Dans de plus en plus de restaurants, le client est invité à scanner un QR code pour consulter le menu, puis pour payer. Un temps précieux gagné par les serveurs, qui est souvent rendu possible par la même entreprise : Sunday. Derrière elle, les cofondateurs de Big Mamma, qui transforment les habitudes des clients.

Avec le Covid, le sans contact est entré dans une nouvelle ère. Le plafond de paiement des cartes bancaires a été relevé à 50 euros (quand il n’est pas illimité, avec un smartphone ou un code) et les QR codes ne servent plus uniquement à vérifier si l’on dispose d’un pass sanitaire. Même s’ils existent depuis très longtemps, les QR codes n’ont jamais été aussi populaires, notamment dans la restauration.

Dans les grandes villes, consulter la carte d’une brasserie depuis son smartphone est devenu un geste naturel. Dans certains cas, un QR code est même obligatoire pour payer l’addition. On peut régler la totalité, payer uniquement son plat, ou diviser la somme totale… Une nouveauté permise notamment par Sunday, une jeune pousse française devenue incontournable dans les restaurants. Qui est-elle vraiment ? Est-on vraiment toujours gagnant ? Comment gagne-t-elle de l’argent ? Portrait.

Sunday, une « application » pour faire gagner du temps au restaurant

Sur son site, Sunday se présente comme une application de paiement visant à faire « gagner des millions de minutes à des millions de personnes à la fin de leur repas, grâce à un minuscule QR code de 4×4 cm ».

En clair, plutôt que de chercher à capter l’attention d’un serveur ou d’une serveuse à la fin de son repas pour régler l’addition, il n’y a plus qu’à se saisir de son téléphone pour scanner le QR code disposé sur un présentoir ou sur la table afin de régler la note. Modernité oblige, elle permet également de partager l’addition entre plusieurs convives (et sans calculatrice). Le seul bémol pour les clients est la présence de frais de paiement (en centimes), pour rémunérer la startup.

Avec Sunday, c’est la fin des mouvements de bras dans le vide dans l’espoir d’appeler un employé à sa table, la fin de la queue à la caisse après manger et la fin des « non, merci » quand on nous propose un reçu de carte bleue… C’est également un élément rassurant pour la clientèle étrangère, nous glisse Yohan Bisson, responsable de la communication de Sunday. En effet, on a tout le temps nécessaire pour vérifier la commande et la payer, sans avoir à essayer de se faire comprendre dans une autre langue (les cartes sont traduites par une intelligence artificielle dans 12 langues).

Si Sunday se présente comme une application, il n’est pas nécessaire pour les utilisateurs et utilisatrices d’installer quoi que ce soit. La lecture du QR code ouvre simplement la page idoine dans le navigateur du smartphone. Le site web permet de vérifier que tout est en ordre, puis de payer soit par carte bancaire, soit via des services de paiement mobile comme Apple Pay ou Google Pay pour aller encore plus vite. Les titres restaurants dématérialisés sont aussi supportés, mais il faut se connecter à son compte. C’est moins rapide qu’avec une carte sans-contact.

D’après les chiffres de la startup, les restaurants qui optent pour Sunday constatent une augmentation de 20 % des commandes et du panier moyen de 12 %, ainsi qu’un gain de temps d’environ 15 minutes par table. C’est difficile à vérifier, mais on peut comprendre pourquoi autant de restaurants se laissent tenter.

Sunday App QR code
Les revendications de Sunday sont alléchantes. // Source : Capture d’écran / Sunday

La culture du pourboire, l’autre prouesse de Sunday ?

Bien entendu, Sunday n’est pas une application gratuite. La startup française prélève une commission sur chaque transaction. « On est, dans 90 % du temps, moins chers que les contrats préexistants », nous assure Yohan Bisson. Mais au prélèvement unitaire s’ajoute également d’autres frais : « il y a un abonnement mensuel, dont le montant dépend essentiellement de la taille du restaurant. En moyenne, c’est entre 50 et 100 euros par mois », ajoute le responsable de la communication.

Grâce à une interface bien pensée, les clients sont plus à même de laisser des pourboires aux serveurs et serveuses. Sunday parle d’une augmentation de 3,2x des pourboires après l’installation de l’appli dans certains restaurants. Un chiffre regroupant à la fois les données de la France, mais aussi du Royaume-Uni et des États-Unis, où Sunday est bien implanté.

La question des « tips » est régulièrement au cœur des débats sur Sunday, puisque le site incite à laisser un pourboire lors de chaque transaction (il faut choisir un montant personnalisé et écrire zéro pour ne rien mettre). En France, où la culture du pourboire est moins développée qu’aux États-Unis, Sunday se dit fier d’avoir un impact les mentalités.

