Sur l’App Store de son système iOS, Apple propose plus de 550 000 applications différentes, gratuites ou payantes. Un succès chez les développeurs qui s’explique par l’enthousiasme des utilisateurs. La plate-forme va en effet bientôt dépasser les 25 milliards de téléchargements d’applications ! A cette occasion, la firme a mis en ligne un compteur qui défile à mesure que de nouvelles applications sont téléchargées, au rythme de 1 000 par seconde.
Pour « remercier » ses clients et accélérer le rythme, Apple offrira une carte cadeau de 10 000 dollars (environ 7 500 euros) à celui ou celle qui téléchargera la 25 milliardième application. La firme de Cupertino avait fait de même lors du 10 milliardième téléchargement.
Le succès des catalogues d’applications pour mobile ne faiblit pas, et tend à s’installer en modèle, même sur les systèmes d’exploitation pour ordinateurs. Ainsi, Microsoft proposera un Windows Store pour Windows 8. De son côté, après avoir intégré l’App Store à Snow Leopard et Lion, Apple prévoit la possibilité pour l’utilisateur de verrouiller son futur OS X Mountain Lion pour n’autoriser que les logiciels issus de sa boutique. Sous couvert de sécurité, la firme enferme le client dans un écosystème qu’il contrôle de bout en bout, commissions à la clé.
Mais un tel succès pose question pour l’avenir du web. Les éditeurs doivent-ils développer des applications web standard qui sont compatibles avec toutes les plateformes, mais qui sont beaucoup plus difficiles à monétiser qu’en les proposant sur une boutique centralisée ? Ou doivent-ils céder au réalisme économique et développer en priorité pour les quelques plateformes les plus rémunératrices, au détriment des plateformes minoritaires ou émergentes ?
Par ailleurs, la domination des « store » pose un problème de liberté d’expression. Le processus de validation a priori d’Apple, et la possibilité pour la firme de supprimer une application de son catalogue, fait qu’elle a droit de vie ou de mort sur une application ou même un type de contenus. Apple ne s’est pas privé d’user de ce pouvoir, qu’il revendique au nom de la préservation d’une certaine idée de la morale publique. Il est par exemple impossible de trouver une application pornographique sur l’App Store. Mais la firme de Cupertino a été beaucoup plus loin en allant jusqu’à censurer des BD jugées trop violentes, ou des magazines ayant pignon sur rue, qui ont osé parler du pénis ou du point G. Etre diffusé sur l’App Store, c’est toujours prendre le risque d’être censuré, aujourd’hui ou demain, pour de bonnes ou de très mauvaises raisons. Et de perdre tous ses clients. C’est ce qui a poussé Charlie Hebdo à refuser d’y entrer, quand d’autres comme Esquire ont préféré s’auto-censurer.
Le HTML5 permet pourtant de se rapprocher de l’expérience utilisateur d’une application native, comme le montre l’excellente application du Financial Times, et élimine ces risques. Mais les boutiques d’applications sont aujourd’hui le meilleur moyen de promouvoir et monétiser son contenu sur mobile. Or avec 4 milliards de dollars déjà reversés par Apple aux développeurs, c’est malheureusement un argument qui ne peut laisser insensible aucun éditeur.
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