Avec sa « taxe d’acquisition initiale » et ses « frais de service de magasin », Apple répond à la Commission européenne qui lui reproche de ne pas être assez souple avec les développeurs. L’entreprise autorise désormais tout le monde à facturer en dehors de l’App Store… mais réclame un pourcentage sur le revenu.

C’est ce qu’on appelle l’audace. Accusée par la Commission européenne de ne pas respecter le DMA à cause d’un « modèle économique conçu pour décourager les développeurs », Apple a décidé de réaliser plusieurs ajustements qui impliquent… de nouvelles taxes.

Jeudi 8 août 2024, la marque a annoncé la création de l’Initial Acquisition Fee (taxe d’acquisition initiale) et de la Store Services Fee (frais de service de magasin). Ces deux nouvelles commissions sont destinées aux applications qui souhaitent vendre des biens numériques sans passer par le moteur de paiement de l’App Store, qui prélève entre 15 et 30 % des revenus du développeur. La marque répond ainsi aux préoccupations de la Commission européenne, qui devra examiner sa nouvelle proposition avant de se prononcer sur son éligibilité.

En Europe, le système de paiement imaginé par Apple est toujours très compliqué

Dans l’Union européenne, les développeurs ont le choix entre deux modèles économiques :

Aujourd’hui, seuls les développeurs membres du nouveau système, avec la taxe de 50 centimes, ont le droit de faire la promotion d’achats intégrés ou d’abonnements sur leur site pour contourner la taxe d’Apple. Cette situation énerve beaucoup des géants comme Spotify qui rêvent de ne plus rien partager avec Apple (la marque lui avait répondu violemment et l’accuse notamment de vouloir réécrire les règles de l’App Store pour s’enrichir). Apple a été condamné par l’UE pour abus de position dominante, mais fait un appel dans un dossier qu’elle dit influencé par son concurrent suédois.

Apple change les règles, mais conserve l’avantage

Dès cet automne, tous les développeurs, qu’ils appartiennent à l’ancien ou au nouveau système, pourront proposer des liens externes dans leurs applications en Europe, avec le design de leur choix. Spotify pourra ainsi proposer de s’abonner via son site, envoyer un pop-up promotionnel ou rediriger vers PayPal pour accepter un paiement, sans jamais avoir à passer par l’App Store ou sans accepter de verser 50 centimes par installation à Apple. Les utilisateurs pourront aussi passer le « message qui fait peur » d’Apple, qui n’indiquera plus qu’une seule fois qu’un paiement sur un site peut être dangereux.

Malheureusement pour Spotify, Apple ne compte pas offrir cette possibilité gratuitement. Pour vendre des abonnements sur un site, un développeur devra accepter de déclarer ses revenus générés depuis un iPhone sur une plateforme numérique, afin de permettre à Apple de lui envoyer une facture. Apple considère qu’un développeur n’aurait pas rencontré son public sans l’App Store, ce qui mérite donc une récompense. Deux taxes ont été imaginées par la marque (et sont cumulables) :

  • Initial Acquisition Fee : dans la première année suivant le téléchargement intial d’une application, un développeur devra verser à Apple 5 % de ses revenus générés depuis un lien externe.. Apple indique que cette taxe correspond à la puissance de découverte de l’App Store.
  • Store Services Fee : dans la première année suivant le téléchargement d’une application ou d’une mise à jour, ce qui fait le système ne s’arrête jamais. Un développeur devra verser entre 10 et 20 % de ses revenus à Apple (en fonction du système accepté), pour rémunérer la marque pour les services qu’elle fournit aux développeurs. Une version remisée de cette taxe existe, avec entre 7 et 10 % prélevés.
Ancien système App StoreNouveau système Paiement depuis un lien
Grands développeurs30 %20 % + 0,50 euro par téléchargement5 % (pendant 12 mois) + 20 %
Petits développeurs15 %13 %20 %
Les commissions prélevées par Apple pour les achats intégrés

Si on prend l’exemple de Spotify, qui vend un abonnement au tarif de 10,99 euros par mois, le Suédois devra verser à Apple 0,55 euro par mois (Initial Acquisition Fee) et 2,2 euros par mois (Store Services Free), soit 2,75 euros par mois pendant un an.

Taxe App StoreTaxe lien 12 moisTaxe lien après
3,3 euros2,75 euros2,2 euros
Taxe prélevée par Apple chaque mois avec un abonnement Spotify (10,99 euros)

Est-ce plus avantageux que l’ancien système, qui obligeait Spotify à verser 30 % de ses revenus à Apple ? Oui, puisque 30 % revient à 3,3 euros et que l’Initial Acquisition Fee s’arrête au bout de 12 mois (le 13ᵉ mois, il faudra donc que Spotify partage 20 % de ses revenus, sauf si Spotify arrête de mettre à jour son application). Quoi qu’il en soit, le nouveau système risque de ne pas plaire aux grosses plateformes, qui n’apprécieront probablement pas la méthode d’Apple. Les plus petits développeurs, eux, ont le droit à une remise avec une taxe à 7 ou 10 %.

Avec ses nouvelles taxes, il est peu probable qu’Apple change quoi que ce soit. Les développeurs n’ont pas grand intérêt à changer de système, puisqu’ils devront toujours partager une partie de leurs revenus avec Apple. La Commission européenne pourrait ne pas apprécier cette nouvelle proposition, mais Apple gagne au moins du sursis.

Source : Numerama

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