L’effet de surprise a du mal à passer à Wall Street. Ce lundi, alors que personne ne s’y attendait, Google a fait savoir qu’il allait racheter Motorola Mobility pour 12,5 milliards de dollars, pour renforcer son système Android et son portefeuille de brevets. L’intention à peine voilée de la firme de Mountain View est d’user des quelques 17 000 brevets détenus par Motorola pour dissuader ses concurrents Apple et Microsoft de lancer des poursuites, sous peine de contre-attaque.
Mais l’annonce n’a pas été accueillie avec le plus grand enthousiasme à l’ouverture des marchés. L’action de Google au Nasdaq a plongé de plus de 2 % en début de journée, et peine à se rétablir. Les investisseurs ne semblent pas convaincus par les explications de Larry Page, qui a affirmé lundi que l’activité mobile de Motorola afficherait bientôt « une croissance explosive« , soutenue par le système Android.
Nokia et RIM prennent de la valeur
Etrangement, outre Motorola Mobily dont la valeur des titres augmente logiquement de plus de 50 %, le principal bénéficiaire de l’opération semble être… Nokia. Les parts du fabricant finlandais s’envolent de plus de 13 % à l’ouverture de Wall Street, les investisseurs espérant une surenchère. Si Motorola a pu être racheté 12,5 milliards de dollars, pourquoi Nokia ne pourrait-il pas se vendre à un encore meilleur prix ?
RIM (Research In Motion), qui conçoit les fameux téléphones Blackberry, est lui aussi l’un des gagnants à court terme de l’annonce de Google. Le Canadien voit ses actions prendre plus de 5 % de valeur.
Enfin Microsoft et Apple, nommément visés par Google pour justifier l’acquisition de Motorola et de son portefeuille de brevets, ne tremblent pas. Leurs actions continuent de grimper ce lundi, d’environ 1,5 % chacun.
Une stratégie trop floue de Google
Les actionnaires de Google voient d’un mauvais oeil un rachat de Motorola qui représente 6 % de la valorisation de Google, et plus d’un tiers de sa trésorerie. Mais surtout, ils ne comprennent pas la stratégie de Google, qui a affirmé qu’Android resterait le même système ouvert accessible à tous les constructeurs, et que Motorola resterait une entité séparée.
Si Google achète Motorola pour imiter la stratégie d’Apple et unifier le système d’exploitation et l’appareil, il ne peut le faire efficacement qu’en tournant le dos à HTC, Samsung ou LG… qui se tourneront alors vers Microsoft et son Windows Mobile. Sans doute ont-ils déjà beaucoup de mal à goûter l’idée que leur fournisseur d’OS soit désormais un concurrent sur le marché des téléphones et tablettes tactiles, ce qui représente un risque pour leur soutien d’Android. Larry Page a bien publié quelques réactions positives de partenaires pour tenter de dissoudre l’impression de malaise, mais elles saluent toutes le prétendu engagement de Google à défendre le système Android contre les attaques de brevets, pas l’annonce elle-même du rachat de Motorola.
Si au contraire Google ne change effectivement rien à la stratégie d’intégration d’Android (qui n’a pas fonctionné pour Microsoft et Windows Phone lorsqu’il a voulu singer le modèle iOS/iPhone…), alors c’est bien qu’il ne rachète Motorola que pour ses brevets… ce qui paraît beaucoup trop cher. Quel autre intérêt de racheter Motorola si c’est pour ne rien changer, alors que l’entreprise a déjà dédié toute sa production mobile à Android ?
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