Le 19 juillet dernier, Ian Hickson a publié un message dans la liste de diffusion du W3C (World Wide Web Consortium) concernant le HTML5. L'homme y annonce qu'un fork du langage venait d'être effectué, créant ainsi deux versions parallèles du langage de référence de la création des sites et applications web.
HTML5 : un langage à deux têtes
Pour mieux saisir l'impact de cette annonce, il faut comprendre comment le HTML5 est géré. La cinquième version de l'HyperText Markup Language, utilisé pour développer les pages web, est l'évolution du HTML 4 et du XHTML 1.1. Il permet, notamment, d'apporter du multimédia et de l’interaction aux sites sans avoir besoin d'ajouter de module complémentaire à son navigateur.
Il est toujours en développement. Des corrections et des nouvelles fonctionnalités lui sont donc régulièrement apportées. Ce sont les 375 membres (entreprises, universités, ministères…) du W3C, répartis en groupes de travail, qui supervisent ces travaux après que son développement ait été initié par le WHATWG (Web Hypertext Application Technology Working Group – composé des principaux développeurs de navigateurs).
Cette supervision ne veut cependant pas dire que le WHATWG a arrêté de plancher sur le langage ; jusqu'ici, il fonctionnait comme la cellule de recherche et développement du W3C. Mais c'est ce dernier qui décidait, après son processus de brouillons et de validations, quelles spécifications seraient retenues pour la version finale prévue en 2014.
Un divorce lourd de conséquences
Le WHATWG a toujours critiqué la lenteur de ce processus qui, d'après ses représentants, freine l'innovation et l'évolution du web. Il a donc décidé de travailler, de son côté, sur sa propre version du HTML5. "C'est difficile d'ajouter de nouvelles fonctionnalités quand vous essayez de bloquer une liste de spécifications" explique Hickson à TechCrunch, en taclant le W3C.
Deux versions du HTML5 cohabiteront donc. Celle du WHATWG, baptisée "living standard" pour montrer que ce sera celle qui évoluera, et celle du W3C appelée "snapshot standard" pour montrer qu'elle ne bougera pas, ou peu.
Seulement, les développeurs devront donc vérifier si chacune des fonctionnalités qu'ils souhaitent utiliser est prise en compte par les navigateurs. "Rien ne change pour [eux]" explique Ian Hickson. En effet, les spécifications du langage ne devant être finalisées que dans deux ans, et les navigateurs intégrant les fonctionnalités existantes à leur rythme, cette vérification était déjà devenue un réflexe.
Mais la promesse d'un standard unique laissait entrevoir le bout du tunnel et la fin de ce casse-tête qui leur fait perdre beaucoup de temps. Avec une version unique du langage, supportée par tous les navigateurs, les développeurs n'auraient pas eu de question à se poser.
Ils pourraient aujourd'hui être amenés à vérifier leurs sites sur chacun des navigateurs, voire à développer des versions spécifiques pour chacun d'entre eux comme dans les anciens temps, lorsqu'il fallait une version spécifique pour Internet Explorer. Adieu homogénéité du web, bonjour fragmentation.
Les navigateurs, juges et parties
Les navigateurs deviennent donc tout puissants. Ce n'est plus un organisme indépendant et impartial, le W3C, qui décidera des caractéristiques du langage mais des firmes comme Google, Mozilla ou Apple qui développent les navigateurs. Et si les éditeurs avaient déjà un pouvoir si important à la fin des années 1990, l'impact de leurs décisions était proportionnel à l'usage du web, qui était moins important qu'aujourd'hui.
Or, on peut douter de leur neutralité. Rien, aujourd'hui, ne peut plus garantir que les choix technologiques liés au web ne seront pas fait dans l'intérêt financier de ces entreprises. L'économie numérique s'est structurée ces 15 dernières années, passant d'un phénomène naissant à l'une des industries les plus puissantes du monde. Un tournant inquiétant pour l'avenir des internautes que l'on pourrait priver d'avancées technologiques au profit de considérations financières.
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