Depuis près de 2 ans, on voit tourner sur les réseaux sociaux les images de simples drones de commerces ukrainiens lâchant des grenades sur des tanks russes. Aujourd’hui encore, alors que les deux armées stagnent sur leurs positions, les drones continuent à traverser les lignes de front et menacent les bases arrière. Les journalistes de Forbes ont raconté le 6 décembre 2023 être tombés sur l’un des rares rapports en source ouverte portant sur des défauts de l’armée du Kremlin. Il permet de mieux comprendre ce phénomène de « passoire » russe.
Publié en 2020 par le professeur Sergey Makarenko, de l’université électrotechnique de Saint-Pétersbourg, ce dossier de 193 pages, intitulé « Contrer les véhicules aériens sans pilote », détaille les capacités russes à bloquer les menaces de drones.
L’équipement russe actuel est lourd et fortement armé. L’arsenal anti-aérien est composé du Pantsir, qui combine canons et missiles, des Toungouska sur chenille, et du Tor, doté de huit missiles à guidage radar. Pour les courtes portées, on trouve sur le front des véhicules Strela-10 ou encore des lance-roquettes Igla-S que les soldats portent sur l’épaule.
Tous ces systèmes doivent former un bouclier tactique dense, capable de stopper avions, hélicoptères et missiles, mais aucun de ces engins ne s’est montré à la hauteur face à des drones.
Dans son rapport, Sergey Makarenko avait prévenu la Russie que ce bouclier d’acier serait trompé par de plus petits engins. « Les caractéristiques de haute performance des systèmes de défense anti-drone indiquées par les développeurs ne sont pas entièrement confirmées dans la pratique », glisse le chercheur dans son rapport. Il décrit même au fil des pages l’incapacité d’atteindre ces engins réduits.
Ces remarques se sont rapidement vérifiées, puisque des militaires ont même filmé leur fuite en Pantsir une fois que des drones se dirigeaient vers eux.
Des radars de l’armée russe peu adaptés aux petits drones ukrainiens
Le principal souci technique réside dans les capacités des radars militaires à détecter des drones. Les appareils russes sont conçus pour détecter des avions de chasse, pas de petits appareils qui se déplacent lentement. Sergey Makarenko explique, par exemple, que « l’expérience pratique des tirs expérimentaux sur de petites cibles [avec Tor] indique des erreurs importantes dans le suivi des cibles et le guidage sur les drones de petite taille ». C’est exactement ce que l’on peut voir avec ce tir d’un Tor qui passe à côté d’un drone qui le filme.
« Trois tonnes de munitions » pour abattre un drone
Les Russes seraient donc incapables de repérer un drone à moins qu’il ne soit pratiquement au-dessus d’eux. Pire, les engins tels que les Tunguska vident des stocks entiers pour abattre un drone. « Il est nécessaire de dépenser entre 4 000 et 13 000 projectiles pour atteindre un mini-drone », note le rapport. Soit près de trois tonnes de munitions, estiment les journalistes de Forbes. Quant à la détection thermique, celle-ci ne fonctionne pas non plus sur des drones qui décollent grâce à des hélices et une petite batterie.
La Russie a encore perdu en novembre un nombre important de véhicules blindés. L’armée ukrainienne affirme avoir détruit 132 engins le mois dernier. Les analyses militaires suggèrent que ce nombre pourrait être encore plus important.
Néanmoins, ces drones de commerce restent encore fragiles face à de simples tirs de fusils. Et il faudrait encore beaucoup d’appareils pour vaincre les quelque 400 000 soldats russes présents sur le sol ukrainien.
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