Alors que le groupe estime que ça pourrait l’aider à diminuer ses coûts de distribution des vidéos, M6 se voit interdire par les producteurs d’utiliser des protocoles P2P même propriétaires pour diffuser les contenus de son service de vidéo de rattrapage M6 Replay. Une situation semblable pour tous les services de vidéo à la demande.

Une discussion très intéressante a vu le jour en cette fin de semaine sur la liste de diffusion du French Network Operators Group (FRnOG), bien connue des professionnels et amateurs éclairés des réseaux de télécommunications. La liste vise à faciliter « l’échange d’informations et plus généralement une meilleure communication entre les entreprises ou associations qui font l’Internet en France« . C’est dans ce cadre qu’un membre s’est demandé pourquoi l’utilisation de M6 Replay sur son réseau Bouygues Telecom le conduisait à récupérer les vidéos de la chaîne française sur un serveur situé aux Etats-Unis. La discussion a rapidement tourné vers l’incompréhension de la technologie par les ayants droit.

L’un des membres constate d’abord que M6 Replay utilise, pour sa version web, un réseau de distribution de contenus (CDN) externe qu’il doit nécessairement payer, mais qu’il n’a « pas envie d’avoir son propre CDN« . C’est l’appel à ce prestataire externe qui fait que des contenus français adressés aux seuls Français sont hébergés aux Etats-Unis, par le jeu de la concurrence sur les prix de la bande passante.

« On serait ravi de mettre en place notre propre CDN avec du peering (gratuit ou payant) là où on peut pour soulager les FAIs et optimiser nos dépenses« , assure alors Martin Boronski, le directeur technique du groupe M6 Web. « Le problème c’est qu’un service comme M6 Replay nécessite pas mal de Gbps. On avait simulé l’année dernière un tel scénario, mais à 35K€ / 10G, ça restait bien plus cher que de passer par un CDN« , raconte-t-il. « Si les conditions ont évoluées, on est à la disposition des FAIs pour avancer en top priorité sur un tel scénario« .

– « Est-ce que vous avez regardé du côté des technologies de streaming en P2P? Ça semble prometteur, surtout s’il y a du serveur un peu costaud derrière pour garantir le débit…« , demande Rémi Bouhl, un intervenant régulier de la liste FRNog. Il y a quatre ans, M6 avait été parmi les tous premiers clients de 1-Click Media, une société française spécialisée dans le streaming en P2P.

« Tout à fait d’accord avec vous, c’est très prometteur« , répond Martin Boronski. « Le problème est que c’est interdit par nos ayants droits :-( On doit se contenter de technologies classiques comme Flash ou Silverlight. Malheureusement, nous n’avons pas trop le choix (…) J’ai en tête une réduction de ~ 30% du transit lorsqu’on utilise du P2P. Si c’est aussi le taux de perte financière en perdant certains de nos contenus, ça n’a plus de sens. »

Bien que certains protocoles P2P permettent eux-aussi de sécuriser le transport des données et de rendre plus difficile la copie, les ayants droit restent allergiques à toute solution qui n’est pas étroitement contrôlée et centralisée. Même lorsque ça n’a aucun sens économique ou technologique. Tous les contenus audiovisuels sont copiables et copiés, y compris lorsqu’ils sont diffusés en Flash ou avec Silverlight.

Pierre-Yves Kerembellec, de Dailymotion, va dans le même sens. « Ce n’est clairement pas simple de rassurer les ayants-droits« , constate-t-il au sein du concurrent français de YouTube. Mais il se veut optimiste pour l’avenir. « Avec l’avènement de la balise vidéo dans HTML5 par exemple, ainsi que du streaming sur mobiles, il va bien falloir trouver des solutions qui les rassurent tout autant« . Il pronostique cependant le retour des DRM au coeur des contenus.

Alors que le débat sur la sécurité s’était déplacé vers les tuyaux, il estime en effet que « la sécurité va se déplacer du canal de distribution au contenu lui-même« .

« Les nouvelles méthodes de diffusion (HTTP chunks + adaptive streaming) qui sont peu à peu en train de remplacer les protocoles propriétaires pour des raisons de coûts de licences serveurs et d’efficacité de cache dans l’infrastructure Internet d’aujourd’hui vont nécessairement faire revenir les mesures de sécurité sur le contenu (encryption AES128 des payload contenannt les keyframes vidéo, encryption d’un paquet audio sur n pour rendre la bande son insupportable à écouter, etc …), avec récupération des clés out-of-band par le client, selon un protocole variable (SSL dans le cas d’Apple HTTP LIve Streaming, SSL + certificats individuels dans le cas d’Adobe Flash Access 2, etc.)« .

Probablement aussi obscur pour le quidam qu’inefficace à terme. Car on ne pourra jamais empêcher que ce qui apparait sur un écran et ce qui sort sur des enceintes puisse être copié et reproduit. La seule stratégie efficace est de mettre au point des services suffisamment attractifs et souples pour faire disparaître le besoin de réaliser des copies. Mais c’est la stratégie qui demande le plus d’imagination et de courage.

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