Ils étaient réunis samedi à Pékin, sur l’immense scène du Capital Stadium transformée pour l’occasion en disque géant. Environ 100 célébrités du monde de la musique chinoise, réunis par le gouvernement et les associations d’artistes et de producteurs pour apporter leur contribution à l’effort du pays dans la lutte contre le piratage.
Longtemps ignorée par les autorités chinoises, la propriété intellectuelle est devenu un enjeu majeur de développement pour le pays communiste, qu’elle touche le droit d’auteur ou les brevets. La contrefaçon est là bas une véritable économie parallèle contre laquelle il est difficile de lutter. En 2004, ce sont 200 lignes de production de CD contrefaits qui ont été arrêtées ; de quoi produire tous les ans des milliards de disques pour lesquels ni les artistes ni les producteurs ne touchent le moindre yuan. L’IIPA (Alliance pour la Propriété Intellectuelle Internationale) considère que les entreprises américaines ont perdu 2,6 milliards de dollars en 2003 dans le piratage chinois, et le phénomène touche tous les secteurs, de la musique jusqu’aux sacs à main en passant par les produits pharmaceutiques et autres jeux-vidéo.
L’anti-piratage devient une grande messe populaire
Pour la Chine, il faut désormais montrer patte blanche. Le pays veut entrer dans le jeu du marché mondial, et doit faire montre de volonté dans la lutte contre la contrefaçon. « Si Pékin ne parvient pas à résoudre le piratage rapidement, nous ne mériterons pas de recevoir les Jeux Olympiques en 2008« , prévient ainsi Feng Xiaogang, un industriel chinois désormais à la tête de la protection du droit d’auteur. Il précise que si toute la population regarde des films piratés, les films chinois seront bannis du marché mondial.
Car c’est ainsi que les choses fonctionnent en matière de propriété intellectuelle. Les spécialistes appellent ce procédé la réciprocité. On pourrait parler de chantage économique.
Un pays qui refuse d’accorder des droits aux productions étrangères sur son territoire ne bénéficie pas de la protection de ses propres œuvres à l’étranger. Si la Chine veut que ses films soient distribués aux Etats-Unis ou en Europe, elle doit s’assurer que les films américains et européens sont suffisamment protégés en Chine. Et peu importe que la population chinoise soit trop pauvre pour s’offrir la culture à prix occidentaux.
Un CD légalement distribué coûte environ 200 yuans (18 euros). Un CD piraté, 10 yuans, à peine un euro.
Du coup, les grands moyens sont mis en œuvre. Outre le concert de samedi dernier, regardé par 150 millions de chinois à la télévision, le gouverment organise des conférences de sensibilisation et de stratégie, prépare la déclaration anti-piratage de Pékin, et a même organisé un grand démolissage public de CD piratés.
« Dans la matinée, l’équivalent de trois camions chargés de livres, cassettes, DVDs, CDs et disques d’ordinateurs confisqués ont été versés sur un tapis rouge et publiquement réduits en miettes« , rapporte le People’s Daily.
Même si les efforts du gouvernement et de la justice sont importants, « nous ne pouvons pas gagner la bataille contre les violations de droits de propriété intellectuelle sans le soutien du public« , indique Yan Xiaohong, un haut responsable de l’administration chinoise.
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