C’est un nouveau record pour une intelligence artificielle que vient de battre Google, dans un domaine très précis : les mathématiques. Ses deux programmes AlphaProof et AlphaGeometry 2 ont réussi à atteindre 28 points lors des Olympiades Internationales de Mathématiques (IMO) sur les 42 possibles, plaçant l’IA au niveau des médaillés d’argent de l’année 2024. Le seuil des 30 points aurait permis à Google d’entrer dans la catégorie des médaillés d’or.
Pour arriver à ces résultats, AlphaProof et AlphaGeometry 2 ont réussi à résoudre 4 problèmes sur les 6 présentés aux participants, dont le numéro 4, de géométrie. Les 3 autres problèmes d’algèbre et de théories des nombres sont tombés sous les raisonnements d’AlphaProof, dont le plus difficile de la compétition en théorie des nombres, résolu uniquement par 5 participants humains. Seuls les problèmes de combinatoire ont encore échappé aux calculs des intelligences artificielles de Google.
Rapidité et élégance
Pour le professeur Sir Timothy Gowers, médaillé Fields, parrain et médaillé d’or de l’IMO, que nous avons rencontré lors d’une table ronde, les produits de Google dépassent ce qu’il imaginait possible dans le domaine de l’IA : « Le fait que le programme puisse proposer une construction non évidente comme celle-ci est très impressionnant, et bien au-delà de ce que je pensais être l’état de l’art », confie-t-il.
Car dans cette compétition où de jeunes esprits sont réunis deux fois pour réfléchir pendant 4 heures et 30 minutes à 3 problèmes par jour, il est nécessaire de maîtriser tous les aspects des mathématiques pour en sortir la quintessence. Lors de la table ronde, Sir Timothy Gowers n’a cessé de répéter à quel point la solution proposée par AlphaGeometry 2 au problème 4 était non seulement juste, mais aussi élégante. Cette démonstration est le clou du spectacle, car s’il a fallu 3 jours à AlphaProof pour résoudre certains de ses problèmes, AlphaGeometry n’a pris que 19 secondes pour trouver une solution.
Impossible d’infirmer ou de confirmer les dires d’un médaillé Fields, la plus haute distinction dans le domaine des mathématiques, alors nous ferons le choix de le croire sur parole. À la fin de la conférence, Google a tout de même fourni un résumé succinct de la solution au problème proposée par AlphaGeometry, que nous reproduisons ci-dessous. La solution détaillée est disponible à cette adresse : les plus matheux de nos lecteurs pourront juger par eux-mêmes.
AlphaGeometry2 n’a pas eu un coup de chance : ce programme développé par Google est un système hybride neuro-symbolique dans lequel le modèle de langage est basé sur Gemini (oui, l’IA générative grand public dans les smartphones Pixel et sur le web) et entraîné à partir de très nombreuses données, bien plus que la version 1. Ainsi entraîné, AlphaGeometry 2 a réussi à résoudre 83 % des problèmes de géométrie des Olympiades Internationales de Mathématiques de ces 25 dernières années, quand AlphaGeometry premier du nom ne résolvait qu’un peu plus de la moitié des problèmes.
Quel avenir pour les IA mathématiciennes de Google ?
Avec un outil comme Gemini, on imagine très bien comment Google peut avancer. Aujourd’hui, AlphaGeometry 2 et AlphaProof ont besoin d’une entrée dans un langage formel pour résoudre leurs problèmes. Mais dès cette année 2024, Google a commencé à tester une association entre Gemini et ses programmes dédiés aux mathématiques.
Le but ? Tenter de faire faire à l’IA l’interface entre le langage naturel des humains (et des problèmes mathématiques) et le langage formel que les IA spécialisées comprennent. En d’autres termes, les équipes cherchent à faciliter toujours plus l’étape initiale, jusqu’à arriver à des IA qui pourraient simplement lire les problèmes, les analyser et les résoudre.
C’est déjà, à peu de chose près, la manière dont fonctionne AlphaProof, aidé de l’algorithme de renforcement AlphaZero (oui, celui-là même qui s’est auto-appris à jouer aux échecs et au jeu de Go).
Mais à quoi cela sert-il de faire résoudre des problèmes de mathématiques à des ordinateurs en autonomie ? À terme, l’intérêt se situe, comme souvent, dans la recherche. Les programmes de Google pourront être des compagnons des chercheurs capables de trouver, peut-être, des solutions aux problèmes qu’ils se posent. Et comme la recherche est souvent une question de temps, en gagner grâce aux IA peut permettre aux plus brillants esprits mathématiques d’avancer encore plus vite.
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