Alors que les débats sur la loi DADVSI devraient reprendre en mars, le PS dénonce les vilains petits canards de son groupe qui soutiennent la proposition d’une licence globale. En introduction du rapport (.pdf) rédigé par Franck Laroze qu’elle a remis ce week-end, la secrétaire nationale à la Culture Anne Hidalgo indique que « la réponse par la licence globale est inadapatée » et qu’elle a été défendue par certains « sans en mesurer immédiatement toutes les conséquences« . La section Culture du Parti Socialiste propose alors de réformer le droit d’auteur de façon à systématiser la chronologie des média bien connue pour la vidéo, et créer une sorte de domaine public d’Internet pour autoriser la diffusion des œuvres après une période d’exploitation commerciale réservée (par exemple 18 mois après la sortie en salle pour un film). « Si, durant ces périodes d’exploitation commerciale ‘raisonnables’ et clairement détaillées/accessibles au public, ces œuvres étaient mises en circulation sur des sites peer-to-peer ou ailleurs, les sanctions civiles, et en aucun cas pénales, classiques s’appliqueraient« , aussi bien pour les internautes responsables « que pour les sites hébergeurs de ces logiciels de téléchargement« .
Or pour mettre en œuvre une telle fenêtre d’exploitation réservée, il faut pouvoir vérifier qu’une œuvre est désormais accessible aux internautes. C’est le rôle du « répertoire numérique national » que le PS propose de mettre en place, sur le modèle des Creative Commons. Les producteurs auraient la responsabilité de déclarer leurs œuvres et les droits qu’ils entendent réserver. Les internautes auraient alors le devoir de consulter le répertoire avant d’accéder à une œuvre, sous peine de sanction civile (ou pénale si échelle commerciale) pour violation de la volonté de l’auteur.
Là encore, il faut pouvoir faire respecter ce répertoire national, c’est pourquoi le PS propose un « dispositif de contrôle et de filtrage à la fois des logiciels et des sites de P2P« . « En cas de refus/manquements répétés et constatés aux règles mises en place, ils seraient définitivement fermés et les responsables condamnés« .
Copie à revoir
Et l’on voit bien ici ce que l’on préssentait déjà lorsque le PS évoquait la responsabilité des « sites hébergeurs de logiciels de téléchargement » : la section Culture du Parti Socialiste nage dans une profonde ignorance de la réalité pratique du P2P. Le rapport long de 60 pages évoque longuement la question des DRM (dont elle conclue qu’il faut les interdire, alors que la directive impose de les protéger), mais n’effleure qu’à peine les spécificités techniques et juridiques du P2P. Or il faut le rappeler et le marteler, les principaux logiciels de P2P actuels que sont eMule, Shareaza, BitTorrent ou DC++ ne sont l’œuvre d’aucune personnalité juridique que l’on peut condamner ou auprès de qui l’on peut exiger la mise en place de mesures techniques. Il s’agit de logiciels open-source créés par des communautés d’utilisateurs du monde entier, qui ne subissent l’effet d’aucune loi. Compter sur eux pour la mise en œuvre d’un « répertoire numérique national » est une dangereuse utopie lorsque le responsable de second plan reste l’internaute qui sera encore et toujours passible de sanctions civiles.
En outre le PS demande « l’instauration d’une redevance modique prélevée directement auprès des FAI sur chaque abonnement Internet ». Cela ressemble fort à la « taxe sur les abonnements » de la licence globale, à la différence près qu’ici la « taxe » ne donnerait aucun droit aux internautes, et serait intégralement réservée au financement de nouvelles « actions culturelles ».
Pour rejeter la licence globale, Anne Hidalgo notait qu’elle était « une notion pas pratiquable concrètement« . Pourquoi ? Difficile d’en savoir plus. Elle ajoute que les « perception, répartition et contrôle des sommes à réserver aux auteurs sont impossibles à réaliser dans la transparence« . On peut s’étonner que le PS trouve possible de réaliser une interrogation systématique d’un « répertoire national » mais qu’il devient soudainement impossible de réaliser une interrogation similaire pour comptabiliser l’utilisation des œuvres dans le cadre d’une licence globale. Elle note également que la licence ne peut s’harmoniser au niveau international et européen, alors que rien ne semble l’empêcher. Et enfin, dans une envolée lyrique sans fondement classique des opposants à la licence globale, Anne Hidalgo prétend que la licence globale « signe à très court terme la mort des droits d’auteur, de la création, des labels indépendants (voués à disparaître dans les trois années à venir), et donc de l’exception et de la diversité culturelles« .
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