En 2010, le syndicat national de l'édition phonographique (SNEP) avait déposé plainte contre Google pour l'obliger à modifier son service de suggestion, qui propose des requêtes à rechercher à partir des premières lettres saisies au clavier, afin que celui-ci n'avance aucune proposition lorsque l'internaute inscrit dans le champ de recherche les termes "torrent", "MegaUpload" et "RapidShare".
Dans un premier jugement rendu le 10 septembre 2010, le tribunal de grande instance de Paris avait débouté une première fois le SNEP de sa requête. En appel, l'association interprofessionnelle a perdu une deuxième fois contre la firme de Mountain View. À l'époque, la cour d'appel de Paris avait estimé qu'il n'y avait pas "atteinte à un droit d'auteur occasionné par le contenu" de Google Suggest.
"L'échange de fichiers contenant des œuvres protégées notamment musicales sans autorisation ne rend pas ces sites en eux-mêmes illicites", peut-on lire dans l'arrêt. "C'est l'utilisation qui en est faite par ceux qui y déposent des fichiers et les utilisent qui peut devenir illicite". La violation du droit d'auteur n'étant pas causée par Google mais par l'utilisateur, impossible de demander au premier de bloquer certains mots-clés.
C'était du moins le raisonnement de la cour d'appel de Paris. Or, le juriste Cédric Manara signale sur Twitter que la première chambre civile de Cour de cassation a cassé l'arrêt de la juridiction, en rappelant, en début d'arrêt, deux articles, dont le L 336-2 du Code de la propriété intellectuelle qui expose que :
"En présence d'une atteinte à un droit d'auteur ou à un droit voisin occasionnée par le contenu d'un service de communication au public en ligne (ici Google, ndlr), le tribunal […], peut ordonner à la demande des titulaires de droits […] toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser une telle atteinte à un droit d'auteur ou un droit voisin, à l'encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier".
Pour la Cour de cassation, Google "orientait systématiquement les internautes, par l’apparition des mots clés suggérés en fonction du nombre de requêtes, vers des sites" proposant des contenus protégés par le droit d'auteur, en offrant "les moyens de porter atteinte aux droits des auteurs ou aux droits voisins". La juridiction considère en outre que le filtrage et la suppression de la suggestion, s'il n'y a pas "lieu d'en attendre une efficacité totale", "pouvaient ainsi contribuer à y remédier en rendant plus difficile la recherche des sites litigieux".
La Cour de cassation fait cependant l'impasse sur les arguments de la cour d'appel de Paris, qui soulignent que la suggestion de mots-clés ne conduit pas nécessairement l'internaute à se rendre sur des sites proposant des contenus illégaux. L'affaire est néanmoins renvoyée devant une juridiction de même degré, la Cour de cassation ayant cassé et annulé "dans toutes ses dispositions" l’arrêt rendu l'an dernier.
C'est la cour d'appel de Versailles qui sera chargée de rendre un nouveau verdict.
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