« Vous êtes journaliste? Le fait d’être espionné directement par la police pour identifier vos sources ne relève plus de la fiction, mais de la réalité. » L’avertissement est signé Edward Snowden. Le lanceur d’alerte et ex-consultant de la NSA a tenu à informer ses 2,5 millions d’abonnés Twitter d’une polémique en cours à Montréal entre la police locale et Patrick Lagacé, éditorialiste au quotidien La Presse.
« Une pratique autorisée pour toute situation exceptionnelle »
Lundi, le chef des forces de l’ordre, Philippe Pichet, a reconnu avoir placé le téléphone du journaliste sous surveillance pendant plusieurs mois au cours de l’année écoulée. La police, qui pouvait ainsi tout connaître des appels entrants et sortants de Patrick Lagacé pour identifier l’une de ses sources, nie cependant avoir accédé à son GPS.
Pour Philippe Pichet, cette pratique était justifiée par la nature délicate du Projet Escouade, du nom de l’enquête menée par le service de renseignement interne en charge des crimes commis au sein de la police montréalaise : « Nous sommes autorisés à utiliser ce genre d’outils en cas de situation exceptionnelle. » En l’occurrence, dans le cadre d’une enquête sur des policiers soupçonnés de corruption.
« L’affaire des fadettes », un précédent français
Parmi les cinq suspects arrêtés pendant l’été, on retrouve Fayçal Djelidi, dont l’examen du téléphone a permis à la police de découvrir ses échanges réguliers avec Patrick Lagacé. Et ainsi d’obtenir 24 mandats de la justice pour surveiller le téléphone du journaliste, même si Pichet affirme que cet espionnage visait seulement les agents de police concernés et pas le journaliste. Sa ligne de défense est loin d’avoir convaincu Patrick Lagacé : « Aucune vie n’était en danger, il ne s’agissait pas d’un enjeu de sécurité nationale, ce qu’ils ont fait n’est pas justifiable. »
Le scandale a pris une ampleur nationale depuis la révélation de la mise sur écoute de six autres journalistes dans une autre affaire – sans rapport avec Patrick Lagacé et la police montréalaise. En France, Bernard Squarcini, ancien directeur central du renseignement intérieur (DCRI), avait été condamné à 8000 euros d’amende en avril 2014 dans « l’affaire des fadettes ». Il avait requis les facturations téléphoniques détaillées du journaliste Gérard Davet afin de découvrir les sources d’un de ses articles sur l’affaire Bettencourt dans Le Monde.
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