Double écran OLED d’une luminosité incroyable, finesse de tous les records, processeur Apple M4 surpuissant, Magic Keyboard presque aussi bon que le clavier d’un MacBook… Sur le papier, l’iPad Pro de 2024 est le produit le plus avancé d’Apple. Mais son système d’exploitation et ses applications manquent encore de maturité.

Presque deux ans après son précédent renouvellement, l’iPad Pro est de retour. La génération 2024 de la tablette est une évolution majeure, avec un rafraîchissement de design pour la première fois depuis 2018. Le nouvel iPad Pro est le produit le plus fin de l’histoire d’Apple (5,1 millimètres pour la version 13 pouces), dispose du meilleur écran OLED du marché (pour son gabarit) et s’accompagne de nouveaux accessoires bien plus performants, qui prouvent qu’Apple sait écouter les remarques de ses utilisateurs. Il est aussi le premier iPad à introduire une nouvelle puce Apple Silicon, la M4, qui pourrait s’avérer cruciale dans la guerre de l’intelligence artificielle.

D’un point de vue matériel, et comme souvent ces dernières années, l’iPad Pro est irréprochable. Il permet à Apple de tester de nouvelles technologies avant de les généraliser dans les MacBook et les iPhone, ce qui en fait un appareil plus que plaisant au quotidien. On ne peut néanmoins s’empêcher de se mordre les doigts sur certains aspects, notamment logiciels, qui continuent de rendre l’expérience un peu trop contraignante.

Tandem OLED, finesse et Magic Keyboard : le trio gagnant

Avec son tarif d’entrée de 1 219 euros (1 569 euros pour le modèle 13 pouces testé ici), le nouvel iPad Pro n’a pas le droit à l’erreur.

Cette augmentation de prix se justifie par l’ajout de technologies jamais vues ailleurs, comme l’écran « Ultra Retina XDR » d’Apple, que l’industrie qualifierait plus simplement d’écran « OLED en tandem ».

Pour la première fois, une tablette Apple a le droit à une dalle avec des noirs vraiment noirs, ce qui change tout dans l’expérience. On a l’impression d’avoir un téléviseur haut de gamme portatif, avec une luminosité inédite pour un écran OLED de cette taille. La juxtaposition de deux écrans OLED, qui multiplie les coûts de production par deux, permet à Apple de surpasser l’excellente Galaxy Tab S9 Ultra de Samsung, tout en offrant une qualité similaire à celle d’un iPhone 15 Pro Max, qui est aidé par sa plus petite taille (moins de perte de lumière).

Cette démo de l'OLED par LG, pour ses téléviseurs, est impressionnante sur iPad. Le contraste entre les couleurs et le noir est phénoménal.
Cette démo de l’OLED par LG, pour ses téléviseurs, est impressionnante sur iPad. Le contraste entre les couleurs et le noir est phénoménal. // Source : Numerama

En comparaison de l’écran du précédent iPad Pro, qui utilisait une dalle Mini-LED, l’écran OLED fait mieux à tous les niveaux. Les couleurs sont plus vives, le taux de contraste est infini, il n’y a plus de fuites de lumière… Apple a enfin un écran parfait, que l’on a hâte de voir débarquer dans des MacBook Pro. Autre bonne nouvelle : le petit modèle de 11 pouces a aussi droit à l’OLED, alors qu’il n’a jamais connu le Mini-LED.

Les écrans OLED manquent souvent de luminosité, mais celui de l'iPad Pro M4 est parfaitement visible sous les reflets du soleil. // Source : Numerama
Les écrans OLED manquent souvent de luminosité, mais celui de l’iPad Pro M4 est parfaitement visible sous les reflets du soleil. // Source : Numerama

Le reste du matériel est tout aussi bluffant. La finesse de l’iPad Pro 13″, qui n’excède désormais pas 5,1 millimètres, a quelque chose de paranormal. On comprend pourquoi Apple compare sa tablette à une feuille de verre, puisque la tablette donne vraiment cette impression.

Néanmoins, on ne peut s’empêcher de s’interroger sur l’obsession d’Apple pour la finesse. Personne ne s’est jamais plaint de l’épaisseur des précédents modèles, ce qui nous amène à nous demander si repenser tout l’intérieur du produit était vraiment nécessaire. Heureusement, l’autonomie est la même qu’avant, avec assez de batterie pour tenir une journée entière sur une utilisation intensive (mais la gestion de la veille est toujours moyenne, avec le risque de retrouver l’iPad déchargé au bout de quelques jours sans branchement). Nous n’aurions pas été contre un demi-millimètre de plus, pour deux heures de batterie bonus.

