« Mais qu’est-ce que c’est que ça ? ». Sur le réseau social Reddit, les Finlandais s’interrogent et postent les photos d’un étrange OVNI aperçu lors d’une froide matinée du 19 novembre. Un dirigeable, chromé, long de 11 mètres, flottant silencieusement à une centaine de mètres du sol, au-dessus du trajet quotidien pour le travail, l’image interpelle.
Kelluu, la société à l’origine de ce vol, s’est exprimée dans la presse locale : « le dirigeable a été montré aux visiteurs du salon Slush – un évènement dans le secteur de la tech – mais il n’a pas collecté de données sur l’environnement ».
À Helsinki, la capitale du pays, les citadins peuvent être surpris, mais les habitants de la région plus reculée de Carélie du Nord sont, eux, plus habitués à voir ces engins traverser le ciel.
« Nous avons à plusieurs reprises survolé ces zones plus froides pour tester nos appareils dans des conditions plus rudes » nous explique Janne Hietala, le fondateur et patron de Kelluu. Sur le papier, ce ballon fonctionne comme une sentinelle pour diverses missions civiles : collecte de données pour l’aménagement urbain, protection de l’environnement, gestion des forêts, aide au renseignement pour les secours. Mais sous ses allures pacifiques, il se révèle également être un précieux allié pour des opérations de défense, prêt à répondre aux menaces hybrides.
« Nos cas d’usage couvrent à la fois des applications purement civiles et économiques, mais aussi des enjeux de sécurité publique, comme le brouillage, le sabotage ou la gestion des frontières » nous décrit Janne Hietala. Et avec une menaçante Russie à l’est, cette frontière est devenue un point de tension, où l’incertitude plane en permanence, imposant une surveillance constante.
Le dirigeable a d’ailleurs été testé par les géants nordiques de la défense : le suédois Saab et le finlandais Patria. Est-ce que le ballon a déjà veillé sur cette région dans le cadre d’une mission militaire ? Le fondateur préfère ne pas s’exprimer à ce sujet.
De nouveaux modèles testés pour collecter des données depuis le ciel
Le dirigeable fait partie de ces appareils qui connaissent une nouvelle vie militaire depuis la guerre entre la Russie et l’Ukraine. « L’évolution de l’écosystème de défense numérique permet des tests, des démonstrations et des déploiements très agiles de nouvelles capacités innovantes, qu’il s’agisse de technologies civiles, à double usage, ou purement militaires », explique Janne Hietala, citant aussi la transformation de l’usage des drones.
Les ballons ont refait parler lors d’un raté chinois aux États-Unis : Beijing avait envoyé en 2023 des appareils d’espionnages vers le continent américain qui ont dérivé vers des régions profondes du pays. Cette méthode a ensuite été reproduite par l’armée ukrainienne.
L’appareil de Kelluu est plus agile. Équipé d’une hélice, gonflé à l’hydrogène, il peut se déplacer sur une trajectoire ordonnée ou de manière autonome sur une zone définie. L’engin affiche une impressionnante autonomie de 12h. Les complexes règles aériennes limitent l’altitude de vol à une centaine de mètres. Dans un scénario extrême, le dirigeable pourrait monter jusqu’à 1 km de hauteur.
Selon son fondateur, l’appareil résiste aux brouillages GPS. En Ukraine, les drones russes ou ukrainiens échouent régulièrement dans leurs missions, les connexions étant perturbées par la bataille électronique.
Y a-t-il un risque que le vent fasse dériver l’appareil de Kelluu et traverse la dangereuse frontière ? « Non, le dirigeable est conçu pour faire face à de rudes conditions dans le nord finlandais. Et nous n’allons pas nous permettre de telles intrusions dans un territoire étranger, susceptibles d’entraîner de graves répercussions diplomatiques » nous dit l’entrepreneur rassurant.
Des engins volants déployés à la frontière par l’armée russe
Il n’empêche qu’un ballon de cette taille reste visible dans le ciel. Et si les habitants d’Helsinki ont pu observer un premier vol promotionnel pour le salon Slush, côté russe, on a également lâché les ballons.
En mai dernier, la chaîne de télévision publique russe Rossiya 1 diffuse les images de dirigeables pour surveiller sa frontière avec la Finlande. Le ballon, au design plutôt sommaire, retenu par un simple fil, donne l’impression d’être avant tout un symbole, dans une période où Moscou multiplie ce type de démonstrations.
Une source finlandaise indique que c’est principalement une manière de montrer que la Russie serait en mesure de répondre aux évolutions de ses voisins frontaliers. Le même procédé a été répliqué en Estonie.
Selon les médias russes, le but de cet appareil est d’empêcher « l’immigration illégale qui tente d’entrer en Finlande depuis la Russie ». Un autre message aussi, cette fois à destination de la population russe.
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