En 2012, Facebook franchissait la barre du milliard d’utilisateurs actifs. 5 ans plus tard, le réseau social est parvenu à doubler la mise, grâce à une stratégie de croissance portée par une équipe dédiée, mais aussi à l’aide d’innovations nées de situations imprévues.

Considéré par certains comme vieillissant ou inadapté aux usages des plus jeunes, Facebook parvient, depuis sa création en 2004, à poursuivre sereinement sa croissance. Un exploit d’autant plus impressionnant au vu des récentes polémiques qui frappent le réseau social, entre les fake news, les contenus de propagande terroriste ou encore les violences retransmises en direct.

Le réseau social vient même d’établir un record inédit dans le monde des réseaux sociaux : franchir la barre des 2 milliards d’utilisateurs actifs — ceux qui se connectent au moins une fois par mois –, un chiffre colossal comparé à la population mondiale (plus de 7 milliards de personnes).

Ce nouveau palier était attendu depuis un moment par le fondateur de la plateforme, Mark Zuckerberg, qui affirmait il y a peu : « Nous estimons que notre responsabilité croît encore, tout particulièrement en dépassant cette étape importante de 2 milliards d’utilisateurs au sein de la communauté. »

Comment Facebook est-il parvenu à ce record ? Grâce à une équipe dédiée à la croissance, à quelques coups du sort et à une attention particulière accordée aux zones du monde les moins connectés. Histoire d’une ascension opérée par étapes progressives, des 100 millions d’utilisateurs en 2008 aux 500 millions de 2010 et enfin aux 2 milliards de 2017.

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CC Ken Yeung

De The Facebook à Facebook

À l’origine, quand Facebook était encore un simple réseau social destiné aux étudiants d’Harvard et connu sous le nom de « The Facebook », Mark Zuckerberg avait déjà connu une croissance rapide de sa plateforme avec près de 900 utilisateurs inscrits moins d’une semaine après son lancement.

Au fur et à mesure de l’expansion de sa plateforme, le jeune entrepreneur constitue une équipe de 8 personnes chargée d’un unique objectif : s’assurer que Facebook continue d’attirer de nouveaux membres. L’une des premières recrues du service, Javier Olivan, travaille encore au sein de l’équipe plus de dix ans après.

Celui qui est aujourd’hui vice-président de la croissance de Facebook reconnaît volontiers auprès de Fast Company avoir commis une erreur de jugement : « Je pensais que la croissance la plus rapide se ferait au moment où nous nous sommes lancés dans différentes langues, en rendant [Facebook] accessible pour énormément de monde dans différents pays. Mais il s’avère que nous sommes aujourd’hui au sommet de notre croissance, quelques années plus tard. »

Aquila, le drone solaire de Facebook.

Aquila, le drone solaire de Facebook.

Facebook Lite, Aquila… Facebook mise sur les initiatives locales

L’équipe dresse rapidement un constat essentiel : pour continuer à voir le nombre d’utilisateurs croître au-delà des zones déjà conquises, il faut s’assurer que de plus en plus de personnes puissent avoir accès au web dans le monde. C’est ainsi que sont nés les projets de connectivité accrue portés par Facebook, comme l’Aquila, le drone solaire chargé de s’élever en haute altitude pour fournir un accès Internet aux régions les moins connectées. Ou encore le projet Free Basics, consistant à fournir un accès mobile gratuit à Internet en Inde — même si l’initiative s’est soldée par un échec face à la résistance du régulateur local des télécoms.

La période correspond à l’essor du mobile comme nouveau support de navigation sur le web. Facebook est convaincu qu’offrir un accès à Internet au plus grand nombre reste le meilleur moyen de séduire de nouveaux utilisateurs. Mais au lieu de proposer son service tel quel, le réseau social s’adapte au manque de réseaux et aux lacunes technologiques des téléphones en question. Début 2015, il finit ainsi par lancer Facebook Lite, une version allégée conçue pour des réseaux mobiles en 2G.

Le réseau social s’adapte aussi aux pratiques locales : dans les pays où un même téléphone est utilisé pour deux comptes différents, Facebook crée une option qui permet le partage de l’appli sans avoir à se déconnecter à chaque fois. Aujourd’hui, l’entreprise continue de concentrer ses efforts sur le mobile et les marchés émergents — tout en investissant dans la réalité augmentée, qu’elle considère visiblement comme la prochaine révolution des pratiques.

