En janvier, le gouvernement avait prié l’autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) de lui faire un état des lieux du déploiement de l’IPv6 en France. Cette demande avait donné lieu à un rapport remis à la secrétaire d’État en charge du numérique publié fin septembre, accompagné de la décision de créer un observatoire de la transition vers IPv6.
Cet observatoire est désormais en place. Le vendredi 9 décembre, le gendarme des télécoms a produit son premier point d’étape de la migration vers la nouvelle norme, qui a été élaborée en vue de pallier les insuffisances du standard actuel, appelé IPv4, dont le schéma d’écriture ne permet plus de couvrir toutes les demandes d’adresses qui sont émises par les machines se connectant au réseau.
IPv4 ? IPv6 ?
En effet, il faut rappeler que l’adresse IP sert à identifier une connexion sur le réseau, qui peut être partagée par une ou plusieurs machines. Elle peut en quelque sorte être considérée comme une plaque d’immatriculation. Avec IPv4, l’adresse est formée d’une suite de quatre nombre pouvant aller de 0 à 255. Dans le cas de Numerama par exemple, l’adresse IPv4 actuelle est 62.210.7.70.
Au début des télécommunications, on pensait que la norme IPv4 suffirait à couvrir tous les besoins futurs. L’histoire a démontré le contraire : l’informatique personnelle s’est démocratisée, les terminaux (smartphones, tablettes) rencontrent un succès indéniable et maintenant il y a l’Internet des objets qui pointe le bout de son nez. Pour ainsi dire, tout ou presque va pouvoir être connecté au réseau.
IPv4 : plus de 4,29 milliards d’adresses en même temps. IPv6 : plus de 360 sextillions.
IPv4 a beau accueillir plus de 4,29 milliards d’adresses en même temps, ce n’est plus suffisant. Et même si des astuces techniques ont permis de prolonger la « durée de vie » du standard actuel, comme le nattage d’adresses IP, il fallait passer à une autre norme. Après tout, c’est bien normal : on ne peut même pas attribuer une adresse IP par personne sur Terre. IPv4 a fait son temps.
Une adresse IPv6 s’écrit ainsi : 5800:10C3:E3C3:F1AA:48E3:D923:D494:AAFF.
Elle est faite de huit blocs, chacun accueillant quatre caractères alphanumériques. Cela permet d’écrire 340 sextillions d’adresses différentes. C’est un nombre qui est en dehors du champ de la compréhension humaine. « Pour épuiser la totalité de ce stock d’adresses, il faudrait placer 667 millions de milliards d’appareils connectés sur chaque millimètre carré de la surface de la Terre », écrit Wikipédia.
IPv6 en France
Venons-en à la situation dans l’Hexagone.
L’observatoire du gendarme des télécoms constate que le déploiement de la norme IPv6 a été initié pour la première fois à une échelle significative par l’opérateur Free, en 2007. Les autres fournisseurs d’accès à Internet sont nettement en retrait. Orange a toutefois débuté la transition au début de l’année, dans la mesure où la grande majorité de ses clients FTTH et VDSL bénéficie d’une connectivité par défaut en IPv6.
En se basant sur les données du World IPv6 Launch au 4 décembre, l’Arcep relève que le taux d’utilisation d’IPv6 sur les principaux réseaux fixes s’élevait à 24 % chez Free, 16 % chez Orange, 1 % chez Bouygues Télécom et 0,5 % chez SFR. Il existe une réelle fracture entre les quatre gros opérateurs français : deux ont commencé la migration, tandis que les deux autres sont beaucoup plus en retrait.
Pour le mobile, c’est pire : rien n’a été fait. « Sur les réseaux mobiles en revanche, aucun opérateur national n’a à ce jour entamé la transition », commente laconiquement l’Arcep, qui anticipe toutefois un frémissement l’an prochain. « Une accélération des déploiements, aussi bien pour les réseaux fixes que mobiles, devrait être observée en 2017 », écrit-elle. Il est vrai que pour le mobile, ça ne peut qu’accélérer.
« Le plus souvent, les opérateurs déploient le protocole IPv6 parallèlement à IPv4. Ainsi, les clients disposent de deux adresses : une IPv4 et une IPv6. Ce mécanisme est complètement transparent pour les utilisateurs. Les opérateurs estiment que ces utilisateurs, dits en dual stack, effectuent 30 % à 50 % de leurs échanges sur Internet en IPv6 », fait remarquer l’Arcep.
L’observatoire de l’Arcep est accompagné d’une liste d’actions à accomplir pour accélérer la transition, essentiellement à destination de l’État. L’une des pistes concerne toutefois spécifiquement le grand public : il s’agit de mieux l’informer sur « la pérennité des terminaux dont il dispose et les possibles dysfonctionnements liés aux mécanismes de rationnement des adresses IPv4 ».
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