Diffusée sur le nouveau blog de Christian Paul, la lettre ouverte des députés socialistes s’adresse aux artistes. « Nous sommes fermement attachés au droit d’auteur« , tiennent à rappeler les défenseurs de la licence globale, « et nous prenons acte d’une révolution technologique qui facilite la copie et l’échange privés des œuvres culturelles« . « Nous percevons que cette mutation exige une adaptation de ce droit. la retarder, l’on viendrait à la subir« .
Le décor est placé. On peut gloser des années sur le principe de la défense des auteurs, mais le pragmatisme invite à réagir au plus vite pour réformer en profondeur le droit d’auteur sur Internet. Et réformer, ça n’est pas tout autoriser et ne pas penser aux auteurs. « Nous n’instaurons pas la gratuité« , insistent les trois parlementaires. « Alors que les plates-formes commerciales génèrent 20 millions d’euros, nous estimons de manière réaliste qu’un prélèvement acceptable sur l’internet rapportera au moins dix fois plus dès la première année, et davantage que le préjudice supposé du téléchargement« .
Maintenant que la question du droit de l’accès à la culture se joue uniquement sur le terrain économique, il faut parler en euros pour séduire les artistes, et les convaincre que la licence globale est le modèle économique qui rapportera le plus. « La répression molle aujourd’hui graduée n’aura que peu d’effet dissuasif. Elle est un leurre, faute d’une vision prospective et de réponses durables. Elle banalise de fait la gratuité« , notent-ils avec une certaine justesse. Payer si l’on est pris 38 euros l’amende de téléchargement coûtera beaucoup moins cher que payer tous les mois quelques euros de licence globale. Et là où l’amende n’alimentera que les caisses du Trésor Public, la licence globale, aussi imparfaite soit-elle, serait redistribuée aux créateurs.
Pour MM. Bloche, Mathus et Paul, la question essentielle du montant de la licence globale et de son mode de répartition doivent se poser « après que la loi ait fixé des principes« . « Nous entendons bien que la rémunération soit indexée sur la réalité des échanges privés et que la répartition soit équitable pour chaque artiste« , précisent-ils avant de rappeler que la licence globale ne concerne pas le cinéma, dont « la spécificité de son financement et la chronologie des médias ne permettent pas de construire, dans l’urgence que nous subissons, un modèle acceptable.« .
La grande inconnue du 7 mars reste toutefois l’état du rapport des forces dans les rangs de l’Assemblée. En décembre, les trois députés PS avaient argué de la délégation de Jean-Marc Ayrault, le président du groupe socialiste à l’Assemblée, pour parler au nom de tous les socialistes. Depuis, les voix dissidentes se sont publiquement exprimées à gauche, et la droite dissidente de M. Suguenot et Mme Boutin semble s’être fragilisée, sans toutefois qu’aucune assurance n’en soit donnée. Tous les députés, de droite comme de gauche, auront toutefois devant eux le regard de millions d’électeurs qui attendent une loi forte pour garantir leurs libertés et le droit d’être eux aussi diffuseurs de culture sur Internet.
En décembre, le débat sur le projet de loi DADVSI avait établi un record de connexions sur les retransmissions en direct des séances de l’Assemblée nationale. Nul doute que le record sera encore battu la semaine prochaine. Nous serons bien sûr là pour couvrir l’ensemble de la discussion.
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