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CC Maurizio Pesce

Le mur des 70 millions

Le géant du web ne compte pas à son actif de transformation majeure à l’origine d’un mouvement massif d’inscriptions : il a plutôt implémenté, par petites touches, différents changements qui lui ont permis de poursuivre sa croissance. Le réseau social a ainsi simplifié au fil des années la procédure d’inscription : disparue, la page seulement accessible après un clic sur l’accueil du réseau social. À la place, l’intégration au sein de la communauté se fait à partir de 7 champs à remplir directement, qui peuvent dans la foulée importer leur carnet d’adresse pour gagner encore en rapidité.

Pour analyser les usages de ses membres — comme les nouveaux inscrits qui utilisent de moins en moins la plateforme jusqu’à disparaître –, Facebook s’appuie notamment sur des responsables spécialistes du marketing, comme Alex Schultz, un ancien d’eBay. Il se souvient de la difficulté de franchir la barre des 70 millions d’utilisateurs avant 2008 : « Tout le monde se disait : « On va avoir des milliards d’utilisateurs, le monde entier va rejoindre [Facebook] et puis tout s’est arrêté à environ 70 millions. À ce moment-là, tout le monde a paniqué et s’est demandé si on arriverait seulement à 100 millions d’utilisateurs. »

En bon stratège, Mark Zuckerberg charge alors l’un de ses cadres, Chamath PaIihapitiya, de mener cette mission d’expansion dans le monde. Elle passe selon lui par une stratégie : l’ajout de différentes langues sur la plateforme. Mais au lieu de les intégrer mécaniquement, Facebook propose à ses utilisateurs de les ajouter eux-mêmes. Différents dialectes gagnent ainsi la plateforme grâce à un travail effectué par des passionnés. Le réseau social compte désormais plus de 100 langues.

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Le Safety Check, une fonctionnalité née de Fukushima

Après avoir finalement séduit 100 millions d’utilisateurs, Facebook se penche, début 2009, sur l’efficacité de ses techniques de « recrutement ». « Il s’agissait vraiment de choses évidentes, comme : combien de mails avons-nous tenté d’envoyer ? Est-ce qu’ils ont été envoyés ? Ont-ils été reçus ? Ouverts ? Cliqués ? Les destinataires sont-ils venus sur notre site et se sont-ils inscrits ? » se remémore Alex Schultz.

D’autres fonctionnalités naissent de situations imprévues. Ainsi, le Safety Check, qui permet de signaler à ses proches qu’on se trouve en sécurité lors d’un événement grave (attentat, catastrophe naturelle…) a germé au sein de l’entreprise en mars 2011. Alors que des salariés de Facebook visitent le Japon pour tenter de mieux comprendre les usages des habitants en matière de mobile  — dans un marché doté de smartphones locaux –, l’archipel est frappé par le tsunami à l’origine de la catastrophe de Fukushima.

Tandis que la panique règne sur place, l’équipe de Facebook réalise à quel point le réseau social pourrait s’avérer utile dans des situations comme celles-ci. Le Safety Check sera déployé pour la première fois en octobre 2014. Son usage est aujourd’hui répandu.

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Copie de la concurrence et services quotidiens

Pour maintenir le cap face à des rivaux très populaires auprès des plus jeunes, comme Snapchat, Facebook n’hésite pas à copier ses fonctionnalités les plus prisées. Si la stratégie, assumée, porte ses fruits sur Instagram — un réseau social qui connaît aussi une grande croissance depuis son rachat par le géant en 2012 et vise le milliard d’utilisateurs dès cette année –, elle s’avère pour l’instant mitigée sur le réseau « mère », où les stories ne semblent pas avoir trouvé leur public.

Car attirer de nouveaux membres ne suffit pas à Facebook : il lui faut aussi maintenir l’intérêt des inscrits, qu’ils soient présents de longue date ou récemment arrivés. Pour ce faire, la plateforme multiplie donc des outils bien pratiques pour favoriser une visite régulière, comme les indications météo, ou, dernièrement, le suivi des élus locaux.

Et la stratégie fonctionne. Au premier trimestre 2017, Facebook a enregistré une hausse de 18 % d’utilisateurs actifs mensuels par rapport à la même période l’an passé… quelques mois seulement avant le palier des 2 milliards.

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