Facebook, qui fait appel bénévolement depuis plusieurs mois à différents médias pour épingler les fausses actualités partagées sur sa plateforme, se dit prêt à les rémunérer. L’initiative, attendue par certaines rédactions, traduit la position d’équilibriste du réseau social, qui entend lutter contre les « fake news » sans s’impliquer directement.

Facebook va peut-être enfin financer directement la lutte de ses partenaires contre les articles de désinformation. Trois mois après son alliance avec différents médias français — dont Le Monde, l’AFP et Franceinfo — et quelques semaines après le lancement du projet CrossCheck, à dimension européenne, le réseau social se dit prêt à rémunérer les différents groupes qui ont accepté de vérifier la véracité des contenus signalés par les utilisateurs.

Adam Mosseri, vice-président des innovations liées au fil d’actualité, l’affirme au Financial Times : « Une relation commerciale est envisagée et nous y sommes très ouverts. Tout dépendra de [chaque organisation] mais nous tenons à nous impliquer de manière responsable et s’il faut passer par un accord financier, c’est tout à fait possible de notre côté. »

Cette soudaine ouverture est-elle liée à la demande insistante des rédactions impliquées dans ce travail de fact-checking ? Dès le début de son implication, en février, Le Monde avait averti : « De chaque côté, on sait que si l’expérimentation devait se prolonger, la question des compensations pour le travail spécifique que les médias réaliseraient serait nécessairement posée. Même s’il ne s’agit dans un premier temps, de part et d’autre, que de tester et d’évaluer. » D’autres grands groupes de presse, comme le géant allemand Axel Springer, ont en revanche refusé d’aider Facebook dans cette voie, estimant qu’un tel travail outrepassait le rôle de ses journalistes.

Facebook
Facebook refuse de se considérer comme un média

Facebook continue de multiplier les initiatives de lutte contre la désinformation : outre le financement d’un fonds de 14 millions de dollars dédié au journalisme, le réseau social déploie, pendant 3 jours et dans 14 pays, un message contenant des « astuces » pour repérer les fameuses « fake news ». Adresses douteuses, fautes d’orthographe ou coquilles, photos truquées… l’idée est d’apprendre à ses utilisateurs à identifier ces contenus mensongers.

Si l’effort est louable, la meilleure solution pour réduire considérablement le nombre de ces contenus reste de s’attaquer au porte-monnaie de ses créateurs. Facebook est lui-même sous pression financière de l’Allemagne pour lutter plus efficacement contre les publications haineuses et les articles de désinformation sur les réseaux sociaux, même si le pays vient d’atténuer son projet de loi, qui envisageait initialement une sanction immédiate de 50 millions de dollars.

Le réseau social refuse toutefois de devenir juge des contenus publiés sur sa plateforme. Adam Mosseri est le premier à le rappeler : « Comme plusieurs experts l’ont affirmé, la législation allemande oblige les entreprises privées comme Facebook, plutôt que la justice, à trancher sur ce qui est illégal, et c’est inquiétant. Je pense que les tribunaux sont plus compétents que des entreprises privées pour décider ce qui est illégal ou pas dans leur pays. »

Facebook, qui refuse d’être considéré comme un média, avait pourtant moins de réserves au moment de censurer la photo historique de la petite fille brûlée au Napalm, prise pendant la guerre du Vietnam, techniquement non conforme à ses conditions d’utilisation, avant de faire machine arrière face au tollé provoqué par cette suppression.

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