L'iPad Pro est si fin qu'il n'est pas facile à photographie.
L’iPad Pro est si fin qu’il n’est pas facile à photographier. // Source : Numerama

Enfin, l’autre point fort de cette génération tient dans ses nouveaux accessoires. Il y en a trois :

  • Le nouveau Magic Keyboard est, sans doute, la meilleure nouveauté. Plus grand et en aluminium, il donne l’impression d’utiliser un MacBook. La sensation de frappe est meilleure, le trackpad envoie des retours haptiques et la barre de fonctions permet de régler le volume et la luminosité rapidement. Il coûte cher (350-400 euros), mais reste un incontournable sur iPad Pro. Seul défaut : le poids de l’iPad le fait souvent basculer en arrière, ce qui oblige à le poser délicatement sur une table.
  • Le Smart Folio, à 119 euros, est la meilleure coque officielle pour iPad depuis la première Smart Cover (iPad 2). Ultra fine, elle permet de choisir l’angle d’inclinaison de son choix sans dénaturer le design du produit.
  • L’Apple Pencil Pro, même s’il n’est pas fait pour tout le monde, est le premier stylet amusant à utiliser. Capable d’émettre des vibrations (une prouesse vu la taille du moteur), il devient plus pratique pour écrire, dessiner ou jouer (on a apprécié faire des sudokus avec, en utilisant l’appui long pour changer de mode de jeu). On adore l’ombre numérique ajoutée par Apple, qui aime jouer avec les détails.
L'ombre sur l'écran est fausse, c'est une réplique numérique.
L’ombre sur l’écran est fausse, c’est une réplique numérique. // Source : Numerama

Ces accessoires n’ont qu’un défaut : ils utilisent des connecteurs différents de ceux des précédentes générations. Les propriétaires d’un iPad Pro M1 ou M2 n’ont pas d’autre choix que d’acheter un nouveau clavier et un nouveau Pencil Pro… Ces changements s’expliquent par la finesse de l’iPad Pro et l’emplacement de la webcam, désormais disposée à l’horizontale. Il a fallu tout déplacer.

iPadOS a besoin de gros changements

D’un point de vue matériel, l’iPad Pro M4 s’approche de la perfection. Il a néanmoins un défaut : comme son nom l’indique, il s’agit d’un iPad.

La tablette d’Apple, quatorze ans après son arrivée sur le marché, n’a toujours pas trouvé de raison d’être. iPadOS, son système d’exploitation, en est la preuve ultime. Cette version dérivée du système de l’iPhone, avec quelques fonctions piquées aux Mac, est coincée depuis des années dans un entre deux qui ne le rend meilleur en rien. La marque voit l’iPad comme un appareil complémentaire, ce qui limite fortement l’intérêt d’un tel hardware, particulièrement à 1 500 euros.

Le mode Stage Manager permet d'utiliser plusieurs fenêtres comme sur Mac… mais manque de praticité. Les fenêtres se perdent facilement.
Le mode Stage Manager permet d’utiliser plusieurs fenêtres comme sur Mac… mais manque de praticité. Les fenêtres se perdent facilement. // Source : Numerama

Malgré sa puce M4, son trackpad et son clavier, l’iPad Pro n’est pas un Mac. Numerama s’en est particulièrement rendu compte en travaillant avec pendant plusieurs jours : rien que Safari, son navigateur web, n’est pas optimisé pour un travail d’écriture. Les copier-coller fonctionnent mal, le glisser-déposer est capricieux, les suggestions d’auto-correction apparaissent au mauvais endroit, l’application Fichiers n’a pas la souplesse du Finder… Ne parlons même pas de la gestion des écrans externes, qui font souvent bugger le clavier et le trackpad. Preuve de notre frustration : nous avons commencé la rédaction de ce test sur notre iPad Pro de test, nous l’avons fini sur un MacBook Air.

Du côté des applications, des logiciels comme Photoshop et Final Cut Pro, ultra-complets sur Mac, manquent de simplicité sur iPad (il n’y a pas de raccourcis clavier dans Photoshop par exemple, ni de glisser-deposer). Certains logiciels, comme Instagram, WhatsApp ou Xcode pour les développeurs, n’existent pas du tout sur la tablette, ce qui force à utiliser son iPhone ou son Mac occasionnellement.

