En se déplaçant à Mayotte pour « apporter des solutions réelles, concrètes » à l’île, ravagée par le passage du cyclone Chido, François Bayrou savait qu’il était attendu au tournant. Il n’imaginait sans doute pas qu’une polémique viendrait de la part des opérateurs de télécommunications.
C’est pourtant bien ce qu’il s’est passé lundi 30 décembre, au moment où le Premier ministre a déroulé les détails du plan intitulé « Mayotte debout ». François Bayrou s’est vu reproché de ne pas dire un mot pour les trois principaux opérateurs de l’île, alors qu’ils s’efforcent de rétablir pleinement la connexion des Mahorais et des Mahoraises, notamment en ajoutant des antennes temporaires et en offrant gratuitement un accès à leurs réseaux.
Et au manque de considération du gouvernement s’est ajouté un autre affront : celui du recours à Starlink, le service d’accès à Internet par satellite vendu par SpaceX, l’entreprise d’Elon Musk. François Bayrou a en effet annoncé la mobilisation de 200 terminaux terrestres « pour assurer les communications en urgence » et pallier les manques sur place.
Orange voit rouge après l’annonce sur Starlink
Cette absence de reconnaissance combinée à l’annonce sur Starlink ont fini par provoquer la colère d’Orange, l’opérateur historique. Sur X (ex-Twitter), Laurentino Lavezzi, directeur des affaires publiques du groupe, s’est ainsi fendu d’un long message pour s’en plaindre et, surtout, expliquer les freins qui, selon lui, ralentissent le retour à la normale des réseaux.
« Pas un mot pour les opérateurs et surtout, leurs collaborateurs sur place qui assurent le rétablissement des réseaux alors que comme tous à Mayotte, ils ont été impactés par le cyclone, et doivent aussi s’affairer à calfeutrer leur habitat, à trouver à boire et à manger », a-t-il ainsi dénoncé, quelques heures après les annonces de François Bayrou.
Mais au-delà des remerciements, Laurentino Lavezzi a surtout pointé les incohérences opérationnelles sur le terrain. Il a en particulier pointé du doigt les refus adressés aux opérateurs télécoms pour accéder à des générateurs électriques, qui sont pourtant nécessaires pour renvoyer du courant dans les installations coupées du réseau énergétique.
Ces équipements seraient décisifs, selon Laurentino Lavezzi. « Avec 4 générateurs électriques seulement, la couverture mobile Orange passerait de 75 à 85 % de la population », a-t-il affirmé. « Nous ne désespérons d’être priorisés pour quelques générateurs électriques ». Mais en raison du recours à Starlink, ce dernier pourrait être privilégié.
« Nous sommes heurtés par une communication du gouvernement qui axe ses annonces sur du Wi-Fi provisoire by Starlink, pourtant bien moins couvrant et performant qu’un réseau mobile », a-t-il regretté. Cela, alors qu’Orange a relevé son réseau mobile en 10 jours, passant de 25 à 75 % de couverture de la population à Mayotte.
Selon le dernier pointage de l’opérateur historique, ces 75 % ont été atteints en date du 30 décembre. De son côté, le gouvernement relevait pour SFR un taux de couverture supérieur à 63 % et pour Free de 40 %, d’après un point d’étape du 30 décembre (Orange, également mentionné, est indiqué avec un taux de couverture à plus de 70 %).
Dans son message, Laurentino Lavezzi a aussi saisi l’occasion d’appeler à une révision, au moins à Mayotte, du cadre réglementaire et fiscal dans lequel les opérateurs évoluent. Car jusqu’à présent, les décisions de Paris « interrogent quant à leur pertinence dans la poursuite du rétablissement des réseaux, sur leur rationalité économique [et] laissent pantois sur le terrain de la souveraineté numérique. »
Des remerciements du gouvernement
L’agacement exprimé par la direction d’Orange a depuis fait son petit effet, puisque plusieurs membres du gouvernement et des députés fidèles à Emmanuel Macron ont réagi pour adresser des mots de remerciement aux opérateurs. C’est notamment le cas de Clara Chappaz, ministre déléguée l’IA et au numérique, et de Marc Ferracci, à l’industrie et à l’énergie.
« Rétablir les communications numériques à Mayotte, une priorité depuis le 1e jour grâce à la mobilisation des opérateurs télécoms au cœur du plan Mayotte Debout. Merci », a ainsi écrit Clara Chappaz.
« Je tiens à saluer leur mobilisation, dès les premiers jours, pour permettre à nos concitoyens mahorais de bénéficier au plus vite de communications mobiles, essentielles aux activités économiques et aux besoins du quotidien », a ajouté son collègue, reconnaissant que « beaucoup a déjà été fait », cela malgré « des conditions difficiles ».
Le Premier ministre, lui, n’est pas revenu sur la controverse. Mais sur le volet réglementaire et fiscal, les lignes devraient bouger. Marc Ferracci a assuré que seront examinées « toutes les options pour accélérer la couverture numérique via l’octroi de nouvelles fréquences, des allègements d’autorisations d’urbanismes et la construction d’un réseau fibre ». Cela, afin de préparer l’après pour Mayotte.
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