Pour la première fois depuis son arrivée chez Orange en juin 2023, le nouveau directeur de l’innovation de l’opérateur, Bruno Zerbib, s’est entretenu avec des médias. État de la 5G, innovations dans les réseaux, place de la France dans la révolution de l’IA et « réinvention d’Orange »… Les prochains mois s’annoncent chargées.

« La 5G, c’est un échec de communication. » Le nouveau directeur de l’innovation d’Orange, Bruno Zerbib, n’est pas venu à la rencontre de la presse pour faire de la langue de bois.

Le 29 novembre 2023, à l’occasion des journées portes ouvertes Open Tech Days de l’opérateur, Orange a dévoilé plusieurs informations sur sa feuille de route. Livebox 8 qui n’arrivera pas avant plusieurs années, service client dopé à ChatGPT, développement d’extension anti-phising… Le plus puissant des opérateurs français, présent dans plusieurs pays européens et en Afrique, souhaite prouver que l’innovation ne se passe pas qu’aux États-Unis et en Asie. 2024 pourrait être une année importante pour Orange, qui est en « phase de réinvention » selon son directeur de l’innovation.

Bruno Zerbib, le nouveau monsieur innovation d’Orange

Après être passé par la Silicon Valley (Cisco, Yahoo, HP), Schneider et Altice (un employeur qu’il a omis de citer), Bruno Zerbib a rejoint Orange en juin 2023, en tant que « Chief Technology and Innovation Officer ». Sa mission est de préserver la « tradition d’excellence » de l’opérateur historique, qui souhaite se positionner en géant européen des nouvelles technologies. « J’ai rejoint Orange parce qu’on n’a pas besoin d’être dans la Silicon Valley pour innover » a expliqué Bruno Zerbib en amorce de son entretien.

Accompagné de Laurent Leboucher, le CTO d’Orange, Bruno Zerbib a pris la parole pour la première fois en novembre, pour répondre à nos questions. Un des sujets principaux d’Orange en 2024 sera la 5G, qui entrera dans sa seconde phase majeure.

Laurent Leboucher et Bruno Zerbib.
Laurent Leboucher et Bruno Zerbib. // Source : Numerama

La 5G doit devenir la norme en 2024, avec l’arrivée de la 5G SA

Aujourd’hui, la 5G n’est pas encore de la vraie 5G. Puisqu’elle repose sur un cœur de réseau 4G, elle ne profite que des avantages des antennes de dernière génération, avec les limites techniques de l’ancienne norme. Le débit maximal de la 5G, ainsi que sa latence digne de la fibre, ne peuvent pas être atteints sans un cœur de réseau pensé pour la nouvelle génération de réseau. En 2024, Orange va enfin s’y mettre.

« Avec la 5G SA (ndlr : pour stand alone), c’est le cerveau qu’on upgrade. On peut garantir des spécificités techniques, avec de la latence très très faible », explique Bruno Zerbib. Les gens seront-ils intéressés par la 5G SA ? « Au lieu de parler de la 5G SA, on va plutôt parler de cas d’usage. La 5G SA va être déployé de plusieurs façons, on va commencer par le B2B. On peut offrir des garanties aux industriels. »

Comment vendre la 5G SA au grand public ? « Elle ne s’appellera pas forcément 5G+, d’un point de vue du consommateur ». Bruno Zerbib semble vouloir miser sur la continuité de la 5G, même si la décision finale d’Orange n’a pas été prise. Dans d’autres pays, Orange parle bien de « 5G+ », ce qui laisse supposer qu’il pourrait malgré tout s’agir de son choix final en France. Parmi les usages mis en avant : le cloud gaming, enfin aussi stable dehors qu’à la maison.