Niveau pro, l'iPad Pro M4 fait au moins bien une chose : les appels vidéo. La webcam du bon côté, c'est un vrai avantage.
Niveau pro, l’iPad Pro M4 fait au moins bien une chose : les appels vidéo. La webcam du bon côté, c’est un vrai avantage. // Source : Numerama

Pour regarder un film ou naviguer sur les réseaux sociaux, l’iPad Pro est sans le moindre doute le meilleur appareil du marché. Mais, dès qu’il faut travailler, iPadOS crée trop de contraintes sur certaines tâches pourtant banales en informatique. Le temps perdu est trop grand pour que l’on puisse recommander l’iPad Pro comme remplaçant d’un MacBook, à moins d’avoir des besoins purement créatifs, qui nécessitent par exemple un Pencil. On attend énormément d’iPadOS 18 qui, avec plus de flexibilité, pourrait sublimer l’expérience utilisateur.

Apple M4 : les modèles de langage d’Apple seront-ils la pièce secrète ?

En parlant d’iPadOS 18, une des grandes promesses de la puce M4 est son nouveau Neural Engine (NPU), capable de réaliser jusqu’à 38 000 milliards d’opérations par seconde selon Apple.

Les benchmarks réalisés par Numerama montrent une vraie montée en puissance, même si rien n’en profite vraiment dans l’expérience utilisateur.

iPad Pro M2MacBook Air M3iPad Pro M4
Geekbench 6 – CPU Single2 6073 0173 736
Geekbench 6 – CPU Multi3 73611 29114 585
Geekbench 6 – GPU45 13546 31853 647
Geekbench 6 – ML7 4209 379

En attendant les tests des IA de la marque, Numerama a utilisé le logiciel LLM Farm pour réaliser des mesures théoriques.

La génération d’inférences avec un modèle de langage est quasiment deux fois plus rapide avec une puce M4 (par rapport à une puce M2), ce qui est plutôt prometteur. Mais, en l’état, cette surpuissance n’est pas exploitée. Les modèles locaux que nous avons testés sont plein d’hallucinations, puisqu’ils ne sont pas optimisés pour un iPad. Apple devra réussir à convaincre avec iPadOS 18, en réglant ce problème.

iPad Pro M2iPad Pro M4
LLM Farm – Mistral 7B5,01 tokens/s9,14 tokens/s
LLM Farm – TinyLlama (1,1B)14,62 tokens/s27,47 tokens/s

Pour l’instant, l’iPad Pro n’est qu’un grand iPhone suréquipé. Espérons qu’Apple soit en mesure de lui donner plus de sens.

Le verdict

Pour regarder un film dans un avion, programmer ses prochaines vacances affalé dans un canapé ou prendre des notes manuscrites, l’iPad Pro M4, notamment grâce à son splendide écran OLED, n’a pas d’équivalent sur le marché. La génération 2024 de la tablette haut de gamme accentue l’avance d’Apple sur la concurrence, en adressant tous les problèmes précédemment évoqués par les utilisateurs. Le nouveau Magic Keyboard, notamment, est ce que les propriétaires d’iPad attendent depuis des années. Même chose pour l’Apple Pencil Pro, qui est bien plus qu’un stylet. On s’incline aussi volontiers devant la finesse du produit, qui rend le nouvel iPad Pro un peu plus proche des concepts de science-fiction.

Le problème de l’iPad Pro est, qu’à 1 569 euros minimum pour la version 13 pouces (2 117 euros avec clavier et Pencil Pro), le consommateur est en droit d’exiger une expérience digne d’un ordinateur (le MacBook Pro débute à 1 999 euros). Si l’iPad Pro est meilleur sur quelques aspects (écran OLED tactile, finesse, 5G), l’expérience logicielle peine à répondre à l’exigence des professionnels. Ce n’est pas la faute du produit, mais d’iPadOS, qui est toujours coincé entre iOS et macOS. Apple a la capacité de faire de son iPad Pro un produit vraiment parfait (et capable d’exploiter la puce M4), mais se contente pour l’instant de briques pas toujours simples à utiliser. Le matériel mérite un 10/10, le logiciel descend à 6/10 dès qu’on teste ses limites pour travailler. Autrement, il n’y a pas grand-chose à dire sur le savoir-faire d’Apple : l’iPad Pro est la bête qu’il pense être, mais n’est pas un aussi bon rapport qualité-prix qu’un iPad Air ou un iPad 10.

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