La perspective d’avoir à payer un euro par an pour avoir le droit d’écrire sur X (ex-Twitter) a horripilé nombre d’internautes en Europe. Elle pourrait toutefois ne jamais se produire pour le Vieux Continent, puisque le réseau social songe à quitter ce marché. C’est en tout cas ce qu’avance Business Insider dans son édition du 19 octobre 2023.
D’après le média américain, Elon Musk — le propriétaire de la plateforme — se demanderait si cela vaut le coup de maintenir les activités de X dans les pays de l’Union européenne, au regard des risques juridiques encourus, en raison du Digital Services Act (DSA) et du futur Digital Market Act (DMA), et du poids que représente le continent dans sa communauté.
Ces éléments, rapportés par Business Insider, ont été démentis par Elon Musk sur son réseau social, avec force. « Encore un article Business Insider totalement faux. Il ne s’agit pas d’un véritable média », a-t-il lâché, en réponse à un autre tweet. Il y a pourtant des raisons objectives qui pourraient conduire Elon Musk à prendre ses distances avec l’Europe.
Un marché européen perçu comme moins stratégique
D’après le décompte effectué par X, il y a aux alentours de 112 millions d’usagers européens. Cependant, selon les chiffres d’Apptopia, repris par Business Insider, les comptes européens ne représenteraient « que » 9 % de l’ensemble des comptes actifs chaque mois. Par ailleurs, l’usage quotidien de X serait en baisse notable depuis trois mois (de -10 à -40 %) dans la région.
La diminution de l’intérêt de X en Europe — qui existe aussi ailleurs dans le monde, selon Apptopia, à divers degrés — rend de fait ce marché moins capital. Or, celui-ci apparaît aujourd’hui comme celui faisant courir des risques juridiques maximaux, à travers les nouvelles réglementations européennes. En somme, le jeu n’en vaut peut-être pas la chandelle.
Pour prendre le cas du DSA, il existe des mécanismes permettant d’infliger à X des amendes pouvant atteindre jusqu’à 6 % de son chiffre d’affaires mondial. Bruxelles a aussi la possibilité, via ce texte, de déclencher d’autres pénalités, ou de bannir le service d’Europe en cas d’infractions graves et répétées. Du côté du DMA les leviers pour sanctionner ne manquent pas non plus.
Or, les obligations véhiculées par ces textes — notamment sur la transparence et la modération — entrent en collision avec la vision d’Elon Musk pour le réseau social, en particulier sur le terrain de la liberté d’expression, qu’il revendique aussi large que possible. Par le passé, l’entrepreneur américain se présentait comme un militant absolutiste de cette liberté de parole.
Des frictions récentes avec le DSA en toile de fond
Si la réflexion d’Elon Musk sur un retrait de l’Union européenne daterait depuis des semaines, avance Business Insider, les frictions récentes avec Bruxelles au sujet de la guerre entre Israël et le Hamas pourraient servir d’accélérateur. Thierry Breton, le commissaire européen en charge du marché intérieur et du numérique, a pointé du doigt plusieurs réseaux sociaux, et tout particulièrement X.
Le réseau social, qui a quitté le code de bonne conduite sur la désinformation au printemps, a ainsi fait l’objet d’un échange entre Elon Musk et Thierry Breton, teinté d’une mise en garde. Depuis, une enquête formelle a été ouverte dans le cadre du DSA, en raison d’un certain nombre de contenus sur le conflit circulant sur le site, dont certains n’ont rien à voir.
Plus prosaïquement, quitter l’Europe pourrait aussi être motivé pour des raisons de coût. La santé financière de X est chancelante et l’entreprise cherche à dégager des économies, tout en relançant la machine économique qui lui permettrait de gagner de l’argent. Après avoir largement licencié dans son équipe, un autre axe consiste à lâcher les marchés les moins pertinents.
Il reste désormais à voir s’il ne s’agit que d’une réflexion en l’air, sans lendemain. Par le passé, la perspective d’un départ de l’Europe avait été esquissée par Facebook, à quelques reprises. Le réseau social est néanmoins toujours là. Si cela survenait malgré tout, Twitter resterait accessible via un VPN aux USA. Pour les autres, il y aura toujours Mastodon ou Bluesky.
(mise à jour avec la réaction d’Elon Musk)
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