, le délai sera impossible à tenir.
L’hypothèse d’une démission massive est d’autant moins absurde que la protection des données personnelles est devenu un argument commercial de poids depuis les révélations d’Edward Snowden sur les programmes de surveillance de la NSA. Comme le souligne le New York Times, les démissionnaires ajouteraient immédiatement à leur CV un « badge d’intégrité », de protecteur des droits fondamentaux. Leur recrutement se ferait à prix d’or, pour la publicité qu’elle ferait au recruteur.
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