La prédiction sur laquelle devaient plancher les experts était la suivante :
En 2014, ça sera toujours le cas qu’une vaste majorité d’internautes pourront facilement copier et distribuer librement des produits numériques à travers des réseaux peer-to-peer anonymes.
50% des experts sondés se sont dits en accord avec cette prédiction, 23% sont contre, 10% la contestent (dans sa formulation), et 17% n’ont pas répondu.
Les avis sont ainsi extrêmement partagés, comme le montre cette page passionnante où l’on pourra lire les commentaires d’un grand nombre des professionnels sondés. A leur lecture, quelques groupes se dégagent.
Il y a bien sûr ceux qui défendent corps et âme la protection du droit d’auteur et croient que la technique a réponse à tout, et saura d’ici 10 ans mettre fin au piratage. Johnathan Band, avocat à Morrison & Foester, est de ceux-là : « Je pense que les obstacles techniques, tels que les systèmes de gestion des droits numériques (DRM), vont l’empêcher« . Rêve du juriste qui n’y comprend rien aux réalités techniques ? Bob Metcalfe, connu pour être l’inventeur de l’Ethernet, est pourtant du même optimisme. « Nous devons réparer ce problème et donc nous le ferons« , assure-t-il. « La propriété privée est un outil économique d’une valeur trop importante« .
A l’opposé, un groupe de sondés qui souhaitent que le P2P continue de se développer et devienne l’outil de diffusion de la connaissance qu’on lui promet. Gary Kreps, chercheur à l’institut national contre le cancer se dit (le mot est fort) « confiant que le mouvement vers un plus grand accès aux produits numériques, à la fois scientifiques et artistiques, va continuer de grandir« . Mike Weisman, du mouvement Reclaim The Media, considère que le partage de fichiers est « l’une des caractéristiques qui donnent une valeur ajoutée à Internet« . « Ca ne peut pas être combattu à travers le logiciel ou le DRM, et je n’ai jamais compris pourquoi ils essayent« , ajoute-t-il.
En marge de ces deux antithèses que l’on ne connaît que trop bien, certains poussent la réflexion plus loin et apportent des visions intéressantes. C’est le cas notamment de Susan Crawford, juriste et professeur spécialisée en droit des technologies et sur son impact sur la société, qui pense que « l’anonymat n’est pas quelque chose que nous continuerons à chérir« . « Pour créer de la confiance, nous avons besoin de savoir quelque chose à propos de l’autre – nous devons avoir des identités persistantes (même si pseudonymes) […] Donc l’anonymat pourrait cesser d’être possible, mais la pseudoanonymité va prospérer« . Stanley Chodorow, de l’Université de Californie, a également une vision intéressante des choses : « Avec le temps – plus longtemps peut-être que les 10 années demandées dans le questionnaire – les gens commenceront à voir Internet comme partie intégrante de la société et non comme un territoire sauvage au-dessus de la civilisation, où tout peut se passer. A mesure que ce changement de vue s’opérera, les gens vont commencer à obéir à des règles qui réduisent substantiellement le vol qui se déroule maintenant« . Une sorte de contrat social à la Jean-Jacques Rousseau, adapté au P2P et au droit d’auteur…
Et puis il y a les pragmatiques, qui pensent à l’image de la professeure de Harvard Alexandra Samuel que « la seule question est de savoir si les industries créatrices de contenu seront capables de développer des offres de produits et des modèles économiques qui seront plus tentants que le partage de fichiers« . Car, quelles que soient les mesures techniques prises, « il y a aura toujours un développeur indépendant de logiciel et des hackers capables de contourner quelque obstacle technique que ce soit« .
Enfin, et c’est probablement le groupe avec lequel Ratiatum est le plus proche, il y a ceux qui pensent que le P2P n’est qu’une technologie, et que c’est en fait une grande partie du modèle économique et juridique du droit d’auteur qui doit évoluer. « Ca ne se passera certainement pas avant 2014« , considère un des experts, resté anonyme…
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