Hervé Le Crosnier, maître de conférence à l’Université de Caen, rapporte la nouvelle qui démontre une nouvelle fois l’urgence de ne pas transposer le projet de loi DADVSI dans l’urgence. L’impact de la directive européenne sur le droit d’auteur va passer au peigne fin. Mardi, « à Bruxelles, dans la réunion de la TACD (Trans Atlantic Consumer Dialogue), M. Leonardo Cervera Nava, responsable des Droits d’auteurs à la Commission européenne, a annoncé que cette directive allait être soumise à une étude approfondie« , rapporte M. Le Crosnier. « Pas seulement une évaluation des transpositions nationales, mais bien une évaluation pour savoir si EUCD a réellement favorisé les objectifs fixés« .
« En clair, l’évaluation portera sur le rôle du copyright dans l’économie du savoir, sur le rôle des consommateurs, sur les mesures techniques de protection et toutes les difficultés qu’elles peuvent entraîner pour les détenteurs de droits, les consommateurs, les chercheurs et les bibliothèques« .
Mais il y a mieux encore. C’est le professeur Bernt Hugenholtz qui sera en charge de cette évaluation. Il a déjà produit des travaux très intéressants, « notamment sur les brevets de logiciels pour le Parlement européen« , note Hervé Le Crosnier (et il faut rappeler que c’est le Parlement qui a fait obstacle à l’adoption du brevet logiciel). En 2000, avant même l’adoption de l’EUCD, Bernt Hugenholtz écrivait déjà que « la Directive ne fait pas grand
chose pour les auteurs« . « Elle est orientée dans le sens de la protection des droits et des intérêts de majors de l’industrie de l’information
(producteurs, médias et utilisateurs institutionnels), mais pas dans celui des auteurs qui fournissent le « contenu » qui fait vivre ces industries« , accusait-il.
La difficulté du débat sur le projet de loi DADVSI en France a mis en lumière les très nombreuses imperfections voire les incohérences totales de la loi dans l’environnement numérique. Dans une Europe qui crie son envie d’une Union plus sociale, le débat DADVSI a mis en exergue le peu de cas fait aux consommateurs par rapport aux industries de la culture.
Toutefois la Commission européenne n’aura que peu de marge de manœuvre pour revenir si elle le souhaite sur la directive EUCD. La directive est en effet elle-même issue d’accords internationaux signés par l’Europe à l’OMPI sous l’égide de l’OMC en 1996, et l’Europe devra dénoncer ces traités si elle veut retrouver son autonomie en matière de droits d’auteur. Une telle dénonciation semble politiquement impossible, et c’est une remise en cause mondiale des traités vieux de 10 ans qui devra avoir lieu. Le chemin est long, mais chacun sait que la voie est inéluctable.
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