« Un de nos plus gros clients en France revendique 5% de tips. C’est monumental », indique à Numerama le responsable de la communication de Sunday. Aussi, des enquêtes de terrain menées par Sunday tendent à casser cette idée reçue d’une clientèle française peu encline au pourboire. « D’après nos données, les Français laissent de bons pourboires. Il faut juste qu’ils aient un moyen d’en laisser un ! » Et d’ajouter : « en réalité, on tips plus que les Anglais ! »

Sunday app QR code
L’interface de Sunday. // Source : Sunday

Sunday semble aussi jouer un rôle important dans la présence en ligne et la réputation numérique des restaurants qui font le choix de l’utiliser. Les clients sont systématiquement invités à laisser une note et un petit commentaire sur Google après leur visite. 50 % des utilisateurs de Sunday prendraient cette peine après avoir payé.

Pour les chefs d’équipe et d’entreprise, Sunday sert sur un plateau une grande variété de données précieuses. Ils permet, par exemple, d’optimiser la présentation du menu (les plats les plus populaires sont mis en avant) et la gestion des équipiers.

Un TPE Sunday, pour les anti-QR Code

Sunday commercialise également des terminaux de paiement (TPE) répliquant l’interface de son application pour centraliser tous les paiements des restaurants et unifier les données collectées par les restaurants. Une offre un peu étrange pour une startup qui veut rompre avec les méthodes de paiement traditionnelles. « On vit dans un monde où 100 % des gens ne sont pas prêts à payer avec un QR code », justifie Yohan Bisson, chiffres à l’appui : 30 % à 70 % des paiements sont effectués via Sunday dans les restaurants partenaires. Ce qui implique, en moyenne, que la moitié des clients continuent de se rendre au comptoir.

TPE sunday app
L’application Sunday pour TPE. // Source : Sunday

« L’étape du paiement est une porte d’entrée extraordinaire », nous glisse le responsable de la communication de Sunday. On l’a dit plus haut : le produit de la startup encourage vivement à laisser des avis sur Google, améliorant de fait la notoriété et la visibilité des établissements visités. À l’avenir, Sunday dit travailler, avec la startup Pongo, sur des programmes de fidélité directement intégré au processus de paiement.

Qui se cache derrière Sunday ?

L’application a le vent en poupe depuis son lancement en 2021 et une levée de fonds initiale d’environ 120 millions d’euros. L’entreprise, cofondée par Victor Lugger, Tigrane Seydoux et Christine de Wendel, concentre ses efforts en France, au Royaume-Uni et aux États-Unis, mais est également utilisée dans plusieurs pays d’Europe.

Si vous ne connaissez pas Victor Lugger et Tigrane Seydoux, il s’agit des co-fondateurs de la chaîne de restaurants italiens Big Mamma, propriétaire de pizzerias comme Popolare ou East Mamma à Paris. Christine de Wendel, elle, est une businesswoman émérite. Passée par Zalando et Mano Mano, elle pilote la stratégie commerciale et marketing de Sunday.

Aujourd’hui, Sunday compte un peu plus de 150 employés répartis entre la France, l’Angleterre et les États-Unis. La jeune pousse française travaillerait actuellement avec plus de 2 000 clients sur les marchés qu’elle a ciblés.

Le groupe Big Mamma a monté un vrai business de la pizza, avec des restaurants très populaires.
Le groupe Big Mamma a monté un vrai business de la pizza, avec des restaurants très populaires. // Source : Numerama

Trop beau pour être vrai, Sunday ?

Sur le papier, Sunday n’a que des avantages. Il fait gagner du temps aux clients, de l’argent aux entreprises… Trop beau pour être vrai ?

Tout dépend de la lorgnette par laquelle on le regarde. Sunday s’inscrit dans la longue liste de services à « haute teneur en disruption » qui, de Uber aux dark kitchens, contribuent à simplifier à l’extrême certains aspects du quotidien, mais peuvent aussi déshumaniser davantage un secteur d’activité très humain.

Travailler dans la restauration est aussi épuisant que peu rémunérateur. Rares sont les serveurs qui débutent en étant payés à un plus haut salaire que le SMIC. Même si Sunday peut, d’une certaine façon, les aider grâce à des pourboires a priori plus nombreux, elle entretient également une certaine forme de flicage des performances grâce à des données permettant, selon l’entreprise, « de récompenser les meilleurs employés » et de « challenger ceux qui doivent s’améliorer ». Avec la promesse d’une augmentation, par exemple ? Chiche.

Source : Numerama

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