Le marché des box TV n’est pas le plus développé en France. En effet, contrairement aux États-Unis, notre marché se structure autour des box des opérateurs qui ont eu depuis leur apparition le rôle de pilier central de l’offre télé. Mais dans d’autres pays, la guerre fait rage pour contrôler le salon : c’est pour cela que les consoles, notamment, deviennent des stations multimédia de plus en plus complètes ou qu’on ne conçoit plus une télévision sans son interface smart.
Cela dit, même dans nos contrées, on commence à voir les limites des box des opérateur. Les interfaces sont moyen-âgeuses, tout rame, on manque de compatibilité avec le reste du matériel et on a de plus en plus l’impression de payer un service qu’on n’utilise pas — nombreux sont ceux qui aimeraient avoir une simple connexion fibre ou ADSL plutôt qu’une offre combinée. À l’autre bout de la chaîne, les constructeurs de télévision peinent à maîtriser la technique et même sur des téléviseurs à plusieurs milliers d’euros, on trouve des intégrations d’Android TV complètement horribles qui ont fait s’arracher les cheveux à nos confrères de FrAndroid plus d’une fois.
La box TV semble donc petit à petit trouver une légitimité dans nos foyers. La dernière Apple TV est un petit bijou d’ergonomie et de vitesse à qui il manque peut-être seulement la 4K pour nous combler. Côté Android, les prétendants sont peu nombreux, mais qu’importe, l’alternative existe. Et en 2017, elle se nomme Shield et coûte 209 €.
Hardware et design
La Nvidia Shield est une petite box Android équipée d’une configuration qui la rapproche de la Switch de Nintendo (elles partagent la même puce Tegra X1, qui a été personnalisée par Nvidia pour Nintendo). Elle est vendue avec une télécommande et une manette sans fil qui se recharge sur batterie. Son port HDMI est capable d’envoyer vers un téléviseur compatible un flux 4K HDR et elle peut décoder les standards Dolby Atmos et DTS-X niveau audio, via le port HDMI. La version de base embarque 16 Go de stockage, extensibles avec des périphériques externes — du disque dur à la clef USB.
Côté connectivité, vous trouverez 2 ports USB 3.0 (Type A), un port HDMI 2.0b et un port Ethernet. C’est un peu moins fourni que sur la précédente version, mais la Shield gagne ainsi un côté compact fort appréciable. Avec ses 250 grammes et ses mensurations de 9,8 cm de large par 15,9 cm de long, vous pourrez complètement la faire disparaître dans un meuble et ne plus jamais la voir si le minimalisme de votre mobilier vous tient à cœur. Par rapport à la version 2016, on note aussi que le bouton pour l’allumer est bien moins grand et donc moins pénible : on avait tendance à l’allumer et l’éteindre par mégarde à chaque fois qu’on branchait un accessoire.
La Shield TV est accompagnée d’un gamepad bien plus ergonomique que celui de 2016, qui ressemblait à la manette BigBen que vous filiez à vos copains quand vous les invitiez pour jouer à la console. On se retrouve sur cette version avec une manette effilée qui tient bien en mains et qui permet de jouer confortablement — les manettes des concurrents restent compatibles quoi qu’il arrive. C’est elle qui a désormais les fonctionnalités de la précédente télécommande : elle embarque un micro que vous pouvez configurer en always on pour activer les fonctions de Google Assistant. La manette se recharge en micro-USB et tiendra 60 heures sans broncher — une estimation qu’on peut confirmer sans mal.
À côté, la télécommande classique est un peu plus cheap et moins élégante que celle de l’Apple TV. Nvidia a troqué les fonctionnalités avancées de la précédente télécommande pour en faire un modèle moins cher. Exit donc le micro always on et la recharge sur batterie. Elle gagne ainsi en autonomie et permet au constructeur de vendre son bundle premier prix moins cher : la Shield de génération précédente était vendue sans manette — un peu dommage pour une box TV qui a quand même une grosse partie de son ADN basée sur le jeu.
Mais toutes ces belles caractéristiques n’ont aucun sens si l’on ne sait pas ce que la Shield TV peut faire. Et il faut reconnaître qu’elle peut faire beaucoup.
