Le 14 novembre 2024, Elon Musk a déposé une nouvelle plainte à l’encontre d’OpenAI et de Microsoft. Le patron de Tesla et de SpaceX, qui concurrence désormais l’entreprise de Sam Altman avec sa propre structure xAI, accuse OpenAI de trahir sa mission originelle en abandonnant progressivement son statut d’organisation à but non lucratif. Il demande à la justice américaine d’interdire à OpenAI de faire de l’argent, notamment en mettant fin à son partenariat avec Microsoft. Pour rappel, Elon Musk fait partie des cofondateurs d’OpenAI, mais a fait l’erreur de partir avant l’explosion de ChatGPT.
Dans un long billet de blog publié le 13 décembre, OpenAI répond publiquement à son détracteur. « Elon Musk voulait un OpenAI à but lucratif », titre l’entreprise, en publiant plusieurs échanges entre Musk et Altman. Ce n’est pas la première fois qu’OpenAI met en lumière les contradictions d’Elon Musk, mais certains documents sont inédits.
Elon Musk voulait privatiser OpenAI bien avant le succès de ChatGPT
À en croire Elon Musk, OpenAI a été fondé avec son argent dans un but non lucratif, afin de financer la recherche en intelligence artificielle. Le conseiller de Donald Trump, qui publie régulièrement des messages contre OpenAI, accuse l’entreprise d’être devenue « ClosedAI » (fermé, au lieu d’ouvert). Elon Musk s’insurge contre ce changement et réclame le retour à l’ancien statut d’OpenAI : il ne veut pas que l’entreprise fasse de profits.
Pour de nombreux fans d’Elon Musk, ce combat est juste. Le milliardaire représente le monde de la recherche face au capitalisme de Sam Altman. Pourtant, et à en croire les documents publiés par OpenAI, la réalité est bien différente.
Dès novembre 2015, avant même l’annonce de la création d’OpenAI, Elon Musk était le premier à s’interroger sur le statut non lucratif de l’entreprise. « La structure ne semble pas optimal […] Il est probablement préférable d’avoir une société C standard avec une organisation parallèle à but non lucratif », écrivait le milliardaire dans un mail envoyé à Sam Altman le 20 novembre 2015.
Début 2017, après une première année de recherches, OpenAI commence à réaliser un problème essentiel : il va avoir besoin d’argent et de ressources informatiques pour se développer. Elon Musk promet qu’il va trouver « le moyen le moins coûteux de s’assurer que la puissance de calcul n’est pas une contrainte », À l’été 2017, Elon Musk commence à s’inquiéter de la montée en puissance de la Chine en IA. « Ils feront tout ce qu’il faut pour obtenir ce que nous développons. Peut-être une raison supplémentaire de changer de cap », écrit le milliardaire. Greg Brockman, un des fondateurs d’OpenAI, lui suggère la création d’une entité profitable, Elon Musk acquiesce.
Elon Musk avait besoin d’argent pour financer une ville sur Mars
Et puis, à l’automne 2017, le point de bascule arrive. Elon Musk est d’accord avec l’idée de ses partenaires, mais exige de détenir personnellement 50 à 60 % d’OpenAI. Le patron de SpaceX aurait indiqué par téléphone qu’il ne s’agit pas de vouloir contrôler de l’entreprise, mais qu’il avait besoin de 80 milliards de dollars pour financer la création d’une ville sur Mars.
Dans un long mail envoyé le 13 septembre 2017, Elon Musk réclame plusieurs sièges au conseil d’administration et le poste de CEO. OpenAI est censé devenir son entreprise, comme Tesla ou SpaceX.
Le 15 septembre 2017, Elon Musk crée une entreprise nommée « Open Artificial Intelligence Technologies, Inc. ». L’objectif est de vendre OpenAI à cette structure, qu’il contrôlerait.
OpenAI, qui dit avoir failli accepter l’offre d’Elon Musk, finit par refuser cette proposition : « Nous avons plusieurs préoccupations importantes dont nous n’avons parlé à aucun d’entre vous. Nous ne les avons pas soulevées parce que nous avions peur de le faire. Nous avions peur de nuire à notre relation, que vous ayez une moins bonne opinion de nous, ou que vous perdiez votre statut de partenaires », écrivent Ilya Sutskever et Greg Brockman le 20 septembre 2017.
« La structure actuelle vous offre la possibilité d’exercer un contrôle unilatéral absolu sur l’AGI. Vous avez déclaré que vous ne vouliez pas contrôler l’AGI final, mais au cours de cette négociation, vous nous avez montré que le contrôle absolu était extrêmement important pour vous », peut-on lire dans son mail adressée au patron de Tesla.
« Nous craignons qu’au fur et à mesure que la société progresse réellement vers l’AGI, vous choisissiez de conserver le contrôle absolu de la société en dépit des intentions contraires actuelles » alarme OpenAI. Ilya Sutskever et Greg Brockman disent notamment craindre qu’Elon Musk fusionne Tesla et OpenAI, avec pour objectif de transformer l’entreprise en une machine à cash. Ils s’interrogent aussi sur les ambitions politiques de Sam Altman.
Au moment de l’envoi du mail, la discussion est encore ouverte… mais Elon Musk se vexe. « Soit vous faites quelque chose de votre côté, soit vous continuez avec OpenAI en tant qu’organisation à but non lucratif. Je ne financerai plus OpenAI tant que vous n’aurez pas pris l’engagement ferme de rester ou que je ne serai pas un imbécile qui fournit essentiellement un financement gratuit pour que vous créiez une startup » écrit le milliardaire 9 minutes plus tard. Il ajoute quelques secondes plus tard : « Pour être clair, il ne s’agit pas d’un ultimatum pour accepter ce qui a été discuté auparavant. Il n’en est plus question ». Sam Altman ironise : « Je reste enthousiaste à l’égard de la structure à but non lucratif ! »
Elon Musk a tenté de récupérer OpenAI, en vain
Après l’échec des négociations, Elon Musk est de nouveau revenu à plusieurs reprises. Il propose en janvier 2018 une fusion d’OpenAI et de Tesla, pour contrecarrer Google, ce que l’entreprise refuse. En conséquence, Elon Musk démissionne d’OpenAI.
Malgré l’émergence de tensions, OpenAI a proposé à Elon Musk de continuer à le financer fin 2018, ce qui semblait emballer le milliardaire à l’époque. Elon Musk continue de mettre la pression sur OpenAI, en leur prédisant notamment « 0 % de réussite, pas 1 % », sans changements. « OpenAI me fait penser à Bezos et Blue Origin. Ils sont désespérément en retard sur SpaceX et leur situation empire, mais l’ego de Bezos le pousse à croire que ce n’est pas le cas ! » écrit Musk.
La suite, c’est le succès d’OpenAI, qui commence à être valorisé à hauteur de plusieurs milliards de dollars. Elon Musk aimerait récupérer son gain, mais c’est impossible dans une structure à but non lucratif.
Le milliardaire part ensuite en croisade contre l’IA, en signant une lettre contre son développement, puis lance parallèlement son rival d’OpenAI. Depuis, il tente se venger en coulant l’entreprise, qu’il accuse d’avoir trahi sa mission originelle. La menace pour OpenAI plane désormais dans l’élection de Donald Trump, qui confère des pouvoirs inédits à Elon Musk.
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