5G Orange
Orange a lancé la 5G en 2020, mais son arrivée était moins spectaculaire que la 3G, la H+ ou la 4G. // Source : Orange

Trois ans après le lancement de la 5G en France, où en est-on ? Bruno Zerbib admet plusieurs erreurs d’Orange. « Il y a eu un vrai backlash autour de la 5G. Les gens se sont dits qu’ils avaient assez de bande passante avec la 4G. Il y a plein de dimensions avec la 5G qui ont été mal comprises. ». Pour Bruno Zerbib, le problème n’a jamais été la technologie mais la manière de la vendre : « La 5G, c’est un échec de communication. »

Dans un premier temps, Orange a fait le choix de positionner la 5G comme un « produit premium », comme en atteste son indisponibilité chez Sosh jusqu’en 2023. En 2024, Orange devrait rompre avec cette stratégie. « On bascule petit à petit sur la 5G pour tout le monde. Le plus important, c’est d’avoir un équipement compatible ». Il se trouve que son rival Bouygues Telecom a ajouté la 5G dans tous ses forfaits en novembre.

Une box sous Android TV : même « pas peur »

Autre sujet brièvement évoqué avec Bruno Zerbib : le lancement d’un nouveau décodeur Orange en Pologne, sous Android TV. Un produit dont le lancement en France est fortement attendu, puisqu’Orange n’a pas actualisé sa box UHD depuis 2018.

En France, le futur décodeur d’Orange utilisera-t-il le système d’exploitation de Google ou un OS maison et souverain, comme Orange nous y a habitué ? « Sur certains sujets, on pense qu’il n’y a pas de débat. Utiliser Android pour faire de la télé, ce n’est pas un sujet qui nous fait peur » répond Bruno Zerbib quand Numerama lui demande si Orange France peut sortir un décodeur sous Android TV. De quoi imaginer que le produit polonais arrivera bel et bien en France en 2024.

Sur la télécommande du nouveau décodeur Orange, il y a un bouton Google Assistant.
Sur la télécommande du nouveau décodeur Orange, il y a un bouton Google Assistant. // Source : Orange Pologne

L’intelligence artificielle française ? Le souverainisme modéré d’Orange

Pour le nouveau directeur de l’innovation d’Orange, le secteur des nouvelles technologies est en pleine transformation. « Je ne pense pas nécessairement qu’il y aura une 6G, on est dans une époque d’évolution continue » prédit-il, en prenant notamment l’exemple de l’intelligence artificielle. « On est en train de vivre un moment de rupture technologique qui change absolument tout ».

Orange peut-il rivaliser avec OpenAI, comme Xavier Niel souhaite le faire avec Kyutai ? Si Bruno Zerbib se dit admiratif de l’initiative du patron de Free, sa vision n’est pas celle du souverainisme à tout prix. « Est-ce qu’on peut avoir des solutions uniquement françaises ? La réponse est non. Les chipsets par exemple, on ne sait pas les faire. Le souverainisme a un aspect positif sur le contrôle de la data, sur la protection des données, sur l’utilisation… Sur d’autres sujets, on pense qu’il n’y a pas de débat ».

« Si vous investissez 1 dollar sur l’IA générative, vous aurez 10 centimes en retour. On a la responsabilité de ne pas faire n’importe quoi avec nos investissements ». Orange n’aura pas honte d’utiliser les modèles des autres, open source ou non, en les personnalisant avec du contenu Orange. « Est-ce qu’on a envie d’avoir une version française ? Absolument ». Mais pas à n’importe quel prix.

Find prend la forme d'un champ texte en haut du moteur de recherche interne d'Orange.
Orange travaille sur une évolution de son moteur de recherche interne avec du texte généré par GPT-4. // Source : Numerama

Quand auront lieu les prochaines grandes conférences d’Orange ? « Sur l’innovation, on a des trucs très clairs qui arrivent. Je pense que vous allez voir tous les six mois des choses qui valent le coup. Le nouvel Orange, c’est pas un Orange qui disparaît pendant trois ans et qui revient un grand soir ». Rendez-vous en 2024.

visuel_fibre_adsl2

Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci

Il y a une bonne raison de ne pas s'abonner à

Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.

Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :

  • 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
  • 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
  • 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.

Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.

S'abonner à Numerama+

Marre des réseaux sociaux ? Rejoignez-nous sur WhatsApp !