Android TV, le multimédia ultime ?
Si vous avez envie de remplacer votre box ADSL / Fibre ou l’interface de votre téléviseur par une box TV, il faut quand même qu’elle puisse s’en sortir sur les fonctions de base. La première, c’est évidemment d’admirer passivement un flux vidéo divertissant. Autrement dit, regarder la télé.
Bien évidemment, la Shield n’est pas compatible avec votre bonne vieille TNT des familles. Vous pourrez toujours garder la prise branchée derrière votre écran en cas d’urgence. Mais tout l’intérêt de la Shield TV, c’est qu’elle tourne sous Android — elle est donc compatible avec toutes les applications du Play Store et embarque en plus quelques exclusivités.
Par exemple, avec Molotov, il n’y a plus vraiment de raison de passer par un canal télévisuel normal. L’application française est vraiment bien fichue et vous pourrez retrouver toutes vos émissions présentées de manière moderne dans une grille. Il est possible de regarder les chaînes disponibles en direct ou en replay et la qualité du stream, si elle n’est pas exceptionnelle (surtout sur une TV 4K) est souvent bien suffisante pour regarder un match ou une émission politique.
La Shield TV embarque également Netflix et Amazon Vidéo (il faut, cela dit, la basculer en version US pour que l’application soit disponible, Amazon n’ayant pas encore négocié cette exclusivité en France). Si vous suivez nos programmes, vous savez que vous aurez de quoi faire niveau divertissement ou culture cinéma / séries. Côté Netflix, c’est d’ailleurs l’une des manières d’accéder à la meilleure qualité de streaming possible, la box étant compatible 4K et HDR — contrairement à l’Apple TV actuelle qui ne sort que du 1080p sans HDR.
Le seul bémol de l’offre multimédia concerne les films et les séries achetés à l’acte. Pour le coup, la VOD selon Google est à des kilomètres d’iTunes Movies. Il est rare qu’on trouve des VO en Full HD et le catalogue empile les niaiseries et les blockbusters sans une véritable ligne éditoriale. À l’inverse, la VOD d’Apple est presque un sans faute pour les cinéphiles, possédant un catalogue de films indépendants — français et internationaux — et une flopée de séries, le tout en version originale et dans la meilleure qualité que peut offrir la box pommesque.
Pour pallier ce défaut, vous pourrez peut-être vous tourner vers Plex. Si vous êtes du genre à avoir beaucoup de sauvegardes de vos DVD et Blu-Ray qui entrent sous le coup de l’exception à la copie privée, vous connaissez peut-être déjà ce lecteur multimédia en réseau qui vous permet de regarder votre vidéothèque à peu près depuis n’importe quelle machine. La Shield TV, en plus d’être un lecteur des fichiers qui pourraient être streamés depuis un NAS ou un autre ordinateur a aussi la possibilité de devenir serveur Plex. Cela signifie que vous pouvez vous faire votre petit service de streaming personnalisé directement depuis la Shield. Cela fonctionne parfaitement et la vox est aussi compétente pour envoyer des fichiers que pour les décoder.
À l’usage, on regrette seulement l’interface hyper austère d’Android TV. Tout est sombre et en nuances de gris sur gris. L’ergonomie générale n’est pas non plus idéale : on se prend à découvrir des fonctionnalités essentielles après des heures d’utilisation (vous pouvez redéplacer les raccourcis vers les applications sur la home en maintenant le bouton de sélection appuyé…) et parfois, les interactions sont absurdes.
Il est par exemple impossible de sortir de certaines applications en appuyant sur la touche retour : il faut revenir au bureau qui passe en sur-impression de l’application et changer ici… bref, un système d’exploitation qui gagnerait à connaître une cure de jouvence. Même sous Android 7.0 Nougat, l’interface semble dépassée. Mais au moins, contrairement à celle qu’on trouve sur les TV, elle ne rame pas.
