Porter un casque de réalité virtuelle pour communiquer avec des amis à distance, voilà un usage qui ne m’a jamais convaincu.
Meta tente d’imposer l’idée de métavers depuis plusieurs mois, mais j’ai souvent eu l’impression d’être bête en me rendant dans des applications comme Horizon Worlds ou VR Chat (le second a d’autres avantages, pour jouer notamment). Même si l’Apple Vision Pro me rend enthousiaste, j’ai la conviction depuis le premier jour de mon test qu’il s’agit d’un appareil à utiliser seul, non adapté aux conversations ou à la vie en société.
Et puis Apple a lancé les « Spatial Persona ». Depuis le 2 avril, il est possible de réaliser des appels FaceTime en 3D en portant le fameux ordinateur spatial. J’étais sceptique, j’ai passé une heure avec d’autres propriétaires du Vision Pro (les YouTubers Léo Duff et TheiCollection) et je suis désormais beaucoup moins critique. L’expérience était suffisamment convaincante pour me donner l’impression d’avoir passé du temps avec mes amis, qui n’étaient pourtant pas dans la même pièce que moi.
Des avatars ultra-réalistes, grandeur nature, qui se déplacent chez moi
Première chose à savoir : les Spatial Persona ne sont pas finalisés. Il s’agit d’une fonction à activer manuellement, lors de chaque appel FaceTime, qu’Apple présente bien comme une « beta ». Par défaut, un correspondant FaceTime, qu’il porte un casque ou non, est dans un cadre carré, que l’on peut déposer dans l’endroit de son choix (et redimensionner). Le Spatial Persona abolit ce cadre et permet à son correspondant de récupérer sa taille réelle.
Avec Léo et JB (TheiCollection), nous avons tenté l’expérience.
Quand les Spatial Persona sont activés, les options classiques d’un appel FaceTime disparaissent. Mes interlocuteurs sont apparus au milieu de mon salon, comme s’il s’agissait de fantômes (on peut voir au travers). Il m’est impossible de les déplacer ou de changer leurs tailles, puisque ce que je vois correspond à leurs réalités. Une personne debout apparaît plus haut qu’une personne assise, tandis que les mouvements dans une pièce sont retranscrits en temps réel dans ma réalité. Tout le monde voit la même chose, si Léo regarde JB, je le vois regarder JB (c’est Apple qui calcule automatiquement les espaces, pour créer une situation réaliste).
En un peu plus d’une heure d’appel, ce qui m’a surpris est la qualité de l’échange. Aucun lag, aucun problème de synchronisation, nous nous sommes comportés comme dans le vrai monde. Les appels FaceTime classiques étaient peu convaincants jusque-là dans le Vision Pro, ils sont désormais bluffants. Je jurerai que la personne qui me parle me regarde et je me retourne normalement quand on me montre quelque-chose. Le rendu sonore en 3D, qui permet à la personne à gauche de se faire entendre à gauche, contribue à l’expérience.
J’ai vraiment passé une heure à parler et à rigoler tout seul, sans m’en rendre compte.
Peu friand des expériences similaires dans le Meta Quest, je ne m’attendais à rien avec les Spatial Persona. J’en ressors impressionné, puisque la justesse des graphismes et de la gestion des espaces rendent l’expérience plausible.
L’absence de corps : Apple doit résoudre ça
Évidemment, tout n’est pas parfait.
Le premier défaut saute aux yeux : un Spatial Persona n’est qu’une tête, un buste et des mains. Il semble évident qu’Apple doit résoudre ce problème en permettant à ses avatars 3D d’imiter le reste du corps. J’aimerais voir les vêtements de mes amis (ou une représentation semblable, avec les mêmes couleurs), leurs jambes quand ils sont debout ou les voir s’assoir sans avoir à le deviner moi-même, en me basant sur la position de leurs têtes. Meta, avec ses avatars sans jambes, est aussi critiqué.
Dans le même genre, les Spatial Persona omettent de la représentation 3D certains objets. Quand JB a répondu à un message sur son iPhone, Léo et moi nous sommes amusés de le voir taper dans le vide. Le Vision Pro a pourtant la puissance nécessaire pour modéliser un smartphone en temps réel.
Enfin, j’aimerais avoir plus de flexibilité lors des appels entre deux personnes. Aujourd’hui, c’est Apple qui détermine l’emplacement du correspondant, alors qu’il serait techniquement possible de l’assoir sur le fauteuil en face de moi. À plusieurs, je comprends le problème (il faut que tout le monde soit à équidistance). À deux, l’utilisateur devrait pouvoir choisir.
Discuter, regarder un film, jouer aux dés… L’impression d’y être
Pendant notre heure spatiale, nous avons :
- D’abord discuté, pour tenter de décortiquer le fonctionnement des appels 3D.
- Exploré des environnements 3D, pour voir la manière dont apparaissent les Spatial Persona.
- Regardé la bande-annonce d’une série (Franklin, sur Apple TV+) à plusieurs, en étant côte à côte, comme si nous étions sur un canapé.
- Partagé quelques apps, pour voir ce qui était partagé à plusieurs (les contenus 3D ne le sont pas, étrangement).
- Joué aux dés avec Game Room, une application qui permet d’émuler des jeux de société virtuellement, en réalité augmentée.
Le jeu de dés était, sans doute, la démonstration la plus intéressante. Grâce aux Spatial Persona, je pouvais voir mes amis attraper les dés, les jeter ou interagir avec la table. Leurs mains apparaissaient devant moi, tandis que j’avais l’impression d’être en face d’eux. Je n’ai jamais vu une aussi grande immersion lors d’une simulation, fous rires compris.
Une soirée à 11 000 dollars
Après une heure à la rencontre d’autres Spatial Persona, mon avis sur l’intérêt d’un appel avec un casque VR a quelque peu évolué. Je reste sceptique sur mon envie de le faire régulièrement, mais je comprends parfaitement l’intérêt dans certains cas, notamment pour regarder un match à plusieurs ou jouer avec un ami à une longue distance.
Évidemment, je n’oublie pas un point important : une telle configuration est très coûteuse. À 3 500 dollars, l’Apple Vision Pro est un produit encore très élitiste, qui mettra quelques années à débarquer dans nos foyers (il n’est toujours pas disponible en France). Je me demande d’ailleurs pourquoi les Spatial Persona n’étaient pas disponibles dès le premier jour, alors qu’ils sont nettement plus convaincants que les appels FaceTime classiques.
Un appel FaceTime 3D sera-t-il normal dans le futur ? Peut-être, mais la route est encore très longue. Apple a enfin prouvé l’intérêt de ses Persona, mais il lui faudra en faire plus pour convaincre le grand public.
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