Olivier Bomsel. Ce nom vous dit peut-être quelque chose, puisqu’il est le co-auteur d’un rapport très contesté qui préconisait l’instauration d’une taxation de l’upload pour combattre le P2P. L’homme revient dans les colonnes de NetEco.com pour rappeler les valeurs indispensables de l’économie dans la culture.

L’économie doit-elle céder face au libre accès culturel, ou ce libre accès porte-il en lui sa propre destruction ? On ne demandera pas à Olivier Bomsel, chercheur au laboratoire Cerna d’Economie Industrielle de l’Ecole des Mines de Paris, d’être clair et concis dans cette réflexion en forme de plaidoirie. L’auteur est un analytique plongé dans une longue réflexion qui, une fois décryptée, reste toute aussi intelligente que contestable.

Intelligente parce que le discours est bien construit et raisonné, pensé et démontré avec la méthode du chercheur le plus strict. Contestable car pour suivre la réflexion de M. Bomsel, il faut être d’accord avec ce postulat qui veut que « les biens culturels ne sauraient échapper à l’économie« . Et l’auteur de remonter aussi loin que la Renaissance (qui coïncide grosso-modo avec les premières réflexions sur le droit d’auteur en Europe) pour démontrer que même la peinture revétait à l’époque une logique de production. Les princes que l’on dit mécène étaient en fait des producteurs, et en celà rien n’aurait changé. En France, « le seul discours autorisé concernant la culture est un discours interne à la nature des œuvres, aux émotions qu’elles donnent, aux artistes, aux auteurs… l’exception culturelle, en tant que doctrine de la protection de l’Etat, a conduit, jusqu’à ce jour, à ce que seul ce discours existe« .

Mais « les œuvres ne sont pas que des productions, ce sont aussi des marchandises car c’est en tant que marchandises qu’elles sont le plus largement diffusées« , nous dit Bomsel. Entamant un pamphlet économique contre la licence globale (qu’il appelle « obligatoire »), l’auteur nous indique que si les œuvres n’étaient que des productions, il n’y aurait pas d’économie. « On serait dans un dispositif comparable au socialisme soviétique dans lequel n’existaient que des auteurs, des inventions, des productions, et l’Etat, seul responsable de leur circulation« .

Olivier Bomsel, qui juge que « l’exception culturelle a déphasé la France dans son rapport à la propriété intellectuelle« , livre un plaidoyer en faveur d’un droit d’auteur indispensable selon lui à la création. Le chercheur nous livre une étude brillante sur le modèle économique de la culture (devrait-on dire de l’industrie culturelle), qui se base sur la livraison successive et à tarifs étudiés d’un même produit. Tel film sera d’abord livré au cinéma avant d’attérir dans les vidéoclubs puis sur les chaînes payantes avant d’être, en fin de course, accordées à cette vilaine chose qu’est la télévision en clair… comprenez gratuite. Et Bomsel la fustige, cette télévision en clair qui nous inonde de publicité et qui désiquilibre le marché. Pour l’auteur, le P2P est la télévision en clair de l’Internet, mais il faut tout tenter pour que son contenu s’appauvrisse et qu’enfin se développent les télévisions payantes qui seules sont capables de financer la création.

Vive le monopole pour assurer la diversité
Bomsel aime les positions monopolistiques en matière de culture, la concentration de l’offre. Sur cette licence globale qui donnerait à tous la possibilité de devenir distributeur et donc d’accroître la diversité de l’offre, l’auteur réplique qu’il est « illusoire de penser que la diversité peut s’accroître du seul chef de l’extension des canaux de diffusion, alors même que la sélection devient plus concurrentielle et coûteuse« . Car pour qu’une œuvre rapporte de l’argent, et donc pour qu’elle finance la création, il faut « avant toute chose un système de sélection et de signalisation efficace en sorte que la distribution soit économiquement viable« . En clair, il faut des campagnes de publicités, du matraquage marketing : de la visibilité.

« La maîtrise des marchés suppose, d’une part, de trouver le bon ordonnancement des versions et des tarifications associées, et d’autre part, de faire respecter l’application des droits en sorte que les offres gratuites contournées (le piratage) ne polluent pas les marchés de versions payantes« . Tout mais pas la gestion collective et l’accès illimité aux œuvres, à toutes les œuvres.

Finalement, conclue Bomsel : « la question de savoir comment les ordinateurs protégeront les contenus et quel sera leur rôle en tant que point d’entrée dans l’espace domestique, est largement ouverte« . Et l’auteur de n’apporter aucune réponse à cette question qui n’en a pas. Et un beau et long discours de perdre toute efficacité en ce simple constat d’impuissance face à un modèle économique (qui n’est qu’un modèle) insoutenable sur Internet.

Une seule chose rassemblera Olivier Bomsel et les P2Pistes : « une standardisation rapide, au niveau européen, des systèmes de gestion de droits numériques (DRMs) visant une interopérabilité des fichiers quel que soit l’équipement terminal, soutiendrait le déploiement d’Internet et réduirait les pertes de tous les autres réseaux« 

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