Shield TV : la console de jeu qui se cache
Quand on prononce « Nvidia », on pense tout de suite aux cartes graphiques. Du coup, ce n’est pas étonnant que le constructeur ait mis le paquet sur les fonctions dédiées aux joueurs. Comme nous l’avions mentionné en introduction de ce test, la Shield TV offre une compatibilité vraiment large avec les pads des différents constructeurs — les fameuses manettes Xbox 360 fonctionnent par exemple à merveille et se négocient pour une bouchée de pain aujourd’hui. Mais Nvidia ne s’est pas exprimé uniquement sur le matériel — l’offre de la Shield TV se décline aussi sur le logiciel.
GeForce Now : nous avons consacré un article détaillé à GeForce Now l’an passé. Il s’agit en effet d’un service de streaming de jeu vidéo par abonnement ou en achat à l’acte. Pour 9,99 € par mois, vous pourrez accéder à une sélection de titres complets en streaming, issue du catalogue compatible PC. Ils sont exécutés sur des serveurs distants et streamés sur votre Shield. Autant dire qu’il faut une bonne connexion pour profiter de la définition maximale (1080p à 60 images par seconde) : la fibre en Ethernet ne sera pas de trop. Sinon à la manière d’un Netflix, l’outil peut réduire la définition des jeux afin qu’ils soient jouables confortablement même avec un débit réduit — Nvidia recommande simplement de l’ADSL.
Depuis notre test, GeForce Now a évolué et tourne maintenant sur des cartes Pascal. Cela signifie que les jeux sont nettement plus beaux que ce qu’ils étaient il y a un an, lancés sur des GTX d’un autre temps. Cela dit, cette mise à jour ne corrige pas les deux autres défauts du catalogue : le prix des jeux en stand alone est élevé et le catalogue de jeux inclus dans l’abonnement n’est pas extrêmement fourni — surtout pour jouer à plusieurs. Nvidia travaille sur ces deux points, notamment avec un premier partenariat avec Ubisoft : tous vos jeux Uplay pourront être accessibles sur GeForce Now et tous les jeux Ubisoft achetés sur la Shield seront jouables sur n’importe quel PC. Malin.
Jeux Android exclusifs : en plus de faire tourner tout le catalogue de jeux Android TV dans leur définition maximale (pensez à Asphalt 8 par exemple), Nvidia propose des jeux exclusifs à télécharger dans la mémoire de la console. Le problème, c’est que si la prouesse est notable, les jeux sont souvent vieillots et payer Half-Life 2 (sans ses épisodes) 10,99 € pour jouer à un FPS au pad, c’est un gros non. On apprécie plus les puzzle games comme Talos Principle, les party games comme Pix the Cat ou les jeux typés console comme Trine 2.
Gamestream : là, on commence à faire le grand écart, en passant du casual gaming au joueur exigeant. Vous pourrez en effet profiter de Gamestream si vous avez un gros PC avec une carte Nvidia compatible à l’intérieur. Si la techno est supportée depuis les GTX 650, elle devient vraiment intéressante en termes de qualité à partir des 980. La gamme Pascal est évidemment au top.
Le principe est simple : Gamestream vous permet de jouer à vos jeux PC directement sur votre télé. Une fois configuré sur votre PC, le système envoie sur le réseau filaire un flux du jeu sur la Shield qui affiche le jeu dans la définition maximale de votre téléviseur. Cela signifie que vous pourrez jouer à un jeu 4K sur votre télé même si votre écran d’ordinateur n’est pas 4K. Le système fonctionne vraiment très bien pour la plupart des titres et permet de transformer un PC, système de jeu plutôt solitaire ou en ligne, en une console de salon.
Steam Big Picture, la cerise sur le gâteau : les joueurs seront ravis d’apprendre que la dernière version de la Shield prend désormais en charge Big Picture de Steam de manière native. Cela signifie qu’il s’agit d’une application que vous lancez depuis la page d’accueil qui va aller déclencher l’application sur votre ordinateur. Vous retrouvez alors l’interface de Steam adaptée au pad, mettant en avant vos jeux compatibles. Quand on sait que Valve vend des Steam Link à 54 € qui font la même chose sans tout le reste, on se dit que la Shield peut être un investissement rien que pour profiter de cette option.
Nous avons testé plusieurs heures ces différents services et nous pouvons remarquer que Nvidia fait, à vrai dire, un grand écart entre le casual et le hardcore gamer. En effet, le joueur console qui souhaite bénéficier des exclusivités et du confort pour jouer entre amis d’une console de salon n’abandonnera pas sa Switch ou sa PS4. Il ne trouverait sur la Shield que des jeux qu’il connaît déjà, un catalogue trop pauvre ou des fonctions dédiées aux joueurs PC.
En revanche, le joueur occasionnel a de quoi s’éclater de nombreuses heures avec GeForce Now, que ce soit sur l’abonnement mensuel ou via les jeux proposés à l’unité auquel il ne pourrait pas accéder sans investir dans un gros PC — on pense notamment au catalogue Ubisoft ou à des titres exigeants comme The Witcher 3. De l’autre côté du spectre, le joueur PC qui a une belle configuration à la maison et une ludothèque colossale trouvera dans la Shield TV une extension plaisante à son cher ordinateur, qui lui permettra de jouer à des jeux depuis son canap sans avoir à bouger sa tour.
Corentin entre dans la première catégorie et s’éclate sur Asphalt 8, j’entre dans la deuxième et je suis enchanté de pouvoir jouer avec des amis à Rocket League sur ma télé sans avoir à chambouler mon salon.
Centre domotique et assistant virtuel
En tournant sous Android, la Shield perd sur plusieurs points par rapport à l’Apple TV (notamment l’interface ou le catalogue de films) mais gagne en performance à chaque avancées de Google. Par exemple, en termes de reconnaissance vocale, elle est loin devant ses concurrentes. La recherche Google est bluffante, capable de reconnaître des artistes, des films, des noms d’applications ou des chansons et autres albums, quel que soit votre accent. Elle est aussi suffisamment intelligente pour corriger vos bêtises (exemple : nous avons demandé un navigateur de fichiers et elle a compris que nous souhaitions télécharger un explorateur de fichiers).
Demain, rien n’empêche à la Shield de devenir un Google Home. Il suffit pour cela que Google Assistant soit fonctionnel sur la machine et le tour est joué : elle dispose déjà d’un micro always on sur la manette et elle peut diffuser du son sur un téléviseur ou des haut parleurs connectés. Rien n’empêche non plus Nvidia de nouer des partenariats avec d’autres marques pour implanter d’autres services, qu’il s’agisse d’assistants vocaux ou de centres liés à la domotique — après tout, l’entreprise est déjà partenaire avec Ubisoft, plusieurs studios de développement pour les jeux exclusifs Android et Amazon pour Amazon Video.
Sous cet angle, la Shield devient donc bien plus qu’une box TV et il y a fort à parier que Nvidia n’abandonne pas son bébé de si tôt. Côté utilisateur, c’est tout cela qu’il faut prendre en compte : la Shield est un bac à sable sous Android avec toutes les fonctionnalités de l’OS de Google pour les télévisions, le penchant gaming de Nvidia et les éventuels partenaires qui viendront compléter sa position de hub au centre du salon.
Pour nous, c’est un pari gagné.
La Nvidia Shield TV est disponible à partir de 209 €.
Le verdict
Nvidia Shield (2017)
On a aimé
- Box complète et polyvalente
- Les fonctions liées au jeu vidéo
- Couteau suisse prêt pour l'avenir
On a moins aimé
- Android TV & Play Films
- 16 Go de stockage
- Prend la poussière
Aujourd'hui, si vous cherchez une bonne box multimédia 4K HDR sous Android, il n'y a pas vraiment d'alternative à la Shield TV. Et cette absence de concurrence réelle n'a pas accouché d'un monopole de la médiocrité : la Shield fait tout ce que vous voulez d'une télévision et le fait très bien.
Elle séduit également par son côté couteau suisse, capable de répondre aux attentes des joueurs comme à celles qui imagineront la domotique de demain. Elle tire toute la puissance d'Android à laquelle Nvidia a ajouté une bonne dose de savoir faire côté jeux vidéo.
On regrette simplement qu'elle prenne aussi les défauts du système d'exploitation, austère et peu intuitif. Vivement une mise à jour !
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